Mise à jour le 14 Novembre 2008
 
 
    
CONFÉRENCE
"LA MESURE DES DISTANCES EN ASTRONOMIE
DES ORIGINES À NOS JOURS"
Par Jean-Pierre MARTIN Physicien Paris VI
 
Pour les RCE 2008 Cité des Sciences de Paris
Le 10 Novembre 2008 à 11H30
 
Photos : JPM. pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos et des animations.
La présentation complète (en ppt), est disponible sur ma liaison ftp
Elle est dans le dossier MESURE-DISTANCES-LONG et elle s'appelle. : MESURE-DISTANCES-RCE08-long.ppt il y a des animations aussi qui vont avec
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant.
 
 
 
BREF COMPTE RENDU
Le CR sera bref car la présentation est disponible sur le Net.
 
 
 
Difficile de retracer une telle aventure en si peu de temps, la version mise en ligne est un peu plus complète que la conférence donnée aux RCE.
En voici un court résumé, étant donné qu'elle est disponible au téléchargement.
 
 
­On a tous entendu des phrases du genre : On vient de découvrir un objet situé à 10 milliards de km de la Terre ou une supernova a explosé, elle était à 100 années lumière de nous.
Mais comment fait-on pour mesurer de telles distances énormes?
­
Depuis que l'Homme appréhende la voûte étoilée, comment a-t-il essayé d'évaluer son environnement immédiat : la prochaine ville, le bateau à l'horizon, les pays lointains, la forme de la Terre, la distance de la Lune, du Soleil, des planètes et des étoiles qui nous entourent et avec quelles unités de mesure, et avec quelle précision.
 
 
Cette présentation est l'histoire résumée et modeste de cette quête.
­
 
Je ne prétends pas être complet et je ne peux pas couvrir tout le sujet en détails car cela dépasserait le cadre de cet exposé, mais je cite de nombreux ouvrages en référence pour ceux qui veulent aller plus loin
 
 
 
 
 
AU DÉBUT ÉTAIENT LES GRECS
 
­Pour être capable d'évaluer (je ne dis pas encore mesurer) les distances, il fallait connaître la forme de la Terre.
­De nombreuses indications (bateau s'éloignant à l'horizon, ombre de la Terre sur la Lune lors des éclipses de Lune, découverte de nouvelles constellations plus on va vers le Sud…) imposent à nos grands ancêtres  (350 av. JC) une évidence:
­La terre était ronde (Thalès de Millet qui mesure aussi la grande pyramide),.
­Vient ensuite la question suivante : si elle est ronde, quelle est sa dimension?
 
ARISTARQUE DE SAMOS (-280)
­Mais alors quelles sont ses dimensions? Il avait remarqué que lors d'une éclipse de Lune totale, la Lune restait dans l'obscurité pendant à peu près 2 heures (en fait 2h et demi) alors qu'il lui faut une heure pour parcourir son diamètre, il en déduisit que le diamètre de la Lune est approximativement de 1/3 le diamètre de la Terre. (chiffre réel = 0,27) Il comprit aussi que le soleil devait être immense et que donc logiquement c’est la Terre qui devrait tourner autour. (HÉLIOCENTRISME)
­Malheureusement cette idée choque ses contemporains et le grand Aristote pense lui que la Terre est au centre du monde, erreur fatale que l’on va traîner des siècles!
 
ÉRATOSTHÈNE DE CYRÈNE (-200)
Bibliothécaire de la célèbre Bibliothèque d’Alexandrie (on « empruntait » tous les documents arrivant au port pour en faire des copies!) Le plus génial, il trouva une méthode astucieuse pour mesurer le diamètre de la Terre. Le jour du solstice d’été, le soleil éclairait le fond d’un puits au zénith a Syène, par contre à Alexandrie le même jour, à la même heure, un bâton posé dans le sable faisait de l’ombre, il mesura l’angle  Ces deux villes sont sur le même méridien
À l’aide d’un bâton  il mesure le rayon terrestre
Il connaissait la distance entre les 2 villes : 5.000 STADES
Il l’a fait mesurer par un marcheur professionnel ! (bématiste Béton)
Il en déduisit que la circonférence était 50 fois plus grande (360/7 # 50) soit 250.000 stades  Soit R=6400km en unités de notre époque    EXACT!
 
HIPPARQUE DE NICÉE (-150)
Il est le premier à classer les étoiles visibles en 6 catégories (toujours actuel) ce sont ce qu’on appellera les magnitudes
Il rend compte du phénomène des saisons et découvre la précession des équinoxes
Malheureusement, il place la Terre au centre du monde et introduit un système compliqué pour expliquer les mouvements des planètes, il sera repris par Ptolémée
Il utilise la parallaxe pour évaluer la distance terre-lune (exacte)
 
 
 
 
PTOLÉMÉE (vers 120)
Les Grecs étaient très troublés par le fait suivant : si la Terre n’est pas fixe au centre de “l’Univers”, comment n’est-on pas emporté par la vitesse? (En fait l’atmosphère tourne avec la terre) Il semblait donc raisonnable que la Terre soit fixe, ce fut la seule erreur des grecs.  Cette notion de géocentricité a été reprise par le plus célèbre des astronomes grecs du début de notre ère: Claude Ptolémée
Problème du géocentrisme : Avec la terre au centre  comment expliquer le mouvement rétrograde apparent par rapport au fond du ciel de certaines  planètes (Mars, Jupiter..)? Il reprend le système d’Hipparque et met au point un système de cercles se déplaçant dans des cercles : les épicycles rendant compte exactement des mouvements des planètes
 
L’ALMAGESTE : Il publie ses tables dans un livre célèbre où il fait une synthèse de toutes les connaissances de l’époque (notamment Hipparque)
de al = le et megistos = très grand  en arabe
 
 
 
 
Ce système fondé sur une base fausse expliquait presque parfaitement les mouvements dans l’espace et permettait de s’y retrouver (astrologie)
La Terre était au centre du monde, cela allait plaire à la nouvelle religion montante qui adopta tout de suite ce dogme Il remesure le diamètre de la Terre, mais le sous-évalue de 30%, c’est cette valeur qui sera malheureusement maintenue au cours des siècles
 
 
MERCI AUX ARABES
Tout le savoir Grec aurait été perdu si les Arabes n’avaient pas été là
Le savoir grec parvient au monde arabe par les Indes (conquête d’Alexandre) ils traduisent les textes grecs et améliorent l’Astrolabe notamment
Arrive en Europe par l’Espagne (al andalus!)
 
15 SIÈCLES DE PERDUS LE GRAND OUBLI
Personne n’osait contester le nouveau dogme introduit par Ptolémée, l’homme était le centre du monde Il ne s’est donc (presque) rien passé en Europe pendant près de 15 siècles après l’époque des Grecs.   Quel gâchis!!!
Heureusement les savants Arabes étaient là pour retransmettre progressivement le savoir des anciens Grecs
AU MOYEN AGE : Les croyances et l’intolérance religieuse construisent un mur de plomb sur les connaissances scientifiques
 
À L’AUBE DES DÉCOUVERTES   LES TROIS MOUSQUETAIRES
Ils étaient 4, ils ont révolutionné la vie scientifique et notre vie à tous
Ils ont participé à l’élaboration d’une nouvelle forme de pensée en astronomie et favorisé l’éclosion de nouvelles méthodes de mesure
Accueillons-les, ce sont
         Copernic, Galilée, Kepler et le petit génie, Newton
 
NICOLAS COPERNIC (1473-1543)
­
Copernic était polonais, contemporain de Colomb, Leonardo, Luther, fit ses études à Bologne, déjà l’Europe.
On s’intéressait à l’astronomie pour déterminer la date de Pâques avec précision, or les calculs de Ptolémée avec le temps ne collaient plus.
 
 
 ­Il reconsidéra les idées d’Aristarque avec le Soleil au centre
­Mais il avait un problème, c’était ……un homme d’église, alors, dilemme!
­
 
Il est le premier à mettre en cause le système de Ptolémée il le trouve trop compliqué Ne serait-il pas plus simple et plus logique d’avoir le soleil au centre?
­Son livre révolutionnaire : De Revolutionibus va vraiment révolutionner le monde 
 
 
Il faudra 50 ans pour que ses idées commencent à percer
 
 
NE PAS OUBLIER : UN OBSERVATEUR EXCEPTIONNEL : TYCHO BRAHE
Extravagant, riche et truculent astronome Danois , « nez d’or » perd son nez suite à un duel absurde Construit un château-observatoire : Uraniborg : la ville des étoiles
Manufacture ses propres instruments Obsession de la précision : note les positions exactes des étoiles et planètes pendant des décennies
Découvre une nouvelle « étoile » en 1572 : Nova Stella qui va donner naissance aux Novas et super Novas car il croyait qu'une étoile venait de naître, en fait c'était le contraire l'expression nova est restée. Et en 1577 une comète!
Une révolution : le ciel n’est plus immuable  Le Maître de J Kepler
 
JOHANNES KEPLER (1571-1630)
Pauvre, chétif et myope, mauvais départ dans la vie pour un futur génie de l’astronomie  Il fit donc ….Des maths
Utilise les données de son maître Tycho Brahé  Les mesures accumulées pendant des décennies par Tycho vont lui permettre de trouver le secret des orbites planétaires!
 
Notamment avec la 3ème Loi de Kepler : T2/a3  est constant, où T est la période de révolution de la planète et a son demi-grand axe (distance au Soleil), ceci va permettre de calculer exactement en RELATIF la distance de toutes les planètes du système solaire   . Par exemple on sait maintenant que Saturne est 10 fois plus loin du Soleil que la Terre ne l'est, mais c’est tout ce que l’on peut dire.
 
GALILEO GALILÉE  (1564-1642)
Galilée utilise pour la première fois en 1609 une lunette pointée vers le ciel
2009 = année de l’astronomie
Les satellites de Jupiter et les phases de Vénus le confortent dans l’idée que Copernic a raison
 
ISAAC NEWTON (1643-1727)
Et enfin Newton vint!
Issu d’une famille modeste étudie à Cambridge, mais la grande peste de 1665, l’oblige à rentrer chez lui (Woolthorpe)
Pendant cet exil forcé, à 25 ans, il fait ses plus grandes découvertes
La pomme de Newton et la Lune sont attirées toutes les deux par la Terre!!!
 
En ce qui nous concerne, il mit de l'ordre dans les découvertes précédentes notamment les lois de Kepler., en énonçant la loi de la gravitation universelle.
La 3ème loi de Kepler devenait un cas particulier de la loi de la gravitation.
Newton, a donné une toute nouvelle approche, plus mathématique des phénomènes régissant l'Univers ainsi qu'une nouvelle forme de pensée plus analytique.
D'autre part la contribution de Newton à l'optique et à la spectroscopie a été fondamentale pour l'astrophysique.
 
 
PENDANT CE TEMPS LÀ
Un certain Jean Dominique Cassini, citoyen du compté de Nice (appartenant à l’Italie) est professeur d’Astronomie à l’Université de Bologne
Louis XIV charge Colbert de l’engager et de l’inviter à Paris où l’Observatoire est en construction. Il arrive en 1669 et prend la nationalité française quelques années plus tard 
 
Il va diriger l’Observatoire et être le précurseur d’une dynastie d’astronomes
Cassini s’occupe surtout à mesurer la Terre et il définit le Méridien de Paris
Il mesure la France à la demande du Roi Aie ! Elle est plus petite (tracé en gras) que sur les cartes officielles Louis lui fait remarquer que les astronomes lui ont fait perdre plus de terrains que toutes ses batailles réunies!
 
 
À LA FIN DU XVIIème SIÈCLE QUE SAIT-ON?
La Terre est ronde et tourne autour du Soleil
5 autres planètes connues
Rayon de la terre connu, diamètre du soleil et de la lune connus en angle
Distances relatives entre les planètes connues (proportions)
Mais aucune distance absolue connue
La bande des Quatre nous a maintenant confirmé les DISTANCES RELATIVES des planètes connues dans le système solaire, c'est à dire les PROPORTIONS de ce système. 
Mais de valeur absolue permettant de connaître l'ÉCHELLE RÉELLE que nenni!
Les instruments de mesure sont rudimentaires :
 
La prochaine étape relate la recherche d'une mesure absolue quelconque, car une seule valeur détermine toutes les autres.
 
Alors à quoi a-t-on pensé? A la distance la plus élémentaire et la plus fondamentale :
la distance Terre-Soleil appelée Unité Astronomique (UA).
 
 
 
 
 
 
LA QUÊTE DE L’UNITÉ ASTRONOMIQUE (UA)
Des astucieux savants : Cassini, Halley, Le Gentil, Cook .. à l’aide de mesures géométriques simples à partir de points différents de la Terre vont réussir à mesurer la distance Terre-Soleil (UA).    

Ce fut une aventure à la Indiana Jones qui a déjà été contée dans une présentation antérieure (Le Transit de Vénus) Ces savants étaient les aventuriers de la science
GLOIRE LEURS SOIT RENDUE ICI
 
 
 
 
HALLEY : IDÉE GÉNIALE
 
 
Edmund Halley, (celui de la comète!) jeune astronome anglais a une idée géniale :
 
Il va se servir du passage de Vénus (transit) devant le Soleil pour en déduire la distance Terre Soleil ou Terre Vénus
 
Halley prévient le monde scientifique, Halley sait qu’il ne pourra pas assister lui même au prochain transit de 1761 (il meurt en 1742)
 
Il prévient la communauté scientifique de l’époque de l’importance du phénomène
 
Malgré l’antagonisme français-anglais, ce sont les Français qui s’engagent à fond dans l’expérience et vont remuer ciel et terre pour lancer des expéditions dans le monde entier
 
 
 
 
 
LE MONDE TRAQUE  LE TRANSIT DE 1761
L’astronome Français Joseph Nicolas DELISLE (un étudiant de Cassini et futur patron de Charles Messier) alarma plus d’une centaine d’astronomes de par le monde : il leur envoya la carte qui localisait les lieux du transit
L’Académie Royale organisa plusieurs expéditions: L’Abbé JB CHAPPE D’AUTEROCHE en Sibérie, Alexandre Guy PINGRÉ à Madagascar et Joseph Hyacinthe Jean Baptiste LE GENTIL DE LA GALAISIÈRE prévu à Pondichéry, Cook à Tahiti
 
Toutes les mesures ramenées par nos vaillants explorateurs/astronomes ont permis d’atteindre l’évaluation de l’Unité Astronomique    Halley avait eu raison.
 
Distance Terre-Soleil : 150 000 000 km (8 minutes lumière)
L’Univers devenait soudain immense
 
 
LA RÉVOLUTION FRANÇAISE ET L’ASTRONOMIE
Tout ce que je viens de dire est faux, ou presque.
Pourquoi? Une unité de mesure universelle (comme le mètre) n’existe pas encore.
Chaque ville avait “sa” référence de mesure, différente de celle de la ville voisine.
Rien qu’en France il existait plus de 2000 unités de mesure différentes en cette fin de XVIIIème siècle. Pour se rendre compte de cela jetons un œil à ce qui existe en France assez représentatif de tous les pays :
Il y a 2000 mesures différentes en cette fin de siècle dont : la lieue de Picardie (4444km), la lieue de Touraine (3933), la lieue de Brest (4181) etc.. la toise du Châtelet, la toise du Pérou, la ligne, la logne, le mille, la perche, la palme, le doigt, le trait, la brasse, le pied horaire, le pied national, l'aune de Laval, la canne de Toulouse, la verge de Norai, etc…j'arrête là l'énumération car je pense que vous avez compris le problème.
La notion d'Égalité de la Révolution a tout de suite imposé une unité qui aurait une seule valeur valable tout le temps et dans tout le pays. Il fallait donc une unification des unités en vigueur et si possible définir une unité qui soit NATURELLE et INVARIABLE.
Les plus grands savants de l'époque (Cassini, Lagrange, Condorcet, Lavoisier,….) se réunirent et discutèrent de la meilleure méthode (brain storming on dirait maintenant) et il devint rapidement évident que l'unité nouvelle à définir devait être universelle et donc indépendante du pays inventeur.
Un tel système ne devait appartenir à personne, et ne devait pas dépendre ni des hommes ni des évènements, bref être UNIVERSEL ET ÉTERNEL.
Révolution --> égalité --> unité valable dans tout le pays si possible : naturelle, invariable, universelle, éternelle
 
Quoi de plus universel que la terre, il fut donc décidé par décret que la nouvelle unité serait 
LA DIX MILLIONIÈME PARTIE DU QUART DU MÉRIDIEN TERRESTRE
 
Pourquoi le quart, car on pensait à l'époque que 90° était un angle "magique".(Ce n'est donc pas un hasard si la circonférence terrestre est de 40.000.000m).
Ceci étant il fallait mesurer ce quart de méridien et définir d’où partir. En principe il suffit de mesurer une toute petite partie de ce méridien et si possible en son milieu (vers le 45°). En regardant les cartes de l'époque, seule la France présentait un arc de méridien relativement grand et avec terrain relativement plat facilitant les mesures (triangulations) et climat tempéré.
Il fut donc décidé en 1795, par décret, de mesurer sur le terrain un arc de méridien autour du méridien de Paris de Dunkerque à Barcelone (soit à peu près 8°).
Les astronomes Delambre et Méchain y consacrèrent une partie de leur vie, ils devaient partir chacun d'une extrémité et se rejoindre vers Rodez
 
Toutes ces idées font appel à un vieux principe :  LA TRIANGULATION, connue de Thalès en 600 av JC Il s’agit de voir un même objet de deux points différents dont la distance est parfaitement connue
 
VITE UN NOM!  Nom universel :  basé sur le latin (metrum) et sur le grec (metros) pour mesure,  on inventa le….MÈTRE
Mais ce fut plus que cela : un concept complet: LE SYSTÈME MÉTRIQUE DÉCIMAL, cela ne concernait pas que les mesures de longueur mais aussi les mesures de poids (kilo). Ces unités ne dépendaient pas d’un pays, elles furent donc acceptées progressivement par tout le monde
Il fallait donc créer des multiples et sous-multiples, encore une fois le plus international possible; il fut donc décidé que les multiples seraient à racines grecs : deca, hecto, kilo.. et les sous-multiples à racines latines : milli, centi, deci….
Le mètre est défini en fonction de la toise du Pérou, cette unité était manufacturée en platine et poinçonnée par l‘Etat et déposée au pavillon de Breteuil à Sèvres. Des copies furent envoyées dans toute la France.
Petit à petit cette nouvelle unité fut acceptée dans le monde entier. (avec les Anglais en échange du méridien de Greenwich!!)
On peut maintenant admettre ce qui a été dit en introduction comme vrai.
La route est libre pour de nouvelles découvertes.
 
 
LES NOUVELLES PLANÈTES
En 1781 William Herschel, un astronome amateur a découvert une petite lueur se déplaçant dans le ciel de nuit en nuit.
C’était une planète; la première planète découverte depuis l’antiquité. De plus sa position aussi lointaine (presque 20 UA), doublait la taille du système solaire connu qui s’arrêtait alors à Saturne.
Dans les années suivant la découverte d'Uranus , on s'aperçut que son mouvement ne correspondait pas à ce qui était prédit par les lois Képleriennes et Newtoniennes.
Il pourrait y avoir donc une autre planète plus loin qui perturberait son orbite.
Indépendamment l'un de l'autre deux jeunes savants, l'un Anglais, l'autre Français se sont mis à faire chauffer leurs règles à calculs et découvrirent une nouvelle planète : Neptune
 
 
 
 
 
ET AU-DELÀ DU SYSTÈME SOLAIRE?
Il faut inventer d’autres méthodes et procéder pas à pas On va utiliser de nouvelles techniques qui vont s’appuyer les unes sur les autres et nous faire pénétrer de plus en plus loin dans l’Univers De proche en proche on va évaluer nos distances cosmiques.
 
LA PARALAXE
 
 
Lorsque l'on regarde une étoile depuis la Terre, le mouvement de celle-ci autour du Soleil provoque un mouvement APPARENT de l'étoile; cette orbite apparente est une ellipse plus ou moins aplatie.  C’est la seule estimation directe des distances, elle se base sur la mesure de la parallaxe d'une étoile, c'est-à-dire l'angle sous lequel le diamètre de l'orbite du Soleil est vu depuis l'étoile
 
(schéma : document astro-Rennes)
 
Deux points d'observations situés à 6 mois d'intervalle offrent une base de mesure très grande (2 UA) permettant de déterminer des objets plus éloignés que les planètes.
L'angle p (la moitié de l'angle de vision entre les 2 positions extrêmes) est appelé parallaxe de l'objet. Une étoile est située à une distance de un parsec quand elle a une parallaxe de une seconde Elle est donc située á 206.265 UA (3,26 années lumière) par exemple Proxima : p= 0,76" donc 1,32 parsec (4,3AL)
 
 
 
C'est le célèbre mathématicien allemand Bessel qui le premier mesura en 1838 une telle quantité : Il mesura le déplacement annuel de l'étoile 61 Cygni comme étant de 0,29" (depuis cette étoile est aussi appelée, Étoile de Bessel). Puis le chemin étant ouvert d'autres astronomes ont commencé la chasse, on trouva la parallaxe de Alpha Centauri: 0,8" approx. soit une distance de 1,2 parsec (4 AL) la plus proche des étoiles.
Des milliers d'étoiles furent mesurées dans ce XVIIIème siècle, mais les limites furent vite atteintes : la plupart des étoiles sont très loin et donc inaccessibles à la mesure par parallaxe.
En fait dans notre Galaxie, il n'y a pas plus d'un millier d'étoiles (sur 100 Milliards!) qui sont accessibles à la mesure de parallaxe depuis la Terre. (nous sommes dans un coin relativement vide de notre Galaxie)      
Les déplacements à mesurer sont tellement faibles que la limite correspond vite aux variations d'atmosphère terrestre, pour cette raison le satellite Hipparcos a été envoyé en orbite terrestre , là, affranchi des contraintes atmosphériques, il put mesurer les parallaxes de plus de 100.000 étoiles avec précision, et ceci jusqu'à quelques centaines d'AL..
Alors que faire pour les étoiles et galaxies très éloignées qui composent d'ailleurs 99% de l'Univers??        
Henrietta a la solution, mais avant il faut parler de magnitude  
 
RAPPEL : MAGNITUDES
Hipparque, l'astronome Grec du IIème siècle av JC avait effectué le classement d'un millier d'étoiles visibles en six catégories, qu'il appelait première magnitude pour les plus brillantes et 6ème magnitude pour les moins brillantes.
Le terme magnitude est resté et on a pris l'habitude d'utiliser ce classement, en fait on appelle ce terme la MAGNITUDE APPARENTE (ou VISUELLE), car c'est ce que l'on voit, c'est l'intensité lumineuse mesurée, ce n'est pas l'intensité lumineuse émise.
La MAGNITUDE ABSOLUE est la magnitude apparente CONVENTIONNELLE d'une étoile si sa distance était de 10 La magnitude est liée à la distance, si on connaît la distance et la magnitude apparente, on connaît la magnitude absolue, si on connaît la magnitude apparente et la magnitude absolue, on connaît la distance.
Revenons en ce début de XXème siècle..
 
L’ÉPOQUE MODERNE :TOUT S’ACCÉLÈRE
Des nouveaux télescopes voient le jour
 
LES TÉLESCOPES PROFESSIONNELS : Des vraies bêtes à recueillir la lumière!! (on dirait en langage astro des pièges à photons)
 
À la même époque : On découvre PLUTON
 
HENRIETTA ET LES CÉPHÉIDES
Henrietta Leavitt était une jeune astronome américaine du début du XXème siècle qui s'intéressait aux étoiles variables des nuages de Magellan (pourquoi pas!!).
Elle était sourde et avait du mal à se faire sa place dans un monde machiste
Elle se tourne vers les étoiles Elle remarqua qu'une classe d'étoiles avait une magnitude variable dans le temps, bref elles pulsaient. Comme les premières étoiles de ce type furent découvertes dans la constellation de Céphée (entre le Cygne et Cassiopée), on appela ce genre d'étoiles variables des Céphéides.
Elle découvrit plus de 2000 étoiles variables au cours de sa carrière!
 
LES VARIABLES PULSANTES OU CÉPHÉIDES
Certaines Étoiles se dilatent et se contractent menant à une variation de luminosité. (La première étoile variable que l'on découvrit fut une géante rouge appelée Mira Ceti, en 1596) La première étoile connue des temps modernes , était située dans la constellation de Céphée ; a donné son nom aux Étoiles présentant les mêmes caractéristiques. Or notre Henrietta s'aperçut que dans ce nuage de Magellan, il y avait des Céphéides qui changeaient de magnitude apparente périodiquement, elles passaient de 7 à 4,6 en 5 jours et 8 heures
Plus la période était longue, plus l'éclat était important et donc plus la magnitude était faible.
Elle les classa par période croissante, et remarqua que les luminosités augmentaient également. Or comme toutes ces étoiles se trouvaient dans la même galaxie, on pouvait les considérer comme étant globalement à la même distance.
La luminosité intrinsèque n’était donc liée qu’à la période.
 
C’était une INTUITION GÉNIALE : elle trouva donc une relation directe entre la magnitude apparente et la période de variation : la magnitude apparente (du max de luminosité par exemple) ou la luminosité apparente était linéaire avec le log de la période.
Mesurer la période d'une céphéide permettait ainsi de connaître la luminosité intrinsèque et, mesurant aussi la luminosité apparente (vue depuis la Terre), on put déterminer la distance (le rapport entre la luminosité apparente et la luminosité intrinsèque est proportionnel à l'inverse du carré de la distance).
 
C'est cette relation qui fait des Céphéides l'un des outils de base de l'astrophysique en tant qu’élément pour apprécier les distances.
 
Plus la période est faible, plus la luminosité est faible Les céphéides sont des étoiles très lumineuses et peuvent ainsi servir de chandelle standard pour la mesure de distances dans l'Univers. Le phénomène physique étant le même pour toutes les Céphéides, la période donne une indication de l’éclat absolu!
La période donne l'éclat intrinsèque de l‘étoile observée qui, comparé à la magnitude apparente de l‘étoile, permet de déterminer sa distance relative.
Mais nous n'avons toujours pas de distance absolue.
Il nous faudrait UNE SEULE Céphéide de distance connue pour étalonner la courbe (déterminer le coefficient a)   Et alors? Et alors?
 
 
 
 
SHAPLEY EST ARRIVÉ
Donc si on arrivait à mesurer la distance d'une seule Céphéide on aurait une échelle pour étalonner l'Univers, car on trouve des Céphéides partout et elles sont très brillantes (10.000 fois notre soleil en moyenne).
 
Harlow Shapley en 1917, utilisa les informations de Henrietta et mit au point une méthode s'inspirant des parallaxes statistiques (non expliquée ici, car un peu "complexe", basée sur la combinaison de mouvement propre d'étoiles par rapport au Soleil et sur l'effet Doppler).
 
Cette méthode proche de la méthode des parallaxes séculaires lui permet de déterminer la distance d'étoiles variables de notre Galaxie similaires aux Céphéides (RR Lyrae).  Il put ainsi étalonner la courbe relative en courbe de magnitude absolue fonction de la période.
En d'autres mots, les Céphéides devenaient ainsi DES ÉTALONS DE LUMIÈRE.
On put ainsi calculer la distance les nuages de Magellan : 50.000 parsecs approx puis la distance à Andromède: 2MAL .
 
La méthode Leavitt-Shapley permit de mesurer des distances énormes jusqu'à approximativement  100 Millions d'années lumière.
 
 
COMMENT MESURER DONC LA DISTANCE AU DELÀ ??
Par la relation Tully-Fisher!
Dans les années 1970 les astronomes Tully et Fisher remarquèrent qu'il y avait une relation entre la vitesse de rotation maximale des galaxies spirales et leur luminosité intrinsèque.  Plus une galaxie tourne vite, plus elle est brillante.
Si on pouvait mesurer V, on en déduirait M et avec la magnitude apparente on calculerait d  Cette méthode permet de mesurer, je dirai plutôt d'évaluer, car la marge d'erreur est grande, les galaxies lointaines.
Une autre méthode beaucoup plus simple et directe a vu le jour depuis plusieurs décennies :
 
LA LOI DE HUBBLE
Dans les années 1920, Edwin Hubble, jeune astronome américain, en étudiant les galaxies lointaines, trouva qu'il y avait une relation entre l'éloignement de celles-ci et leur vitesse d'éloignement. En fait plus elles étaient loin, plus elles semblaient s'éloigner vite de nous. Il montra ainsi l’expansion de l’Univers.
Il généralisa cette trouvaille aux galaxies qu'ils ne pouvaient pas mesurer, et en déduisit leurs distances basées sur leur vitesse d'expansion.
 
Cette découverte (qui a été plusieurs fois améliorée bien après) a donné des arguments à ceux qui voyaient l'Univers en expansion continue, cette théorie se trouva donc confirmée par les mesures de "redshift".
La loi de Hubble peut s'exprimer ainsi :   V = H0 d  où V est la vitesse radiale de la galaxie en question et d sa distance. H0 est appelé la constante de Hubble et sa valeur est encore en débat 
 
Le vrai challenge pour les années futures sera de déterminer avec précision cette constante et de prouver définitivement que c'en est une, constante. Ce sera passionnant.
Connaissant la vitesse de récession de la galaxie étudiée, on peut ainsi en déduire une estimation de sa distance.
Cette méthode prend, comme la méthode de Tully, le relais quand des Céphéides ne peuvent plus être étudiées car trop lointaines.
 
Mais pour plus de précision à ces énormes distances, il fallait trouver un nouveau type de phares dans cet Univers.
 
Ce sont des étoiles super brillantes : les Super Novæ Ia.
 
 
LES SUPERNOVA TYPE IA
Très récemment (années 80-90) on a fait une découverte immense concernant les supernova de type Ia (système binaire d'étoiles où une naine blanche tourne autour d'une étoile normale; le transfert de matière vers la naine blanche fait que celle-ci explose : elle devient une supernova) 
 
Au pic de leur luminosité lors de l'explosion, elles produisent toutes la même intensité lumineuse. De cette information on peut bien entendu en déduire la distance.
 
LA GENÈSE DES SUPERNOVA
 
Les SN Ia correspondent à l'explosion thermonucléaire d'une naine blanche qui a un compagnon plus massif qui l'alimente.  Cette explosion apparaît quand la masse de cette naine blanche dépasse une certaine masse critique (dite de Chandrasekhar et égale à 1,4 la masse solaire). Il y a effondrement allumage des couches supérieures (Carbone) et destruction totale de l'étoile. C’est un phénomène doté d'un seuil et donc qui a toutes les chances d'être reproductible d'une supernova de type Ia à l'autre
 
La luminosité de l'étoile au moment de l'explosion correspondant au même phénomène physique (On suppose qu’elle expulse toujours la même quantité d’énergie au moment de l’explosion), est donc similaire pour toute les Ia, ce qui les rend éligibles au titre de CHANDELLES STANDARD (standard candles en anglais) pour étalonner l'univers.
 
D’autre part c’est un  phénomène extrêmement lumineux qui permet donc de mesurer des distances cosmologiques.  Une lumière qui brille dans la nuit ne permet pas d'en connaître sa distance, mais si on sait qu'il s'agit d'un phare et non d'une bougie, on peut avoir une idée de sa distance.
À son maximum d'intensité une supernova brille comme un milliard de Soleils!
Magnitude absolue remarquablement constante : de l’ordre de -19!!
 
Les SN sont très lumineuses et donc visibles de très grande distance; mais ces phénomènes sont rares : une par siècle et par galaxie en moyenne, aléatoires : où faut-il regarder? et éphémères : il ne faut pas les rater!.
Mais c’est un étalon de lumière pour évaluer les distances cosmologiques.
 
 
PLUS RÉCEMMENT ON MET AU POINT DE NOUVELLES MÉTHODES :
·        ­Effet S-Z (Sunyaev-Zeldovich) : méthode prometteuse pour l’Univers lointain, on mesure la modification du CMB par un amas, dont on détermine aussi la taille dans le ciel, ces deux informations donnent une idée de sa distance.
·        ­Les lentilles gravitationnelles : un objet lointain passant derrière un amas de galaxies donne plusieurs images « fantômes » dont les apparitions sont liées à sa distance.
 
 
 
RÉSUMÉ DES DIFFÉRENTES MÉTHODES
 
Tableau résumant les différentes méthodes de mesures de distances dans l’Univers.
 
 
CONCLUSION
L’Homme a d’abord entrepris de mesurer son environnement proche en mesurant sa planète grâce à des outils simples comme la triangulation, puis a évalué la taille de sa planète.
Il s’est ensuite tourné vers son univers proche le système solaire en déterminant astucieusement la distance de la Terre au Soleil.
Les étoiles proches ont été déterminées grâce à la parallaxe.
Les galaxies lointaines ont eu leur distance mesurée à l’aide de phares situés de loin en loin dans l’Univers : les Céphéides.
Mais les distances cosmologiques ne peuvent être évaluées que grâce à ces explosions super lumineuses que sont les super novæ Ia.
 
 
 
Bon ciel à tous
 
 
 
 
POUR ALLER PLUS LOIN :
 
L'échelle des distances par l'observatoire de Paris.
 
Séminaire sur les supernovae à l'IAP.
 
Le rendez vous de Vénus de JP Luminet, extraits.
 
Les distances intergalactiques par N Rumiano.
 
La mesure des distances en astronomie des origines à nos jours par JP Martin. (texte qui a servi de base à cette présentation).
 
Le mètre du monde de Denis Guedj, l'histoire du système métrique.
 
 
Bon ciel à tous
 
 
 
 
Jean Pierre Martin  
www.planetastronomy.com