Mise à jour le 17 Juin 2018
CONFÉRENCE
«MESURER LA DISTANCE DES ETOILES, DES GRECS À GAIA»
Par Jean-Pierre MAILLARD Astrophysicien IAP
Organisée par l'IAP 98
bis Bd Arago, Paris 14ème
Le Mardi 5 Juin 2018 à 19H30
Photos : JPM pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.
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BREF COMPTE RENDU
Jean Pierre Maillard, a passé sa thèse sur le spectromètre à transformée de
Fourier, puis est allé à Meudon et ensuite pour 15 ans d’étude avec le CFHT à
Hawai.
Un an à Montréal puis retour à Paris en 1986, pour de nombreuses missions au
CFHT de nouveau.
Il nous entretient ce soir de l’évolution de la mesure des distances au cours
des siècles, depuis l’Antiquité à nos jours avec les derniers résultats de Gaia.
La mesure exacte des distances est d’une importance fondamentale en astronomie.
Cette détermination (ou plutôt) évaluation a commencé très tôt.
Le principe de la mesure des distances à Terre a longtemps été basé sur la
triangulation.
Déjà les Grecs utilisaient cette méthode bien avant le début de notre ère.
Il s’agit de voir un même objet de deux points différents dont la distance est
parfaitement connue
Si on connait précisément la distance entre deux points (la base, ici AB) on
peut en déduire en mesurant des angles la distance à déterminer (ici BC).
En effet, sur de longues distances, les angles sont plus faciles à mesurer que
les longueurs !
C’est vers -400 qu’Anaxagore, élève de Thalès, évalue la première distance
Terre-Soleil, puis c’est vers -200 que le célèbre
Ératosthène,
directeur de la Bibliothèque d’Alexandrie (la plus grande bibliothèque au monde
pendant des siècles) évalue la circonférence de la Terre en mesurant la distance
d’Alexandrie à Syène et l’angle que faisait l’ombre d’un gnomon entre ces deux
villes.
Il trouve la valeur exacte actuelle !! approximativement 40.000km.
Cette mesure sera reprise plus tard par Ptolémée qui se trompera en évoquant une
valeur beaucoup plus faible, et trompera ainsi tout le monde pendant des
siècles.
Et heureusement, cela permettra à Colomb de convaincre ses sponsors que les
« Indes » n’étaient pas si loin que cela !
Un peu plus tard, vers -127, le génial
Hipparcos, a
l’idée d’utiliser l’ombre de la Terre sur la Lune lors d’une éclipse (de Lune)
pour déterminer le rapport des diamètres Terre/Lune et la distance de la Terre à
la Lune.
Il trouve des valeurs relativement correctes.
Cependant la distance au Soleil est très sous-évaluée d’un facteur 20, et la
restera jusqu’à la Renaissance.
À partir du 17ème siècle, on va s’intéresser aux planètes, à leurs
orbites et à leurs distances.
Depuis l’Antiquité on sait qu’il y a dans le ciel 7 objets errants
périodiquement, ils sont manifestement plus proches que les étoiles. Ils vont
d’ailleurs donner naissance aux 7 jours de la semaine. Parmi ces objets, 5 sont
des planètes.
Aristote avait semé le germe du géocentrisme qui a perduré avec Ptolémée a sévi
pendant le Moyen Age jusqu’à Copernic en 1543.
Il propose une révolution : l’héliocentrisme, la Terre n’est plus au centre du
monde…scandale !
Galilée le confirme avec les phases de Vénus et les satellites de
Jupiter…danger !
Kepler découvre les lois régissant le mouvement des planètes, ce ne sont pas des
cercles mais des ellipses.
Il publie ses trois lois, dont la plus importante : la troisième loi :
T2/a3
est constant, où T est la période de révolution de la planète et a son
demi-grand axe (distance au Soleil), ceci va permettre de calculer exactement en
RELATIF la distance de toutes les planètes du système solaire.
C’est Newton qui les expliquera théoriquement un peu plus tard avec sa loi sur
la gravitation universelle.
Mais les distances absolues des planètes au Soleil, sont inconnues à cette
époque.
Les précurseurs comme Cassini, Picard, Richer etc.. vont essayer de déterminer
la distance de Mars au Soleil (et donc de la Terre au Soleil) en visant la
planète depuis deux endroits distants de la Terre. Ils trouvent un bon ordre de
grandeur
Mais il va falloir attendre la géniale idée de
E Halley pour
calculer plus précisément la distance Terre-Soleil grâce au passage de Vénus
devant le Soleil.
La France est en pointe dans cette campagne de mesures avec nos amis Anglais (en
fait on est en guerre avec eux).
Des scientifiques sont envoyés dans tous les coins du monde pour effectuer ces
mesures. Lalande les collationne et donne enfin une valeur à la distance Terre
Soleil (UA = Unité Astronomique), c’est une valeur énorme, en unités de
maintenant : 150 millions de km. Mais le km n’existe pas encore, mais ça c’est
une autre histoire.
Maintenant on s’intéresse aux étoiles.
Lorsque l'on regarde une étoile « proche » depuis la Terre, le mouvement de
celle-ci autour du Soleil provoque un mouvement APPARENT de l’étoile ; cette
orbite apparente est une ellipse plus ou moins aplatie. C’est la parallaxe.
C'est le célèbre mathématicien allemand Bessel qui le premier mesura en 1838 une
telle quantité : Il mesura le déplacement annuel de l'étoile 61 Cygni comme
étant de 0,29" (depuis cette étoile est aussi appelée, Étoile de Bessel).
C’était une distance énorme : 100.000 milliards de km, c’est lui qui introduit à
cette occasion l’utilisation de l’année lumière (al) comme unité de distance,
unité plus appropriée à ce genre de distance
Son étoile (qui était proche ne l’oublions pas !) était à 11 al!!
L’Univers changeait encore une fois de dimension !!!
En fait dans notre Galaxie, il n'y a pas plus d'un millier d'étoiles (sur 100
Milliards !) qui sont accessibles à la mesure de parallaxe depuis la Terre. Nous
sommes dans un coin relativement vide de notre Galaxie, donc cette méthode a ses
limites.
La distance maximale mesurable avec la méthode de parallaxe terrestre est
approx. 65al.
Mais dans l’Univers, il y a ce que l’on appelait à l’époque, les « nébuleuses »,
elles ont l’air plus loin que les étoiles.
On va s’intéresser à ces objets, et notamment Henrietta Leavitt, elle prouve que
certaines étoiles pulsantes (les
céphéides) sont
des étalons de lumière, c’est à dire des phares dans l’Univers
Leur luminosité intrinsèque est liée à leur période. En mesurant l’éclat
apparent on mesure leur distance !
Par exemple : Andromède = 2,2 millions d’al
L’univers visible devient vieux de 15 milliards d’années
En 1929 on montre que l’Univers est en expansion, mais les distances des étoiles
et galaxies sont encore assez peu précises, cela va durer jusqu’aux années 1990.
Des progrès décisifs se produisent alors avec de nouveaux puissants télescopes
au sol, une optique adaptative et surtout à l’aide de télescopes spatiaux.
Oui, surtout depuis l’espace, et ça a commencé avec le satellite de l’ESA,
Hipparcos (High Precison Parallax Collecting Satellite) lancé en 1989 et
opérationnel jusqu’en 1993.
On a pu grâce à lui, déterminer les caractéristiques précises de plus de 118.000
étoiles et de 273 céphéides.
Afin d’améliorer les données d’Hipparcos, l’ESA décide de lancer
la mission GAIA
dont a rapporté
les derniers résultats il y a quelques semaines.
Gaia est 100 fois plus précis qu’Hipparcos.
Seule une petite partie du ciel (approx 1%) est étudiée par Gaia, mais c’est un
progrès énorme par rapport aux données précédentes.
Ce catalogue contient la position et la luminosité de 1,692 milliards d’étoiles
(chaque étoile a été mesurée plus de 200 fois !), ainsi que la parallaxe et le
mouvement propre de 1,331 milliards d’étoiles.
De même la couleur de plus de 1,3 milliards d’étoiles et la vitesse radiale de
7,2 millions d’étoiles.
Ces données permettront l’élaboration d’une carte 3D
de notre Galaxie.
De plus Gaia s’est aussi intéressé aux petits corps du Système Solaire, les
astéroïdes, et mesuré la position de 14.000 d’entre eux.
Si un successeur à Gaia devait voir le jour, il serait en IR.
POUR ALLER PLUS LOIN :
Cassini et Richer évaluent la distance Terre-Soleil.
Les Aventuriers de l’Astronomie : CR de la conf SAF de JP Martin du 12 Avril
2017
La mesure des distances ds le S Sol. au 17ème : CR conf SAF de Ch Vilain du
12 Sept 2012
Bon ciel à tous !
Jean Pierre Martin .Commission de Cosmologie de la SAF.
Les autres CR des conférences IAP.
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