mise à jour le 10 Décembre 2006
 
 
CONFÉRENCE SUR :
"LES CONSTANTES FONDAMENTALES".
Par Roland LEHOUCQ  Astrophysicien à l'OCA
Dans le cadre des RCE 2006
Organisée par l'AFA à la Cité des Sciences de Paris
 
Le Samedi 11 Novembre 2006
 
 
 
Photos : JPM pour l'ambiance. Les photos en haute définition sont disponibles sur simple demande pour ceux qui le souhaitent, de même toutes les photos de cette soirée ne sont pas dans cet article, car j'en ai fait plus de 400, ceux qui sont intéressés par un sujet précis peuvent me contacter, je les leur ferai parvenir par mail.
Les photos des slides sont du conférencier.
 
REMARQUE : Les comptes rendus des conférences sont mis en ligne au fur et à mesure Vous vous en apercevrez en allant voir la page du compte rendu général de temps en temps à l'index "conférences", je signalerai les mises en ligne dans la fenêtre des mises à jour du site
 
BREF COMPTE RENDU
 
Roland Lehoucq est astrophysicien et sa spécialité est la topologie cosmique, mais c'est aussi un grand Tintinologue devant l'éternel, car il a écrit avec son compère Robert Mochkovitch de l'IAP "Mais où est donc le Temple du Soleil" chez Flammarion, passionnant et pas uniquement pour les enfants.
 
Mais ce soir Roland nous parle d'un sujet plus sérieux, thème transversal à toutes les sciences physiques :les constantes fondamentales.
 
 
Mais qu'est ce donc qu'une constante physique?
 
C'est une grandeur particulière dont la valeur est fixe et qui joue un rôle central dans des théories physiques.
 
C'est en fait tout paramètre non déterminé par la théorie que l'on utilise et qui doit être mesuré.
 
La première question qui se pose donc :
 
 
 
 
 
 
 
LA LISTE DES CONSTANTES.
 
La liste reflète plutôt notre ignorance que notre connaissance; elle dépend de qui la composée et à quelle époque.
 
Étudier les constantes d’une théorie revient à explorer les limites de la théorie où elles apparaissent et tenter d’expliquer leur valeur par une théorie plus large.
 
La relativité générale (RG) et le modèle standard nécessite : 21 constantes!
 
·        Masses des particules à 12  dont
o       6 quarks (up-down, top-bottom, strange-charm)
o       3 leptons massifs (électron, mu, tau)
o       les bosons W± et Z0 (interaction faible)
o       le boson de Higgs (brisure de symétrie électrofaible)
·        Interaction W-quark à 4
·        Constantes de couplage à 2
o       Électromagnétisme
o       interaction nucléaire forte
·        Gravitation à 1
·        c et h  à 2
 
mais on pourrait aussi compter :
 
·        Masse des neutrinos à 3
·        Interaction neutrinos Higgs à 4
·        Constante cosmologique à 1
·        Matière noire à n???
 
Le statut des constantes :
Il évolue au cours du temps, comme on le remarque pour la vitesse de la lumière.
 
Elle fut déterminée d'abord par Römer à l'observatoire de Paris pour la première fois en 1676! Il trouve 225.000 km/s un nombre extraordinairement bon en ordre de grandeur pour l'époque.
Puis par Bradley (308.000) et Foucault (299.000).
 
Puis Maxwell établit sa théorie des ondes électromagnétiques, la vitesse de la lumière devient la vitesse de tous les phénomènes électromagnétiques.
 
 
 
C'est Einstein qui en 1905 établit le lien entre l'espace et le temps et change le statut de c, qui devient une limite absolue.
 
c devient la vitesse de propagation de l'information causale.
 
Dernière étape, le BIPM (Bureau International des Poids et Mesures) en 1983, on ne mesure plus en mètre; mais on définit le mètre en fonction de c et du temps (un certain nombre de fréquences d'oscillations etc..)
 
 
 
 
 
LA MÉTROLOGIE ET LES UNITÉS.
 
Métrologie : c'est la science de la mesure. (grec : metros)
 
Mesure physique : Détermination du rapport entre deux quantités de même nature dont l’une est supposée invariante (étalon).
 
Valeur d’une quantité physique : Un nombre sans dimension ET un produit d’unités associées à des étalons.
 
Dimension : La caractéristique physique liée à chacun des étalons (M, L, T, …)
 
La notion de dimension est fondamentale et permet de vérifier l'homogénéité d'une formule.
 
 
Il existe aussi des grandeurs sans dimensions : le nombre Pi par exemple ou e etc…
 
 
•Les physiciens n’ont pas toujours procédé ainsi.
• La valeur d’une constante dimensionnée dépend des unités choisies.
• Les relations entre quantités physiques ne dépendent pas des unités
 
 
 
 
LA DIFFUSION DES CONSTANTES : UN EXEMPLE LA PLAQUE DE PIONEER 10.
 
Dans les années 1970; les sondes américaines Pioneer 10 et 11 se sont intéressées aux planètes extérieures Jupiter et Saturne, elles n'étaient pas élaborées comme les suivantes Voyager ou Cassini, mais elles emportaient avec elle, un message pour les éventuelles civilisations qu'elle pourrait rencontrer dans quelques milliers ou millions d'années : un plaque dorée supposée nous décrire.
 
Les scientifiques (notamment le célèbre Carl Sagan) se sont creusés la tête pour essayer d'en dire un maximum sur nous (est ce bien sage d'abord d'après ce que l'on sait des premiers conquistadors des terres nouvelles, comme dit W Allen, je ne veux peut être pas être découvert!! Mais c'est un autre problème).
 
Voici une reproduction de cette plaque (gravure réalisée par la femme de C Sagan).
Examinons la.
 
 
On remarque d'abord une reproduction de deux êtres humains (la femme étant incomplète, ce qui avait déjà fait scandale à l'époque!!) en proportion par rapport à la sonde stylisée.
En haut à gauche, cela est censé représenter la transition hyperfine de l'atome d'Hydrogène (autrement dit la raie de 21cm qui baigne l'Univers et que toute civilisation intelligente doit être capable de détecter); le trait entre les deux étant supposé être une unité de distance (égale à 21 cm). Et le petit trait vertical change de sens entre les deux figures représentant la transition de l'électron.
Cette unité est utilisée à l'extrême droite près de la hanche de la femme, et représente le chiffre 8 en binaire (1000) correspondant à la taille de la sonde (8 unités de 21cm).
 
 
(il faut pour voir tous ces détails cliquer sur l'image pour plus de définition)
 
 
Plus élaboré est ce qui décrit notre position par rapport à 14 pulsars , la grande étoile à gauche. Les symboles correspondant à des chiffres (en binaire) sont proportionnels à la fréquence de ces pulsars. La longueur des lignes étant elles proportionnelles aux distances de ces pulsars. Ces données permettraient de nous localiser par triangulation. La 15ème ligne horizontale, elle, correspond à notre position par rapport au entre de notre galaxie.
 
Dans le bas de la plaque, on reconnaît notre système solaire et d'où la sonde est partie : de la troisième planète.
De plus on donne aussi une proportion du système solaire en unités basées sur le 1/10 de l'orbite de Mercure. (Mercure est bien marquée en binaire par 1010 c'est à dire 8+2 = 10 unités etc..).
 
Bref c'est un beau casse tête pas très évident que vous pouvez poser à vos amis un soir où vous ne savez pas quoi faire!
 
Revenons à nos constantes.
 
 
 
COMBIEN D'UNITÉS FONDAMENTALES?
 
Les premières unités étaient basées sur l'Homme et de son environnement , comme le "pied", la "coudée" , le "stade" etc..
 
Extrait d'une de mes anciennes présentations sur le mètre :
 
Chaque ville avait “sa” référence de mesure, différente de celle de la ville voisine. Rien qu’en France il existait plus de 2000 unités de mesure différentes en cette fin de XVIIIème siècle.
Pour se rendre compte de cela jetons un œil à ce qui existe en France assez représentatif de tous les pays :
Il y a 2000 mesures différentes en cette fin de siècle dont : la lieue de Picardie (4444m), la lieue de Touraine (3933), la lieue de Brest (4181) etc.. la toise du Châtelet, la toise du Pérou, la ligne, la logne, le mille, la perche, la palme, le doigt, le trait, la brasse, le pied horaire, le pied national, l'aune de Laval, la canne de Toulouse, la verge de Norai, etc…j'arrête là l'énumération car je pense que vous avez compris le problème.
 
La notion d'Égalité de la Révolution a tout de suite imposé une unité qui aurait une seule valeur valable tout le temps et dans tout le pays. Il fallait donc une unification des unités en vigueur et si possible définir une unité qui soit NATURELLE et INVARIABLE.
Les plus grands savants de l'époque (Cassini, Lagrange, Condorcet, Lavoisier,….) se réunirent et discutèrent de la meilleure méthode et il devint rapidement évident que l'unité nouvelle à définir devait être universelle et donc indépendante du pays inventeur.
 
Un tel système ne devait appartenir à personne, et ne devait pas dépendre ni des hommes ni des évènements, bref être UNIVERSEL ET ÉTERNEL.
 
Révolution à égalité à unité valable dans tout le pays si possible : naturelle, invariable, universelle, éternelle
 
Quoi de plus universel que la Terre   Il fut donc décidé par décret en 1791 que la nouvelle unité serait
LA DIX MILLIONIÈME PARTIE DU QUART DU MÉRIDIEN TERRESTRE
En effet; tout le monde et tout pays possède une partie de méridien.
 
Pourquoi le quart, car on pensait à l'époque que 90° était un angle "magique".(Ce n'est donc pas un hasard si la circonférence terrestre est de 40.000.000m).
Ceci étant il fallait mesurer ce quart de méridien et définir d’où partir. En principe il suffit de mesurer une toute petite partie de ce méridien et si possible en son milieu (vers le 45°).
En regardant les cartes de l'époque, seule la France présentait un arc de méridien relativement grand et avec terrain relativement plat facilitant les mesures (triangulations) et climat tempéré.
Il fut donc décidé en 1795, par décret, de mesurer sur le terrain un arc de méridien autour du méridien de Paris de Dunkerque à Barcelone (soit à peu près 8°).
Les astronomes Delambre et Méchain y consacrèrent une partie de leur vie, ils devaient partir chacun d'une extrémité et se rejoindre vers Rodez.
Cela c'est une autre histoire……
 
 
Cette unité fut baptisé d'un nom universel : mètre qui vient à la fois de metros en grec et metrum (latin).
Mais ce fut plus que cela : un concept complet: LE SYSTÈME MÉTRIQUE DÉCIMAL, cela ne concernait pas que les mesures de longueur mais aussi les mesures de poids (kilo).
Ces unités ne dépendaient pas d’un pays, elles furent donc acceptées progressivement par tout le monde
 
 
 
Il y aurait trois constantes fondamentales basées sur trois dimensions fondamentales (MLT) :
 
c G h  les autres s'en déduisant
 
Ce sont des synthétiseurs de concept comme le dit R Lehoucq.
 
 
Ces constantes ont créés des liens entre des concepts auparavant pensés comme séparés.
 
 
 
c (vitesse de la lumière) définit l'espace temps
 
G (constante de gravitation) est un lien entre l'espace-temps et la matière
 
h (constante de Planck) fait le lien entre onde et particule (fonction d'onde).
 
 
À ce moment R Lehoucq nous passe une vue intéressante : le cube des théories.
 
 
Les trois axes représentent les axes des trois constantes ou liés aux trois constantes : 1/c; h et G.
Leurs combinaisons conduit aux théories actuelles.
 
Si on ne tient compte de rien du tout : c'est le point origine : la Mécanique purement Newtonienne.
En se déplaçant dans chaque plan, on passe d'une théorie à une autre :
Exemples : sur l'axe des 1/c on a la relativité restreinte, sur l'axe des h la Mécanique Quantique (MQ) , dans le plan 1/c et h : la théorie quantique des champs.
L'axe vertical G correspond à la gravitation newtonienne, tandis que le plan 1/c et G c'est la RG.
De même le plan G et h correspond à la gravitation quantique newtonienne.
 
Et alors en 3 dimensions maintenant, c'est la théorie du tout.
 
 
On n'avait jamais vu les choses comme cela!
 
 
 
 
 
D'AUTRES POSSIBILITÉS.
 
La théorie des cordes :
 
Nécessite seulement deux unités fondamentales : T et L et 2 constantes fondamentales : c et la corde fondamentale.
 
 
 
LES CONSTANTES VARIENT ELLES DANS LE TEMPS?
 
 
 
La question s'est posée à propos de la constante de structure fine. Qu'est ce donc cette constante d'abord?
 
(d'après Wikipedia) :
 
La constante de structure fine, représentée par la lettre grecque \alpha \, régit la force électromagnétique qui assure la cohérence des atomes et des molécules. Elle fut proposée en 1916 par le physicien Arnold Sommerfeld.
C’est une constante sans dimension, sa valeur communément admise est de :
\alpha = 7.297 352 568(24) \times 10^{-3}  ou proche de 1/137.
 
Elle est définie comme suit :
 
\alpha = \frac{e^2}{\hbar c 4 \pi \epsilon_0} \ = \frac{e^2}{2 \epsilon_0 h c}
 
e \est la charge électrique élémentaire, \hbar = h/(2 \pi) \est la constante de Planck réduite, c \ est la vitesse de la lumière dans le vide, et \epsilon_0 \ la permittivité du vide.
 
Historiquement, la première interprétation de cette constante est le rapport entre la vitesse d’un électron sur la première orbite circulaire du modèle atomique de Bohr et la vitesse de la lumière dans le vide.
 
Dans la théorie de l’électrodynamique quantique, elle représente la force de l’interaction entre les électrons et les photons.
Sa valeur ne peut pas être déduite par la théorie, mais uniquement par l’expérience.
 
Elle est mesurée avec une précision extrême (à 2 10-11 près)
 
 
On pense que cette constante ne l'a pas été dans le passé, et qu'elle a subit de légères variations.
 
Notamment le Dr Murphy de Cambridge qui a étudié sa possible variation se fondant sur l'étude de quasars distants avec le Keck d'Hawaï. Alpha aurait varié de une partie pour 200.000 lors des 10 milliards d'années. D'autres chercheurs mettent en doute cette variation.
 
Bref on ne peut pas réellement statuer, mais la question de variation des constantes se pose quand même.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN.
 
Le livre de R Lehoucq et JP Uzan sur les constantes fondamentales.
 
La présentation de R Lehoucq se trouve sur le net (merci à lui) sous deux formats :
Soit en Power Point de 13MB  soit en format pdf.
 
 
Einstein et les constantes de la Physique présentation PPT par G Cohen-Tanoudji.
 
 
Les constantes, quelle précision par C Larcher  sur ce site.
 
Les constantes de l'Astronomie par l'IMCCE.
 
 
 
 
 
 
 
C'est tout pour aujourd'hui!
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin   www.planetastronomy.com
 
 
Voir les autres compte rendu de conférences des RCE  : ICI.