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Mise à jour 15 Novembre 2017

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CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
 «L’OSCILLATION DES NEUTRINOS:
DE BRUNO PONTECORVO AU PRIX NOBEL 2015»

Par Daniel VIGNAUD

Astrophysicien APC.

À TelecomParisTech 46 rue Barrault Paris 13.

Le Vendredi 10 Novembre 2017 à 19H00  Amphi Thévenin

 

Photos : JPM et DB pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)

Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.

Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur ma liaison ftp et se nomme :

Vignaud-SAF-Neutrinos-nov2017.ppt, qui se trouve dans le dossier CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2017-2018. . 

Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.

 

Cette conférence a été filmée en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV) et est accessible sur Internet

On la trouve à cette adresse   https://www.youtube.com/playlist?list=PL1ZHG2CIuv2dhqjktOLanBwZ8R4ZXzLrZ

 

 

 

 

Daniel Vignaud fait partie du groupe « neutrinos » du laboratoire d’Astroparticules et de cosmologie APC.

 

Voilà ce qu’il en est dit sur leur page d’accueil :

 

Le neutrino joue un rôle-clé à la frontière de la physique des particules et de l'astrophysique. Sa masse a de fortes implications en physique des particules, car elle ouvre une porte vers les théories de grande unification au-delà du modèle standard, et en cosmologie, en liaison avec la matière noire. Sa nature même n'est pas établie : est-il une particule de Majorana ou de Dirac, c'est-à-dire est-il ou pas sa propre antiparticule ?

 

Le neutrino est en outre un messager incomparable: sa faible probabilité d'interaction lui permet de s'extraire aisément des milieux émissifs les plus denses (Soleil, couches profondes des supernovas, noyaux actifs de galaxies) et de sonder l’univers sur des distances cosmologiques.

 

 

 

Le neutrino existe en trois saveurs (ne, nm, nt). Un des résultats les plus importants de ces dernières années en physique des particules est la découverte du phénomène d’oscillation des neutrinos, c'est-à-dire leur transformation d’une saveur à l’autre pendant leur propagation, ce qui implique que les neutrinos aient une masse non nulle (ce qui n’était pas prévu à l’origine par le modèle standard de la physique des particules). Les oscillations ont été découvertes avec les expériences de neutrinos solaires (comme Borexino) et de neutrinos atmosphériques et ensuite confirmées par les expériences auprès de réacteurs et sur faisceaux, qui ont permis une mesure précise des paramètres de mélange. Le dernier en date étant l’angle de mélange q13, mesuré entre autres par l’expérience Double Chooz (image) à laquelle le laboratoire a pris une part de premier plan. La valeur non nulle de ce paramètre ouvre désormais la voie vers l’étude précise de la transition nm à ne avec les neutrinos atmosphériques (projet KM3NeT/ORCA) et les neutrinos de faisceau (projet DUNE et R&D associée WA105 au CERN). Ceci devrait permettre de connaître l’ordonnancement des masses des neutrinos et la mesure de la phase CP, paramètre fondamental lié à l’asymétrie matière-antimatière dans l’univers.

 

C'est dans ce contexte que le groupe "neutrinos" du laboratoire APC contribue aux principaux axes de la physique du neutrino à travers les projets déjà mentionnés et une participation à l’expérience de future génération auprès de réacteurs JUNO. Le groupe est également impliqué dans l’expérience SOX qui étudie les oscillations sur courte distance afin d’explorer l’éventuelle existence d’une quatrième famille de neutrinos, dite stérile, en ce sens qu’elle n’interagit pas avec la matière.

 

Le groupe Neutrinos de l’APC est également membre de la collaboration DarkSide,  qui développe une nouvelle technologie de TPC à Argon liquide et gazeux pour la recherche directe de matière noire.

 

Dans le domaine de l'astronomie neutrino, la participation à l'exploitation du télescope à sous-marin ANTARES et à son successeur KM3NeT/ARCA est évoquée dans la section sur l'astrophysique à haute énergie.

 

 

(Je me suis inspiré de temps en temps, de comptes rendus déjà écrits sur un sujet identique)

 

Nous sommes baignés en permanence par 65 milliards de neutrinos par cm2 et par seconde venus du Soleil

 

Notre corps humain contient aussi environ 20 millions de neutrinos issus du Big Bang et émet chaque seconde quelques milliers de neutrinos liés à sa radioactivité naturelle

 

Les neutrinos sont également produits dans l'interaction des rayons cosmiques dans l'atmosphère ou dans les noyaux actifs de galaxies...

 

 

POURQUOI LES NEUTRINOS?

 

Les neutrinos sont apparus suite à une anomalie que l'on avait détectée avec le rayonnement Bêta.

La désintégration bêta moins, c'est la transformation d'un neutron d'un noyau en proton, la désintégration bêta plus est la transformation d'un proton en neutron.

 

Dans la radioactivité bêta moins, un électron était éjecté du noyau avec une énergie variable ce qui semblait prouver qu'une certaine quantité d'énergie était émise (conservation de l'énergie, une grande loi de la physique) mais non détectée.

Les lois de conservation de l'énergie n'étaient plus respectées, ce qui posait problème.

 

C'est Wolfgang Pauli, qui émit l'hypothèse qu'un particule inconnue emportant l'énergie manquante, devait être émise à l'occasion de cette réaction.

 

Cette particule "virtuelle" n'est pas encore détectée, mais elle sera baptisée neutrino. Son symbole : n 

 

En fait lors de l'émission bêta moins, c'est un anti-neutrino qui est émis suivant la réaction :

 

http://www.planetastronomy.com/special/2010-special/16dec09/vignau4.gif

 

Le neutrino n'a en fait été détecté que près de 25 ans plus tard, en 1956.

Il fut mis en évidence à Savannah River près d'une pile atomique par Reines et Cowan.

 

Ensuite Brookhaven, le CERN et le Fermilab mettent en évidence les différentes sortes de neutrinos.

 

Les dernières expériences montrent qu'il ne peut exister QUE trois sortes de neutrinos.

 

 

Comment interagissent les neutrinos ??

Très faiblement !

Ce sont de vrais passe-muraille!

 

Si les neutrinos ont une masse, lorsqu'ils se déplacent, ils peuvent se transformer (plus ou moins totalement) d'une espèce dans une autre.

 

Le phénomène est périodique en fonction de la distance L entre la source et le détecteur et prend le nom d'oscillations

 

 

 

 

 

C’EST LÀ QU’INTERVIENT BRUNO PONTECORVO.

 

Mais la plupart des gens n’ont jamais entendu parler de B Pontecorvo, qui est donc Bruno Pontecorvo ?

 

Pour (presque) tout savoir à son sujet, voire le livre de Frank Close de 2015 (en anglais) :

The divided life of Bruni Pontecorvo, physicist or spy?

 

Il existe une traduction française chez Flammarion parue en 2016 : « Le mystère Pontecorvo »

 

 

On voit sur la slide ci-contre les principales dates correspondant à B.Pontecorvo.

 

On se rend compte qu’il a eu une longue période où on avait perdu sa trace. Certains pensent qu’il était passé à l’Est avec sa famille. Bref, toujours un mystère.

 

 

 

 

 

 

 

On voit sur cette diapo, la parcours erratique de Bruno Pontecorvo.

 

Passant d’Italie, à Paris puis à Montréal au Canada, puis aux USA et retour en Europe en Angleterre à Harwell (centre de recherche atomique) avant d’atterrir en Russie Soviétique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L'OSCILLATION DES NEUTRINOS.

 

Les neutrinos sont de trois types (on dit trois "saveurs"), et quand ils se déplacent, il semble qu'ils puissent passer d'une espèce à l'autre plus ou moins totalement, le phénomène est périodique en fonction de la distance, c'est ce que l'on appelle l'oscillation des neutrinos.

 

Le fait qu'ils se transforment de l'un en l'autre type (prévu par la MQ), prouve qu'ils ont une masse, car le fait de passer d'un type à l'autre implique qu'ils n'aient pas la même masse, donc pas de masse zéro.

 

Différentes expériences actuelles, permettent de donner des limites et des rapports entre les masses des différentes sortes de neutrinos.

 

Le neutrino serait 10 milliards de fois moins massif que l'électron, néanmoins, il contribue au bilan massique de l'univers et ne peut excéder quelques pourcents, ce qui est tout de même du même ordre de grandeur que la masse de toutes les étoiles (0,3% de tout l'Univers)!

 

L’oscillation des neutrinos, c’est-à-dire, le fait de passer d'une saveur à une autre, font que les lois de la physique quantique imposent qu'il ait une masse et que celle-ci soit différente pour chaque saveur!

Des neutrinos de masse nulle ne pourraient pas osciller d'une saveur à une autre, les lois physiques l'interdisent (les masses doivent être différentes pour changer de saveur, donc les masses ne peuvent pas être nulles!), ce qui prouve bien qu'ils ont une masse.

 

 

 

LES NEUTRINOS SOLAIRES.

 

C'est en 1938, que Hans Bethe imaginait que des réactions nucléaires de fusion étaient au cœur de la production d'énergie des étoiles, et en premier lieu du Soleil.

 

 

 

La température du Soleil est suffisamment élevée pour qu'il y ait réaction de fusion; il se produit plusieurs réactions nucléaires qui peuvent se résumer à cela :

 

Des neutrinos sont produits pendant ces réactions ainsi qu'une énergie de 4 10-12W, c'est cela qui nous chauffe.

 

On peut calculer le flux de neutrinos arrivant sur Terre.

 

Le résultat est le chiffre déjà annoncé : 65 milliards par cm2 et par seconde.

 

Les neutrinos produits par les réactions nucléaires au cœur du Soleil sont du type électronique; ils se transforment au fil de leur voyage vers la Terre, et à leur arrivée, ils ont à la fois la forme des neutrinos électroniques et des deux autres types.

Ils changent ainsi de saveur.

 

Public passionné et écoutant religieusement le conférencier !

 

 

LES NEUTRINOS ATMOSPHÉRIQUES.

 

Les rayons cosmiques interagissent avec l'atmosphère et produisent des gerbes de particules que l'on peut observer en fonction de l'angle d'arrivée.

 

Il y a principalement création de neutrinos muoniques et électroniques. Il y a deux fois plus du premier type que du second.

 

Mais on a mis en évidence un déficit entre le nombre de neutrinos de type muonique détectés provenant des antipodes et les prévisions théoriques, on n'en détecte pas deux fois plus que des types électroniques. Pourquoi?

 

Se transforment-ils pendant le voyage comme les neutrinos solaires?

 

On les détecte au SuperKamiokande quand ils ont traversé toute la Terre.

 

On s'aperçoit que le nombre de neutrinos détectés provenant du "haut" est le nombre attendu (les neutrinos muoniques descendants n'ont pas le temps de se transformer dans une autre saveur avant d'atteindre le détecteur,), alors que le nombre de neutrinos provenant du "bas" (ayant traversés la Terre et parcourent jusqu'à mille fois plus de chemin, se convertissent vraisemblablement en neutrinos tauiques) est en déficit d'un facteur deux.

 

Ils se transforment aussi comme les neutrinos solaires.

 

C’est la lumière Cherenkov que l’on détecte.

 

 

 

 

 

PRIX NOBEL 2015.

 

Takaaki Kajita est un physicien Japonais spécialiste des neutrinos, il a été à l’Institut ICRR (Institue for Cosmic Radiation Research) de Tokyo avant de devenir Directeur du Center for Cosmic Neutrinos  à l’ICRR.

Il obtient son doctorat (PhD) en 1986, sur la recherche de la désintégration éventuelle du proton, qui n’a pas été mise en évidence.

Il est célèbre pour ses recherches sur les neutrinos à l’Observatoire Kamiokande et Super-Kamiokande, où il remarque les déficits de certaines classes de neutrinos.

 

C’est en Octobre 2015 qu’il obtient avec son collègue Canadien le Prix Nobel de Physique 2015  pour la découverte des oscillations de neutrinos.

 

http://www.planetastronomy.com/special/2016-special/06avr/clip_image025.jpg

Suite à son Nobel, il donne une conférence publique à la Sorbonne en Avril 2016

 

 

Bruno Pontecorvo, l’inventeur de l’oscillation des neutrinos… et de beaucoup d’autres idées géniales sur les neutrinos

 

Il aurait mérité aussi un Prix Nobel !

 

 

 

CONCLUSION.

 

 

Les neutrinos sont les messagers des phénomènes fondamentaux dans l'Univers.

 

La mort des étoiles massives en SN émet une énorme quantité de neutrinos.

 

Ce sont les plus vieux fossiles de l'Univers, mais ne pèsent pas lourd dans la masse manquante.

 

La découverte de la masse non nulle des neutrinos ouvre une fenêtre sur une nouvelle physique au-delà du modèle standard.

 

L'astronomie des neutrinos en est à ses balbutiements mais est très prometteuse, et il reste encore tant de mystères à dévoiler…

 

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN :

 

 

Daniel VIGNAUD : Les neutrinos ; CR conf. du 8 Juillet 2009

 

Le monde étrange des neutrinos : CR de la conférence SAF de Th Lasserre du 10 Dec 2014

 

Oscillating Neutrinos : CR conf Prix Nobel de Physique 2015 à la Sorbonne du 6 Avril 2016

 

Super-Kamiokande events

 

Masses et oscillations de neutrinos, cours IN2P3.

 

Bruno Pontecorvo, mister Neutrino ! Par SM Bilenky.

 

L'histoire du neutrino par l'IN2P3.

 

La matière noire et le neutrino stérile par Th Lasserre du CEA dans le cadre de l'école Chalonge

 

Les neutrinos, rencontre du 4ème type : CR de la conf CEA de TH Lasserre du 19 juin 2014

 

 

 

 

 

Prochaine conférence mensuelle de la SAF : Vendredi 15 Décembre  19H00

 

CONFÉRENCE DE FLORENCE DURRET Astrophysicienne IAP SUR

« LES AMAS DE GALAXIES»

 

 

Entrée libre mais réservation obligatoire. (Vigipirate) À partir du 11 Novembre 2017  

 

 

 

Bon ciel à tous

 

 

Jean Pierre Martin   Président de la commission de cosmologie de la SAF

www.planetastronomy.com

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