Mise à jour le 15 Février 2008
 
 
CONFÉRENCE
"QUELQUES RECETTES POUR PERCER LE SECRET DES ÉTOILES"
Par Jean Paul ZAHN 
Astronome émérite de l'Observatoire de Paris-Meudon
Organisée par l'IAP
98 bis Av Arago, Paris 14 ème
 
le mardi 5 Février 2008 à 19H30
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos
Vidéo de la conférence par le CERIMES disponible sur leur site quelques jours après (le CERIMES propose aussi toutes les vidéos des conférences IAP) :      voir : http://www.cerimes.fr/
 
 
 
BREF COMPTE RENDU
 
 
 
 
 
 
 
 
JP Zahn a fait partie de l'IAP dans les années 1960, puis de 1966 à 1981 il est devient Directeur de l'Observatoire de Nice ensuite du célèbre Pic du Midi dont il s'occupe de la rénovation.
 
Depuis 1992 il est à Meudon où il s'intéresse aux théories des intérieurs stellaires, effets de marrée et dynamique des fluides.
 
Sa femme Suzy Collin, astronome de renom aussi, que nos lecteurs connaissent bien était dans l'assistance. (voir sa dernière conférence sur les trous noirs géants à la SAF).
 
 
 
 
 
 
 
Pour pouvoir étudier les propriétés des étoiles, il faut pouvoir en mesurer leur distance.
 
 
Cela a commencé depuis l'Antiquité par la mesure d'angle, comme la méthode de la parallaxe.
 
(consulter cet article complet de ma part sur la mesure des distances en astronomie pour vous remettre dans le bain;)
 
C'est Friedrich Bessel le premier en 1838 qui mesura la distance de 61 Cygni par rapport à nous grâce à cette méthode. Il mesure un parallaxe de 0,314" d'arc alors que les meilleures mesures actuelles (Hipparcos) donnent 0,28547, pas mal pour l'époque!!
 
 
 
 
 
Mais on avance dans le temps, on sait maintenant mesurer le spectre des étoiles, ce sont les glorieux anciens comme William Wollaston , Joseph von Fraunhofer, Léon Foucault et Gustav Kirchhoff et Robert Bunsen qui ont tracé la route.
 
Il y a plusieurs types de raies dans les spectres comme on le voit sur l'illustration ci contre.
 
En haut : un solide liquide ou gaz chauffé à haute pression possède un spectre continu; milieu : un gaz à basse pression et haute température produit un spectre avec raies d'émission. En bas : un gaz à basse pression situé dans le trajet d'une lumière chaude produit des raies d'absorption.
 
 
 
 
 
C'est Fraunhofer qui le premier publie l'atlas des raies des éléments (un millier).
 
Les étoiles ont des spectres semblables et nous renseignent sur leur composition et température effective.
 
JUSTEMENT COMMENT ALORS CARACTÉRISER LES DIFFÉRENTES ÉTOILES.
 
Les paramètres fondamentaux des étoiles sont :
 
·        La distance (mesure par trigonométrie)
·        La masse (dans le cas des étoiles doubles, loi de Newton)
·        Le rayon (étoiles doubles et méthode d'interférométrie)
·        La luminosité (photométrie, astrométrie)
·        La température (les spectres)
·        La composition chimique (les spectres).
 
 
Tout ceci ont mené deux très sérieux astronomes (Hertzsprung et Russel) indépendamment l'un de l'autre à utiliser une courbe très pratique pour positionner les différentes étoiles, c'est le fameux diagramme HR baptisé en l'honneur de ces deux personnages.
 
Les étoiles ne sont pas distribuées au hasard, une grande quantité d'étoiles se trouve sur une ligne centrale appelée série principale (main sequence en anglais).
 
Mais d'autres branches existent aussi, comme celle des géantes (giants) et des naines blanches (white dwarfs).
 
 
Notre Soleil est lui très banal au milieu de la séquence principale.
 
 
Voir aussi cet article de l'ESA avec une superbe courbe basée sur les relevés Hipparcos.
 
 
 
 
La composition chimique du Soleil devrait nous donner une idée de la composition typique des étoiles.
 
Les raies du spectre correspondent à celles émises par des éléments connus tels : Fe, Ti, Ca, Mn, Ni, H, O …..
 
Mais en quelle quantité sont ils dans les étoiles?
 
C'est la physique statistique développée notamment par Boltzmann (1871), Saha (1923) et Payne-Gaposchkin (1925) qui eut beaucoup de chance de percer, car les femmes n'étaient pas très bien vues à cette époque là dans les domaines scientifiques.
 
On mesure la composition superficielle du Soleil :
73,3% H     24,9% He     reste 1,8% O, C, Fe, Ne, N ….
Composition très différente du spectre mesuré.
 
Alors, que nous apprend la physique sur l'intérieur du Soleil?
 
Il est en équilibre hydrostatique sous l'action de deux forces :  pression et gravité.
 
La pression au centre : Pc = (rc G M ) / R
 
C'est aussi un gaz parfait, il obéit donc à son équation d'état (PV = nRT) on en déduit : Pc = (R rc Tc ) / m
                                               Où le coefficient mu peut varier entre 1 et 2 suivant le degré d'ionisation de H ou He.
 
La température centrale Tc est de 15 millions de K, confirmée par les modèles les plus récents.
 
 
 
MAIS QUELLE EST DONC LA SOURCE D'ÉNERGIE DU SOLEIL?
 
On a imaginé plusieurs solutions dans le passé :
·        Les réactions chimiques : énergie insuffisante
·        La contraction gravitationnelle : énergie insuffisante
·        Les réactions nucléaires : énergie plus que suffisante, c'est bien cela le moteur de notre étoile (et de toutes les étoiles).
 
C'est Albert Einstein qui grâce à sa fameuse formule E = m c2 décrivant l'équivalence matière énergie nous indique la voie de cette énergie gigantesque.
 
La masse des particules fusionnées (He) est plus faible que la masse de celle-ci avant fusion (4xH). C'est la transformation de 4 atomes H en un d'He (en fait c'est le résultat final) et sa légère diminution de masse (0,7%) qui est la source de cette énergie.
Si la masse disparaît, elle est remplacée par de l'énergie.
 
 
 
 
On peut aussi en déduire la durée de vie de notre étoile en calculant le temps qu'il faut pour faire disparaître tout l'Hydrogène : 10 milliards d'années.
 
 
En fait la réaction est beaucoup plus complexe que la transformation directe de 4H en un He, c'est ce que l'on appelle le cycle p-p (pour proton proton), illustré sur la figure ci contre.
 
C'est Hans Bethe qui a donné le détail de ces réactions nucléaires, heureusement pour nous, il quitte l'Allemagne nazie en 1933!
 
 
 
 
 
 
LA STRUCTURE DU SOLEIL.
 
 
Toutes ces avancées techniques nous permettent d'élaborer un modèle de structure du Soleil comme on le voit.
 
 
Mais comment valider ce modèle?
Y a t il des preuves concrètes de la validité de nos hypothèses?
 
 
 
Oui!
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Les neutrinos en sont une.
 
En effet dans ces réactions nucléaires, des neutrinos sont produits, il suffirait donc de les détecter.
 
Le soleil émet donc des neutrinos, et les équations nucléaires étant parfaitement connues, le nombre de neutrinos émis (leur flux) est connu, donc on devrait pouvoir en détecter.
 
Oui mais voilà, les neutrinos sont très discrets même si ils sont très nombreux (des milliers de milliards nous traversent chaque jour!), ils ne se détectent pas facilement, il sont très difficiles à arrêter. Dans le Soleil, déjà, un sur 10.000 arrive à la surface.
 
Mais si on est patient et protégé au fin fond de la terre, on peut arriver à en détecter quelques uns. C'est ce qu'a fait pour la première fois Ray Davis en les faisant interagir dans du trichloréthylène.  L'atome de Cl absorbe le neutrino et se transmute en Argon que l'on peut détecter.
En un mois Davis mesura ………..4 neutrinos!!
 
C'était quand même formidable mais moins (en fait trois fois moins) que les modèles ne le prédisait.
 
On ne savait pas pourquoi, la solution dut attendre plus de trente ans; il existe trois sortes de neutrinos, et il se transforme de l'un en l'autre dans son voyage; ce que l'on ne pouvait pas détecter à l'époque de Davis.
 
Maintenant on détecte les neutrinos dans divers endroits de la Terre, comme le Super Kamiokande au Japon; 
 
 
La validation par les ondes sonores observées à la surface du Soleil.
 
 
 
À la fin des années 1960 on détecte des curieux mouvements périodiques (de l'ordre de qq minutes) dans notre soleil, une expédition polaire (Pôle Sud, idéal car le Soleil est présent plus de 12 heures par jour) est décidée une dizaine d'années plus tard afin d'étudier notre étoile pendant plusieurs jours (polaires).
 
Et surprise, on s'aperçoit que le soleil vibre comme un tambour. Il résonne sur une période de l'ordre de 5 minutes. L'énergie est émise à des fréquences précises.
 
Il vibre comme tout instrument de musique, il a donc des fréquences propres caractéristiques de l'objet qui les émet, et leurs détermination permet d'atteindre la structure interne. (voir photo de gauche sur 120h d'observation).
 
Ces premières mesures ont été améliorées ensuite par l'expérience GOLF à bord de SOHO.
 
C'est une science qui s'appelle l'héliosismologie.
 
Voici une animation parmi d'autres de David Guenther qui montre (très amplifié, bien sûr) les oscillations du Soleil.
 
Le satellite d'observation du Soleil SOHO l'a confirmé.
 
Vous voulez écouter les vibrations du Soleil, allez donc à Stanford.
Ses vibrations sont dans le domaine des très basses fréquences : 3 à 10 mHz.
 
Il existe même un réseau de surveillance du soleil, qui s'appelle le GONG (acronyme de Global Oscillation Network Group), et qui a pour but d'étudier le soleil par le principe d'hélio sismologie.
 
La prochaine étape c'est l'héliosismologie spatiale avec Corot.
 
 
 
 
L'ÉVOLUTION DES ÉTOILES.
 
 
 
Sa naissance se produit dans un nuage moléculaire; qui se contracte sous son propre poids.
 
Au bout de 30 millions d'années, la température augmente (effet "pompe à vélo") et les réactions nucléaires peuvent commencer à démarrer.
 
Le Soleil (et les étoiles de masse comparable) est sur la séquence principale.
Il brûle son Hydrogène et évolue lentement.
 
Après 10 milliards d'années, H est épuisé, il devient une géante rouge en brûlant maintenant ses cendres d'Hélium.
 
 
Puis il deviendra une naine blanche.
Ce genre d'étoiles est extrêmement massive : 1 million de fois la densité du Soleil pour un diamètre de l'ordre de grandeur de celui de notre Terre.
Un bel exemple de naine blanche est le compagnon de Sirius.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Le destin d'étoiles comme notre Soleil donne lieu à des réactions nucléaires fondamentalement importantes pour nous, car sans ces réactions et leurs sous produits nous n'existerions pas.
 
Elles apportent en effet par la combustion de l'Hélium, des éléments "lourds" qui nous constituent comme Be, C, O , etc….; le Big Bang ne l'oublions pas ne produit que H, He et Li, c'est un peu court pour démarrer la vie.
 
 
 
 
 
 
 
Évolution des étoiles massives :
 
 
Les étoiles de plusieurs masses solaires suivent elles un autre chemin, elles vivent beaucoup moins longtemps (en effet plus volumineuses elles brûlent leur carburant beaucoup plus vite).
 
Leur fin est aussi beaucoup plus brutale!
 
C'est une explosion qui se termine soit en super nova et il reste soit une étoile à neutrons soit un trou noir.
 
Mais il y a quelque chose de positif dans ce processus : la création d'éléments nouveaux comme le Fer, le Si etc.. indispensables à la vie organisée.
 
 
 
 
 
Voilà fin du voyage, le Soleil nous a servi de guide, d'ailleurs la physique stellaire est le socle sur lequel s'est bâtie l'astrophysique.
 
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN :
 
Un métier une passion, interview de JPZ chez nos confrères de Ciel et Espace.
 
Les ondes sismiques solaires par le Dapnia (CEA).
 
Le neutrino qu'est ce que c'est ? par l'IN2P3.
 
Les neutrinos CR d'une conférence de H Reeves à al Cité des Sciences.
 
Couleur et luminosité des étoiles.
 
 
Sur l'évolution des étoiles :
 
Par l'Observatoire de Paris (LESIA) et JP Zahn.
 
Un cours de l'Observatoire de Paris aussi, clair.
 
L'évolution des étoiles vue par cosmovisions.
 
La mesure de l'évolution des étoiles, pdf de 6 pages.
 
Vie et mort des étoiles par N Rumiano, un classique.
 
L'évolution des étoiles vue par Clea.
 
 
 
 
 
Bon ciel à tous
 
 
Jean Pierre Martin 
www.planetastronomy.com