Mise à jour 17 Décembre 2013-a (vidéo)
 
 
CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
 «40 ANS D’OBSERVATIONS COMÉTAIRES
AU RADIOTÉLESCOPE DE NANÇAY»
Par Jacques CROVISIER
Astronome LESIA Observatoire de Paris-Meudon
Au FIAP, 30 rue Cabanis, 75014 Paris (métro Glacière).
Le Mercredi 11 Décembre 2013 à 20H30
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.
Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur ma liaison ftp et s'appelle :
SAF-crovisier-cometes.pdf, elle est dans le dossier CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2013-2014. .
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.
 
Cette conférence a été filmée en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV) et est accessible sur Internet
On la trouve à cette adresse   http://www.youtube.com/playlist?list=PLM_NLeMfZ9TrJaTF-g1wPX3b8kv80RwjX 
 
 
Un public attentif !
 
 
 
Jacques Crovisier est astronome au LESIA : Laboratoire d'Études Spatiales et d'Instrumentation en Astrophysique ; c’est un spécialiste en radio astronomie et grand connaisseur des comètes.
 
Il a d’ailleurs longtemps travaillé à Nançay.
 
 
Le conférencier nous ayant mis à disposition sa présentation très détaillée, le compte rendu sera succinct.
 
 
 
 
 
 
 
Voilà presque exactement 40 ans qu’une comète (la comète C/1973 E1 Kohoutek) a été étudiée pour la première fois en radioastronomie au grand radiotélescope de Nançay.
C’était le 11 décembre 1973, début de la radioastronomie des comètes, avant cette date celle-ci était au point mort.
 
Les observations cométaires à l’aide de radiotélescope ne sont pas faciles, le signal est très faible et l’observation se fait pratiquement en aveugle, il faut donc faire confiance aux tables éphémérides.
 
 
La comète Kohoutek découverte en 1973 a pu être observée par la station Skylab récemment lancée en orbite terrestre.
D’ailleurs la NASA modifia les dates de lancement de l’équipage de Skylab 3 afin d’être en phase avec le maximum de la comète.
 
On voit sur cette diapo un dessin de la comète par l’astronaute de Skylab 3, Edward Gibson, daté du 29 dec 1973. C’était un jour après le passage au périhélie. (à 0,14UA du Soleil)
On remarque « l’anti-queue » de la comète.
 
La mission Skylab 3 a duré 84 jours, un record à l’époque !
 
 
 
 
 
 
Le passage et l’étude de cette comète ont été un grand événement à l’époque, il a manifestement aussi inspiré notre dessinateur Cabu.
 
 
Comme dans le passé, l’arrivée de comètes donne toujours lieu aussi à des dérives mercantiles.
 
Le passage de Kohoutek a été une des missions de Nançay qui, à l’époque était le plus grand radiotélescope du monde.
 
Quelques mots sur Nançay tout d’abord :
 
 
 
 
Le site de radioastronomie de Nançay.
 
 
 
La station de radioastronomie de Nançay, date de 1953, date à laquelle l’État a acquis ce terrain de 150 hectares en Sologne.
Les premières observations datent de 1955, elles seront consacrées au Soleil grâce à un réseau, toujours existant, de miroirs interférométriques.
Le grand radio télescope décimétrique (que l’on voit sur le panorama situé plus haut) date, lui des années 1960 ; il fut inauguré par le Général De Gaulle en 1965.
Plus tard le réseau décamétrique fut construit.
Le site de Nançay comprend :
·        Le grand Radio Télescope de Nançay (NRT)
·        Le Radio Héliographe de Nançay (NRH)
·        Le réseau Décamétrique (DAM)
·        Le LOFAR, très grand réseau basse fréquence.
 
Le radio télescope de Nançay (NRT) comporte deux « miroirs » ; l’un mobile et plan et l’autre sphérique et fixe.
Ce dernier reçoit le signal d’un objet capturé par le « miroir » mobile d’en face, orienté vers un point choisi du ciel, et le renvoie sur un chariot focal mobile pour amplification et traitement dans le terminal mitoyen.
Nançay est aujourd’hui le quatrième radio télescope au monde par sa surface collectrice ; le premier est le célèbre radio télescope fixe d’Arecibo à Porto Rico, il fait 305m de diamètre.
 
 
 
Comment observer les comètes à Nançay ?
 
Un radiotélescope permet surtout de mesurer la raie la plus présente dans l’Univers, la raie de 21 cm de l’Hydrogène.
(NDLR : L’Hydrogène est l ‘élément le plus répandu de l’Univers ; il émet une raie caractéristique  de 21cm de longueur d’onde, lorsqu’il est dans son état le plus froid (par exemple entre les étoiles, ou dans le disque des galaxies spirales).
La mesure de cette raie, permet d’atteindre la quantité d’H présente et sa proportion par rapport aux étoiles et poussières.)
 
Un radiotélescope permet aussi de mesurer la raie à 18cm du radical OH présent dans les nuages interstellaires et le rayonnement continuum (un rayonnement à large spectre comme : plasma poussières…)
 
 
Le rayonnement à 21cm étant difficile à détecter car trop faible, il fut décidé de s’orienter vers le 18cm de OH.
 
Ce qui fut fait avec succès , on voit ici le spectre des raies OH de Kohoutek de 1973.
 
Courbe du haut : une raie de référence (source galactique W12)
 
Courbe du bas : la mesure de Kohoutek moyennée du 1er au 12 dec 1973.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
La physico-chimie de l’atmosphère cométaire.
 
 
 
La glace contenue dans le noyau de la comète est chauffée par le soleil et se sublime en molécules de vapeur d’eau. Celles-ci sont cassées par le rayonnement UV solaire en H et OH.
Mesurer la quantité de radicaux OH est donc une indication de la quantité de glace (donc d’eau contenue) libérée par la comète.
La gravité d’une comète étant pour ainsi dire insignifiante, ces molécules (radicaux) s’échappent dans l’espace. On peut mesurer la vitesse d’échappement par effet Doppler sur les raies OH.
En fait c’est un peu plus complexe, car lors de la dissociation de H2O, H et OH sont éjectés avec des vitesses différentes :
H à 19km/s et OH à 1km/s.
 
Plus de 5000 observations sur les comètes ont été effectuées à Nançay.
 
 
 
 
 
La raie à 18cm de OH, explications.
 
La diapo ci-contre explique (ou plutôt essaie d’expliquer !) le mécanisme d’excitation des raies du radical OH.
Le rayonnement UV du Soleil entraîne une cascade d’excitations conduisant à l’émission de raies de différentes longueurs d’onde :
·        dans le proche UV
·        des raies de vibrations dans l’IR
·        des raies de rotation submillimétriques.
 
Les deux niveaux les plus bas produisent les raies à 18cm.
Normalement ces raies sont peu intenses, seulement, les molécules OH sont pompées par le rayonnement solaire ce qui donne naissance à une forte émission dans l’UV.
 
Ces molécules constituent un MASER (Microwave Amplification by Stimulated Emission of Radiation).
 
 
 
 
 
 
Les observations à Nançay.
 
130 comètes observées.
5000 observations.
 
Tout ceci résumé sur une base de données :
 
http://www.lesia.obspm.fr/planeto/cometes/basecom/
 
 
Les bases de données des magnitudes visuelles cométaires et les bases de données de taux de production OH observé à Nançay.
En croisant ces bases de données, on obtient la courbe ci-contre :
 
On obtient une corrélation empirique entre la magnitude visuelle et le taux de production de OH
 
(Jorda et al. 2008, in Asteroids, Comets, Meteors 2008, voir article plus bas)
 
Cette loi permet de faire une évaluation quand on voit une nouvelle comète et que l’on connaît sa magnitude , de prédire la production d’OH.
 
 
 
 
 
Les autres observatoires cométaires .
 
Tout d’abord les observatoires spatiaux comme :
·        la sonde soviétique VEGA lors du passage de Haley en 1986
·        le télescope spatial ISO pour le passage de Hale Bopp en 1995
·        SWAS et Odin dédiés à l’observation de la raie de 0,5mm de l’eau
·        Et bien entendu Herschel le plus grand télescope spatial en IR qui observa les raies de l’eau dans les comètes
 
Sur terre, les bandes de vibration de l’eau peuvent aussi être étudiées par exemple :
·        au VLT de l’ESO
·        au Keck
·        au IRTF
 
De même les raies de HCN peuvent être détectées depuis la terre :
·        avec les radiotélescopes de l’IRAM : Haley en 1985
·        etc..
 
 
Conclusions.
 
Les avantages d’études cométaires en radioastronomie :
·        Les observations sont possibles le jour et la nuit, même aussi très près du Soleil
·        Elles sont peu dépendantes de la météo
·        Il y a toujours un radiotélescope de disponible
 
Les inconvénients de telles études :
·        La sensibilité des mesures est limitée
·        Les observations sont limitées aux périodes d’inversion favorable du maser OH
·        Le mécanisme physique n’est pas parfaitement maîtrisé.
 
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN.
 
 
Article de l’Astronomie de J Crovisier sur le sujet. À lire.
 
The correlation between visual magnitudes and water production rates par L Jorda, J Crovisier et DWE Green.
 
Molécules et masers interstellaires par Nguyen Q Rieu.
 
Pompage des masers interstellaires OH
 
Radio Télescope de Nançay : CR de la visite du 18 Juin 2011
 
L’équipe des comètes au LESIA.
 
L'observation du radical OH dans les comètes avec le radiotélescope de Nançay
 
 
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin   Président de la commission de cosmologie de la SAF
www.planetastronomy.com
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