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Mise à jour le 17 Avril 2019

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CONFÉRENCE
« Mars Express, Rosetta, Hayabusa, ExoMars, MMX : la quête spatiale de “l’émergence” de la vie entre dans une nouvelle ère »

Par Jean Pierre BIBRING, astrophysicien, IAS Orsay

Dans l’amphi Farabeuf exceptionnellement

Organisée par l'IAP   98 bis Bd Arago, Paris 14ème

Le Mardi 2 Avril 2019 à 19H30

 

Photos : JPM pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)

Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur.  Voir les crédits des autres photos

Vidéos des conférences proposées par l’IAP sur Canal U

 

BREF COMPTE RENDU

 

 

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Je reprends une partie d’un texte écrit pour une conférence similaire de JPB.

 

 

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Jean Pierre Bibring est bien connu de nos lecteurs, il est astrophysicien à l’IAS (Institut d’Astrophysique Spatiale) d’Orsay, il a travaillé sur les missions Cassini-Huygens, MRO et est responsable de l’instrument Omega sur Mars Express.

 

Il est le scientifique en charge de la science à bord de l’atterrisseur européen Philae sur la comète 67P Churyumov/Gerasimenko.

 

La Terre serait-elle une planète banale ?

 

La vie est un produit générique de complexité croissante.

 

Elle serait présente à grande échelle dans l’Univers.

 

L’eau est essentielle à la vie : zone d’habitabilité.

 

 

Il évoque la première image prise dans l’espace : la face cachée de la Lune par Luna 3 et qui a été rephotographiée plus tard par LRO.

 

La pluralité des mondes est une notion très ancienne.

 

Hipparque (-150) et Ptolémée (+150)  : la Terre est unique et centrale ; cette idée perdure jusqu’à Copernic.

Copernic (1543) : les planètes tournent autour du Soleil.

Giordano Bruno (1548 – 1600) : l’Univers est infini, les étoiles et les planètes sont de même nature. Il y a une infinité d’étoiles et donc une infinité de terres.

Dans cette vision, la Terre est affreusement banale, il y en a partout et donc il y a de la vie partout dans l’Univers.

Pendant quatre siècles, on va garder la vision de Copernic et Galilée : il n’y a rien de spécifique chez nous sur Terre.

Galilée (1610) montre qu’autour de Jupiter il y a des objets qui se déplacent. Il n’y a donc pas qu’autour du Soleil que les choses tournent. Le mouvement est une propriété générique dans l’espace.

Kepler (1618) : les trajectoires des planètes sont elliptiques.

Newton (1687) : le mouvement des astres est une propriété universelle, le cosmos est le lieu de l’uniformité des lois. Ce cosmos bien ordonné des Grecs devient l’Univers régi partout par des mêmes lois qui sont UNIVERSelles.

 

Avant l’ère spatiale, la planète Mars est un monde considéré non seulement « habitable » mais comme habité.

Toutes les observations étaient interprétées dans ce sens. L’exemple des canaux de Mars par Schiaparelli (1877) est typique.

On imagine que la population qui vit sur Mars habite près de l’équateur alors que l’eau, sous forme de glace, est située près des pôles. Il faut donc des canaux pour ramener l’eau vers l’équateur…

La tendance est d’aller retrouver ailleurs ce que l’on trouve chez nous.

En 1976, première mission exobiologique vers Mars avec les sondes Viking. Pas de détection de vie !

 

 

 

 

Un bel exemple de diversité dans le Système Solaire : les 4 satellites galiléens tous différents les uns des autres.

 

Une séquence de processus, synthétisant une variété d’ingrédients, mènerait à des formations génériques très diversifiées sur le chemin de l’évolution.

 

À partir d’une origine commune on parvient à une grande diversité des mondes.

À partir de l’universalité des lois on assiste à une généricité (structures, lois) des processus.

Par la diversité des formes prises, il apparaît une spécificité contingente de l’évolution.

 

On découvre de plus en plus de systèmes stellaires, mais ils sont tous différents et différents aussi de notre Système Solaire.

La plupart des planètes de type Jupiter observées dans d'autres systèmes solaires (les fameux Jupiters chauds) sont bien plus proches de leur Soleil que notre Jupiter.

 

 

 

 

D’où une explication sur la formation des planètes.

 

On part de l’effondrement d’un nuage.

 

1ère phase : les collisions

 

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Elles provoquent l’accrétion des cométésimaux et des planétésimaux.

 

La forme dominante solide est la glace dès que celle-ci est stable.

 

Les planètes géantes se forment à l’extérieur de la «ligne des glaces» car pour accréter du gaz il faut avoir un gros noyau et pour avoir un gros noyau il faut qu’il se forme vite, là où la glace est stable donc loin de l’endroit où se forme la protoétoile.

 

 

 

 

 

 

 

2ème phase : la migration planétaire

 

Cette histoire de migration est apparue avec la découverte des premières exoplanètes.

En 1995 Michel Mayor et Didier Queloz découvrent la première exoplanète. Celle-ci tourne autour de son étoile (51 Peg) en 4,23 jours terrestres ; sa masse est considérable 0,46 fois la masse de Jupiter (la plus grosse de notre système solaire).

Après coup on comprend facilement que pour bousculer son étoile il fallait une grosse planète proche.

Mais comment une planète aussi massive peut-elle se trouver si proche de son étoile ?

Cela ne ressemble en rien à notre système solaire

 

Les planètes géantes proches de leur étoile y ont migré.

On sait que les planètes géantes se forment loin de leur étoile et pourtant on en trouve à proximité.

On a récemment mis en évidence un phénomène de migration.

Cette migration a lieu lorsqu’une planète interagit avec le disque de gaz autour d’une étoile.

Quels sont les effets sur le matériau du disque et les propriétés des futures planètes internes ?

 

Jupiter et Saturne se sont formées en quelques millions d’années à partir d’un disque proto planétaire composé de gaz, de glace et de poussières principalement, elles se sont formées en fait loin du Soleil, là où il y avait suffisamment de matière (glace d’eau) à accréter.

Les géantes gazeuses Jupiter d’abord, puis plus tard Saturne, en absorbant le gaz (sa masse augmente et sa distance au Soleil diminue) et la glace, perd de son moment cinétique et se met à spiraler vers l’intérieur.

Elle migre vers l’intérieur vers une orbite approximativement où se trouve Mars actuellement.

 

 

En se déplaçant, Jupiter bouscule tout sur son passage et dégage l’espace (zone représentée en blanc).

 

Saturne subit le même genre de phénomène plus tard et se précipite aussi vers la partie centrale du système solaire.

 

Ces deux planètes compriment alors la matière proto planétaire près du Soleil menant à un anneau (ne dépassant pas 1UA), dont la matière va servir à faire grossir les planètes telluriques, sauf Mars, situé sur son bord externe (cela explique la petite taille de Mars).

 

Là se produit, à un moment une résonance (3/2) entre les orbites de Jupiter et de Saturne

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il n’y a aucun effet si cela se fait très vite.

Si le disque est essentiellement constitué de gaz, la planète va rentrer presque jusqu’au centre du disque et il ne se passera rien.

 

Mais si la planète met du temps, on commence à avoir dans le disque des planétésimaux de l’ordre du kilomètre.

 

Au fur et à mesure que la planète pénètre dans le disque, elle vide tout sur son passage.

 

L’accrétion ultérieure des planètes comme la Terre devient impossible jusqu’à vider complétement la cavité.

 

Si cela va jusque-là, on n’est plus là pour en parler.

 

La question est donc pourquoi sommes-nous là quand même ?

 

 

 

Est-ce que le fait que l’on soit là pour en parler est lié au fait que Jupiter et Saturne n’ont pas migré puisqu’on les voit très loin. Et si c’est le cas pourquoi n’ont-elles pas migré alors que les autres semblent migrer ?

 

La réponse est donnée par le « scénario de Nice ».

 

La migration est un processus très générique ; il a vraisemblablement également pris place dans le système solaire primordial, imposant « ses conditions initiales » à l’évolution ultérieures des mondes planétaires.

 

Cependant les formes planétaires prises, dues aux propriétés spécifiques du disque protoplanétaire (structure, composition…) ont conduit à un système solaire « unique ».

 

(Contingent : éventuel, qui peut ou ne pas arriver)

 

 

3e phase : L’accrétion planétaire

 

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Les protoplanètes internes, composées majoritairement de minéraux anhydres ont incorporé des grains riches en glace du système externe.

Mais l’évolution du disque interne (grains anhydres) n’aurait pas conduit à des objets suffisamment hydratés comme nos planètes internes.

 

L’accrétion des planètes ne s’est pas faite uniquement à partir de ce disque mais avec du matériau (comètes) qui vient du système externe. Des grains de glace se sont mélangés avec les grains anhydres du disque pour former les planètes telluriques.

Cette glace sera éventuellement la source de l’eau remontée en surface pour participer aux océans.

 

 

 

 

 

Tout ceci s’est déroulé en l’espace de quelques millions d’années.

 

 

 

 

4e phase : Des impacts géants

 

 

700 ou 800 millions d’années après se produira les impacts du grand bombardement tardif (LHB) qui façonnera presque définitivement le système solaire.

Il a joué un rôle fondamental pour la Terre en créant, à cause d’un impact géant (10.000°C !), la Lune qui a stabilisé l’obliquité de notre planète, de plus en faisant remonter le magma (imbibé d’eau) et en se refroidissant, a permis la formation des océans et des plaques tectoniques.

 

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Plus tard les comètes auraient pu apporter l’eau et les molécules organiques par exemple.

À la fin de la période des impacts géants, qui se mesure en dizaines de millions d’années, on obtient une cinquantaine d’embryons dans le système solaire et toutes les collisions vont se faire avec ces objets-là.

La taille de ces objets est de l’ordre de quelques milliers de kilomètres.

 

Pour l’essentiel ils ont presque tous disparus lors de chocs frontaux.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Terre a ainsi subi un choc géant qui a joué un rôle majeur et a formé la Lune ;

La Lune a ensuite eu un rôle critique sur l’évolution du climat de la Terre. C’est en effet la Lune qui stabilise l’obliquité de la Terre et permet de maintenir un climat pérenne sur des milliards d’années.

L’impact géant a effacé tout ce qu’il y avait d’antérieur, l’instant zéro de la recristallisation c’est maintenant celui-là.

 

Même quand est arrivé le «grand bombardement tardif» (Late Heavy Bombardement LHB), il n’y a qu’une fraction des océans qui a disparue. On est resté pour l’essentiel avec des océans stables.

 

 

 

 

 

Rosetta et Philae nous ont appris que la comète était principalement faite d’organiques et de glace et non pas le contraire comme on le pensait. Ce qui fait introduire la notion d’Organices (organics et ices) par JP Bibring.

 

 

 

 

En résumé :

 

Les planètes géantes nécessitent des noyaux massifs qui ont grossi rapidement afin d’accréter des atmosphères massives.

Cela impose que ces noyaux soient majoritairement formés de glace d’eau, qui ne peut rester dans cet état que loin de son étoile.

Les planètes géantes proches de leur étoile (comme on le remarque parmi les exoplanètes) y ont migré.

Lors de cette migration, il y a action sur le matériau du disque et donc sur les propriétés des futures planètes internes.

 

Une question essentielle : la vie a-t-elle émergée ailleurs que sur Terre ?

 

 

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN SUR CE SUJET :

 

Rosetta, Mars, des clés pour l’origine du vivant par Jean Pierre BIBRING, séminaire Académie des Sciences.

 

Le modèle de Nice chez Wikipedia.

 

Mission Rosetta : objectifs et contextes scientifiques par JP Bibring, superbe, tout est dit, à voir absolument !

 

La mission Rosetta/Philae : CR de la conférence IAP de JP Bibring du 3 Mars 2015

 

Le système solaire dans le cadre du programme Origine des planètes et de la vie Bruno Bézard LESIA, Observatoire de Paris

 

Formation des systèmes stellaires et planétaires conditions d’apparition de la vie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Bon ciel à tous !

 

 

Jean Pierre Martin . Commission de Cosmologie de la SAF.

www.planetastronomy.com

 

Les autres CR des conférences IAP.

 

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