Mise à jour le 26 Novembre 2010
 
 
    
CONFÉRENCE
"CHASSEUR DE HIGGS AU LHC"
Par Yves SIROIS Labo Leprince Ringuet, responsable CMS pour le CNRS
 
Pour les RCE 2010 Cité des Sciences de Paris
Le 12 Novembre 2010 à 16H00
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.
REMARQUE : Les comptes rendus des conférences sont mis en ligne au fur et à mesure
Vous vous en apercevrez en allant voir  la page du compte rendu général de temps en temps à l'index "conférences", je signalerai les mises en ligne dans la fenêtre des mises à jour du site
 
 
 
BREF COMPTE RENDU
Nombreux public pour un sujet qui promet d’être passionnant.
 
 
 
 
Yves Sirois est chercheur au laboratoire Leprince Ringuet de l’école polytechnique, il dépend aussi du CNRS/IN2P3 (Institut national de physique nucléaire et de physique des particules), c’est à dire du haut lieu français de la physique des hautes énergies.
 
Il est le responsable du côté français de l’expérience fondamentale CMS (Compact Muon Solenoid) qui doit trouver le fameux boson de Higgs.
 
Sa présentation, intitulée « Chasseur de Higgs au LHC » est sous titrée, « À la recherche des origines », voici son plan :
·        Le collisionneur et les grandes expériences
·        Les objectifs scientifiques
·        Les défis technologiques
·        Les premiers résultats.
 
 
 
 
 
INTRODUCTION.
 
 
Le LHC est comme un super périphérique parisien situé à 100m sous terre, il est composé de milliers d’aimants supraconducteurs chargés de maintenir des particules chargées sur leur « orbite » avant collision.
Il y a quatre expériences de haute technologie aux 4 pôles du LHC, les plus importantes, ATLAS et CMS comportent des détecteurs gigantesques qui ont été en partie montés sous terre.
 
 
Le LHC, acronyme de Large Hadron Collider soit grand collisionneur de Hadrons, les hadrons étant des particules sensibles à l’interaction forte (contrairement aux leptons, comme l’électron qui y sont insensibles, mais sont sensibles à l’interaction faible), ils sont composés de quarks.
Il y en a deux sortes : les baryons (protons, neutrons bien connus) et les mésons.
Pour plus de détails voir la définition des particules du modèle standard de la physique.
 
Le LHC qui doit faire tourner des particules chargées à des vitesses très proches de celle de la lumière, nécessite à l’intérieur des anneaux, le vide bien entendu, un champ magnétique très performant et aussi une température très basse, 1,9K !!! Température plus basse que celle de l’Univers actuel (2,7K).
Le LHC doit être capable de collisions délivrant une énergie de 362 MJ (Méga Joule) par faisceau, chaque faisceau comportant près de 3 1014 protons de 7 TeV chacun .
Rappelons que le Joule est l’unité de travail du système international (SI) égale à 1 N.m ou 1 W.s, ce qui n’est peut être pas très parlant pour l’homme de la rue : 1 kWh, énergie fournie par une puissance de 1kW pendant une heure est équivalent à 3,6MJ.
Les 362 MJ par faisceau peuvent être comparés (d’après les scientifiques) à l’énergie cinétique de près de 500 véhicules de 2t se déplaçant à 100km/h.
 
 
 
LE LHC, UN LABORATOIRE MONDIAL.
 
 
Le CERN (Centre Européen de Recherche Nucléaire) est un laboratoire mondial regroupant plus de 7000 scientifiques de 85 pays différents.
 
C’est le lieu d’immenses collaborations planétaire comme on le voit sur ce graphique.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
LES OBJECTIFS SCIENTIFIQUES.
 
L’accélérateur peut être comparé à un puissant … microscope qui doit nous permettre :
 
·        de nous rapprocher des premiers instants de l’Univers,
·        de lever peut être le voile sur la matière noire,
·        d’y apprendre ce qu’est advenue l’antimatière et surtout
·        de comprendre comment les particules acquièrent une masse.
 
Les hautes énergies mises en jeu dans le LHC nous permettent :
·        de sonder la matière à petite distance
·        de créer de nouvelles particules de grande masse
·        d’étudier les très hautes énergies
 
Il existe 4 principes fondateurs à la physique des particules :
·        Le principe d’unification : unification des forces ; recherche des constituants ultimes de la matière…
·        Le principe de symétrie : à toute symétrie correspond une loi de conservation
·        Le principe de relativité : les lois de la physique indépendantes du référentiel de l’observateur
·        Le principe de mesure 
 
 
 
Naissance d’un paradigme (paradigme : manière de voir les choses suivant un modèle bien reconnu).
 
James Maxwell introduit le concept de champ, il remarque une symétrie entre les équations de l’électricité et du magnétisme, il procède à l’unification qui donne naissance à l’électromagnétisme : la lumière est une onde électromagnétique.
 
De même Einstein établit une relation entre espace et temps et crée l’espace-temps.
 
Il y a aussi fusion entre chimie et physique atomique avec la mécanique quantique.
 
Puis dans les années 1960, fusion de l’électromagnétisme et de la force faible.
 
 
Matière et interaction .
 
Les fermions (la matière) et les bosons (messagers des forces) se comportent tantôt comme des ondes et tantôt comme des particules.
 
 
 
Une interaction est décrite en physique nucléaire comme un échange de bosons entre deux fermions.
 
 
En physique de la matière, il y 4 forces fondamentales :
 
·        la force forte,
·        la force faible,
·        la force électromagnétique et
·        la force gravitationnelle
 
Elles ont des degrés d’actions très inégaux, par exemple la gravité est la plus faible mais a un rayon d’action infini.
 
 
 
 
Intéressons nous à l’interaction faible, celle concernée par le LHC.
Rappelons qu’elle agit sur les quarks et les leptons, son influence est limitée au noyau atomique.
Les bosons véhiculent l’interaction faible.
C’est la cause de la radioactivité bêta qui permet à un corps de se transformer en un autre et notamment de transformer un proton en neutron. Le soleil ne brillerait pas sans cette interaction qui avec la transformation du p en n permet la formation du Deutérium qui entre en jeu dans la fusion nucléaire.
 
Signalons aussi que la force faible distingue la gauche de la droite (chiralité) et qu’elle induit des brisures de symétrie spontanées.
 
 
 
 
Mais un des buts de la physique fondamentale moderne, est de trouver le chemin vers une possible unification des 4 forces décrites plus haut .
 
On pense que celles-ci étaient effectivement unifiées au tout début de l’Univers, aux alentours du temps de Planck (10-43s)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
LES CONSTITUANTS ULTIMES DE LA MATIÈRE.
 
 
 
Ce tableau très connu, résume nos connaissances (actuelles, adjectif important !) sur ce que nous pensons être le monde des particules.
 
Ces particules de matière existent pour l’essentiel depuis les premiers moments de l’Univers.
 
 
Elles se sont combinées dans les étoiles pour créer des éléments de plus en plus complexes qui nous composent.
 
 
 
 
 
 
 
La gravitation règne sur l’Univers à grande échelle.
 
L’électromagnétisme règne sur la matière qui nous entoure et est responsable de la cohésion physique des êtres vivants.
 
L’interaction forte est responsable de la cohésion du noyau atomique.
 
Et la force faible. À quoi sert-elle ? À pas grand chose, c’est à dire à presque tout nous dit Yves Sirois.
 
 
L’interaction faible et la matière.
 
La matière stable est exclusivement constituée des particules de la première famille du tableau ci-dessus.
C’est l’interaction faible qui nous cache les autres familles de fermions en leur conférant une durée de vie extrêmement courte.
Comme déjà dit, l’interaction faible distingue entre gauche et droite, c’est une violation de la parité P.
 
On rappelle que les physiciens définissent 3 symétries miroir CPT : Charge, Parité, Temps.
La parité : tout processus physique est équivalent à son image dans un miroir.
On note une symétrie fondamentale pour l’électromagnétisme , de même une symétrie exacte des forces nucléaire forte et gravitationnelle.
Par contre la nature viole la symétrie miroir P (Parité) de façon maximale dans les interactions faibles.
 
Les bosons Z et W ne se couplent qu’aux composantes « gauches » des fermions élémentaires.
 
Les quarks des trois générations se mélangent par échange virtuel du boson W, ce qui crée un déséquilibre essentiel entre matière et antimatière, condition fondamentale pour que la matière domine l’Univers sur l’antimatière.
 
Mais il reste un problème majeur à résoudre :
 
La symétrie fondamentale fait que les bosons (interaction) et les fermions (matière) doivent être de masse nulle.
Tous devraient donc se propager à la vitesse de la lumière.
 
Les fermions sont organisés en composantes gauche et droite.
Pour donner une masse aux bosons Z et W ainsi qu’aux fermions, il faut briser la symétrie fondamentale.
 
 
 
La brisure spontanée de symétrie est caractérisée par une transition de phase vers un état moins symétrique.
 
Des défauts topologiques pourraient avoir été formés quelques 10-35s après le Big Bang, quand le champ de Higgs s’est figé dans des orientations différentes.
 
Le champ de Higgs est un champ scalaire hypothétique, qui se manifeste par le fameux boson de Higgs. Il induit la brisure de symétrie qui donne une masse aux bosons Z et W. Il agit sur les particules élémentaires qui acquièrent elles aussi une masse.
Une fois le champ de Higgs ayant agit, les deux interactions, électromagnétique et faible, se distinguent l'une de l'autre. on dit qu'il y a brisure de symétrie. 
 
 
 
 
 
 
LA PHYSIQUE AU LHC.
 
·        Origine des masses : structure de la matière, 4ème famille de fermions, brisure de la symétrie électrofaible.
·        Origine de l’asymétrie matière-antimatière : violation CP
·        Origine de la matière noire : super symétrie ?
·        Aux origines de la physique dans l’Univers :Grande Unification ? dimensions supplémentaires ? plasma de gluons..
 
 
 
 
Il faut donc une nouvelle physique pour stabiliser la masse du boson de Higgs aux dessous du Tev. Est-ce la super symétrie (abréviation : SUSY) ?
 
La Super Symétrie, est une nouvelle approche qui tente d’unifier les interactions, les particules fondamentales et l’espace-temps. Il s’agit, entre autres, d’unifier par symétrie les fermions et les bosons (les fermions pouvant être des bosons miroirs et réciproquement) et donc d’imaginer des nouvelles particules à découvrir.
Cela doublerait bien sûr le nombre de particules "élémentaires".
 
Cette nouvelle symétrie étend alors la symétrie de l’espace à l’espace-temps avec des mathématiques complexes et inclut en partie la gravitation.
 
 
 
La découverte du boson de Higgs validerait les théories actuelles, à contrario, il faudrait mettre au point une nouvelle physique.
 
 
 
LES IMPACTS TECHNOLOGIQUES.
 
Les expériences du LHC sont motivées par la recherche fondamentale.
La recherche fondamentale est nécessaire ,même si beaucoup pensent qu’elle ne sert à rien.
 
Rappelons nous qu’on n’a pas inventé l’ampoule électrique en améliorant la bougie…..
On n’a pas non plus inventé le web (d’ailleurs ici au CERN  par Tim Berners Lee!) en améliorant le livre.
 
 
Les accélérateurs sont les outils principaux utilisés dans ces grandes cathédrales de physique atomique.
 
 
Il faut se rappeler aussi que la base principale de toute l’imagerie médicale utilisée de nos jours, provient de la physique nucléaire et de la physique des particules.
 
Le CERN développe la Grille (The Grid en anglais), plus puissant que le web pour traiter l’énorme quantité d’informations produites par les expériences menées.
 
 
 
L’expérience CMS.
 
 
 
 
CONCLUSION.
 
En 6 mois le LHC a déjà redécouvert (et confirmé) la physique des 50 dernières années
 
Un des plus grands projets scientifiques de l’histoire est en marche au CERN.
 
Les grandes expériences accumulent des données de collisions à 7Tev depuis le début 2010, on est à la physique des premiers instants de l’Univers.
 
Les résultats des prochaines années devraient nous permettre de comprendre l’origine des masses, l’asymétrie matière antimatière, la nature de la matière noire et finalement la structure de la matière.
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN :
 
LHC, naissance d’un géant , extrait du journal du CNRS.
 
First Z bosons detected by CMS in heavy-ion collisions, communiqué de presse du CERN du 18 Nov 2010.
 
Interview de Y Sirois par Science et Avenir (Avril 2010)
 
Particules et Big Bang  du LHC aux origines de l’univers, CR de la conférence de M Spiro du LHC aux RCE 2008.
 
Le LHC et la masse cachée dans l’Univers, CR de la conférence de F Vannucci pour le séminaire l’Univers Invisible.
 
Le LHC et les deux infinis, CR de la conférence SAF de M Spiro Président du conseil du CERN.
 
Les forces fondamentales par Hyperphysics. (en anglais)
 
Brisure de symétrie par Hyperphysics (en anglais).
 
À la recherche du boson de Higgs document pdf du CEA.
 
Le LHC un géant s’éveille document pdf du CEA.
 
Le LHC et ses défis électrotechniques par F Bordry du CERN, document pdf, très intéressants détails techniques.
 
Brisure spontanée de symétrie et mécanisme de Higgs dans le modèle standard des interactions électrofaibles du LPTHE.
 
Vers la grande unification.
 
Brisure spontanée de symétrie et l’unité des lois de la nature par F Englert, très bien expliqué.
 
François Englert : « Le LHC détectera le boson de Higgs... s'il existe », article de La Recherche.
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin   commission de cosmologie de la SAF
www.planetastronomy.com
Abonnez-vous gratuitement aux astronews du site en envoyant votre nom et e-mail.