Mise à jour 18 Février 2019
CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
« PRINCIPES. & APPLICATIONS. DE LA SPECTRO. DE FOURIER EN ASTRONOMIE :
DE SES ORIGINES À NOS JOURS »
Par Jean Pierre MAILLARD
Astrophysicien IAP
À TelecomParisTech 46 rue Barrault Paris 13.
Le Vendredi 8 Février 2019 à 19H00
Amphi Thévenin
Photos : JPM pour l'ambiance
(les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées
directement)
Les photos des slides sont de
la présentation de l'auteur. Voir
les crédits des autres photos et des animations.
La conférencière a eu la
gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur
ma liaison ftp et se nomme :
Maillard-SAF-hist-FTS.pdf qui se trouve dans le dossier
CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2018-2019.
Ceux qui n'ont pas les mots de
passe doivent me
contacter avant.
Cette conférence a été filmée
en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV, merci à Laurent Dongé) et est accessible
sur Internet
On la trouve à cette adresse
Un grand merci à Olivier
Laurent qui a rédigé ce compte rendu.
Jean Pierre Maillard, a passé
sa thèse sur le spectromètre à transformée de Fourier, puis est allé à Meudon et
ensuite pour 15 ans d’étude avec le CFHT à Hawaï.
Un an à Montréal puis retour à
Paris en 1986, pour de nombreuses missions au CFHT de nouveau.
Introduction par le
conférencier :
Les principes de la spectroscopie dite « par
transformation de Fourier » ont été établis en France au début des années 60
(thèse de Jeanine Connes). Ils s’inscrivent en prolongement direct des travaux
d’Albert Michelson à la fin du 19e siècle et l’interféromètre qui porte son nom.
Mais cette méthode de spectroscopie non
conventionnelle car non dispersive, n’a été redécouverte et pris son essor que
trois-quarts de siècle plus tard, grâce aux développements concomitants des
détecteurs photo-électriques, des moyens d’enregistrements des données, des
ordinateurs et au rôle de quelques pionniers. Ce nouveau type de spectromètre,
développé avant tout dans le domaine infrarouge, a pu être considéré dans les
années 70 comme le spectromètre idéal.
Les applications en astronomie, avec plusieurs
résultats marquants, de la composition de l’atmosphère des planètes au
rayonnement du fond cosmologique, ont largement contribué à sa généralisation.
Mais aujourd’hui, avec le développement des mosaïques de détecteurs de grand
format dans tous les domaines spectraux, particulièrement en astronomie, les
spectromètres à réseau ont pris l’avantage. La méthode de Fourier conserve
toutefois quelques niches spécifiques, comme dans le domaine de l’infrarouge
lointain spatial ou pour la spectroscopie intégrale de grands champs. Le
séminaire rendra compte de cette aventure scientifique débutée il y a plus de
130 ans et qui se poursuit de nos jours.
Plan de la présentation.
I. LES TRAVAUX D’ALBERT
MICHELSON :
•
1887 : l’expérience de Michelson – Morley
•
1892 : les premières mesures de spectroscopie interférentielle
II. ÉTABLISSEMENT DE LA
SPECTROSCOPIE DE FOURIER : 1950 – 1964
•
Le temps des pionniers
III. PREMIERS SPECTRES À HAUTE
RÉSOLUTION : 1965 – 1970
•
Correction de la turbulence atmosphérique
•
Premiers spectres planétaires
IV. DÉVELOPPEMENTS DES
SPECTROMÈTRES DE FOURIER (FTS) ASTRONOMIQUES APRÈS 1970 :
•
Le FTS : un spectromètre idéal
•
Un FTS pour le Télescope CFH : 1983 – 2001
•
Quelques spectres ayant fait date : 1976 - 1996
V. DÉCLIN DU FTS EN ASTRONOMIE
APRÈS ~1996
•
Le ``désavantage multiplex´´
VI. AVÈNEMENT DU FTS IMAGEUR :
1994, L’INSTRUMENT BEAR
CONCLUSION : les niches qui
demeurent en astronomie pour le FTS
La spectroscopie de Fourier est
une technique permettant de produire une décomposition spectrale de la lumière
en utilisant la technique mathématique de la transformée de Fourier.
Rappel d’un spectre en émission
et en absorption.
Deux raies peuvent être
séparées si l’écart entre les deux raies est supérieur à la largeur d’une raie.
Le pouvoir de résolution va
donc dépendre de la largeur d’une raie et plus la raie sera fine, meilleure sera
la résolution.
Le premier spectroscope a été
mis au point en 1814 par Fraunhofer (1787 – 1826) en utilisant un prisme et en
limitant l’entrée de la lumière du soleil à un seul endroit sur le prisme en
utilisant une fente (le flux lumineux diminue mais la dispersion est plus fine
et donne l’image de la raie déviée par le prisme en fonction des longueurs
d’onde).
En 1851, Fizeau développe un
interféromètre pour mettre en évidence une différence de vitesse de la lumière
traversant un courant d’eau se déplaçant dans le sens de la propagation et dans
le sens opposé.
Il constate un déplacement des
franges s’expliquant par ce que l’on nomme un entraînement partiel de l'éther
par le milieu.
La même expérience faite avec
un courant d’air d’entraîne aucun déplacement des raies.
Cette expérience ne sera
correctement expliquée qu'avec l'avènement de la théorie de la relativité
restreinte proposée par Albert Einstein en 1905, qui donne la loi correcte de
composition des vitesses relativistes.
Dans le dernier quart du XIXème
siècle, le réseau par réflexion composé de rayures réfléchissantes remplace le
prisme car il possède un pouvoir de résolution bien supérieur.
Les progrès de la photographie
permettent de faire également les premières photos de spectres.
A la même époque vers 1880,
Michelson reprend l’idée de Fizeau avec un interférentiel à deux bras
perpendiculaires pour mettre à jour le mouvement de la Terre par rapport à
l’éther luminifère dans lequel la lumière devrait se propager à la vitesse c.
|
|
|
Le centre devient sombre quand
l’un des miroirs est déplacé d’une demi-longueur d’onde (environ 0.25 microns
dans le jaune). Cette expérience permet ainsi de mesurer une longueur d’onde
d’une source monochromatique en comptant les franges tout en mesurant le
déplacement d’un des bras.
En 1881, Michelson utilise son
interféromètre réglé sans décalage des bras en faisant tourner l’appareil de 90
degrés pour mesurer la variation de la vitesse de la lumière entre les deux bras
qui vont dans des directions opposées par rapport à l’hypothèse hypothétique.
Mais, ils ne mesurent aucun
décalage des franges d’interférences.
Cette expérience va avoir une
influence sur l’élaboration de la relativité restreinte.
Par la suite, cet appareil va
permettre de mesurer les longueurs d’ondes d’une source de lumière en associant
l’interféromètre à un monochromateur (dans le cas présent un prisme permettant
de sélectionner une gamme étroite de longueurs d’onde).
L’appareil permet de :
-
Mesurer la
longueur d’onde en comptant le nombre de franges pour un déplacement connu du
miroir mobile.
-
Mesurer la
séparation des composantes d’une raie double en mesurant le double battement de
la figure lors du déplacement du miroir mobile.
Lorsque la distance de
déplacement augmente, le contraste des franges diminue pour finalement s’annuler
à la distance maximale de visibilité.
En 1892, Rayleigh détermine la
relation de transformation de Fourier qui existe entre le profil d’une raie et
sa courbe de visibilité et invente ainsi le spectromètre par transformé de
Fourier.
La courbe de visibilité décroit
plus vite quand le profil de la raie est plus élargi.
Un spectromètre par transformée
de Fourier ne décrit pas directement les raies d'un spectre, mais les fréquences
spatiales (en différence de marche en cm) qui transcrivent les raies dans un
interférogramme. Il réalise physiquement une opération équivalente à une
transformation de Fourier. L'interférogramme donne ensuite la mesure du spectre
(en nombre d’onde en cm^-1) par une transformation de Fourier inverse, calculée.
L’application du spectromètre
par transformée de Fourier ne s’est développée que dans les années 50.
Avec une seule cellule
infrarouge (PbS : 1 – 3,5 μm) et le spectromètre basé sur l’interféromètre de
Michelson, on peut fournir un spectre complet alors que le spectromètre
dispersif (monochromateur) n’observe qu’une seule longueur d’onde à la fois =
Avantage multiplex de l’interféromètre sur le monochromateur.
En 1954, l’ajout de cavités
Fabry-Pérot permet d’augmenter la luminosité de l’interféromètre.
En 1959, Jeanine Connes établit
la théorie complète et effectue le premier résultat expérimental en observant le
ciel dans l’infrarouge aà 1.6 microns avec une résolution de 900.
Après l’exploration des
domaines optiques et infrarouges proches, les observations se font dans les
domaines infrarouges lointains (125-300 microns) et sous-millimétriques (300
microns à 1 mm).
Deux techniques se sont
développées, motivées par
l’élimination de l’excès de bruit dans
les spectres astronomiques
dû à la scintillation
atmosphérique, l’une aux États-Unis (balayage rapide), l’autre en France
(modulation interne), qui ont déterminé les deux modes d’acquisition des
données.
La première conférence
Internationale sur la spectroscopie par transformée de Fourier à Aspen
(Colorado) le 16 – 20 mars 1970 montre que cette méthode est idéale de l’UV à IR
lointain
La conférence
d’Aspen a été un vrai point de lancement de cette méthode.
Les principaux FTS aux USA :
·
FTS
au sol
: à Kitt Peak :
1er FTS astro de P. Connes cédé au LPL (Steward)
H. Larson 1972
McMath
solar FTS (“Babar”) J.
Brault
1975
4-m
Mayall Telescope FTS D.
Hall, S. Ridgway 1979
·
FTS
espace
: IRIS sur les sondes Voyager I et II
R. Hanel
1979
·
FTS
avion
: sur le Kuiper Airborne Observatory H.
Larson, U. Fink 1980
Un FTS est installé au foyer IR
du Télescope CFH en 1980 (résolution 500 000 à 2 microns) de 0.9 à 5.4 microns
pour observer les molécules
…
|
|
Le FTS dans sa cuve à vide, pour le protéger, mais aussi permettre
une métrologie spectrale précise. |
Image infrarouge en bande K (2,2 μm) de la région active de
formation stellaire dans la nébuleuse d’Orion (10’x10’) , avec la
source jeune massive BN et la Nébuleuse KL |
Première observation
d’hydrogène moléculaire dans Orion.
C’est le début de l’étude de la
composition chimique des régions de formation stellaire.
La sonde
Voyager a son FTS infra rouge et fait des spectres en infrarouge de Jupiter.
Illustration : spectre obtenu
par
IRIS sur Voyager 1, à la rencontre de Jupiter en mars 1979. Principales
signatures : raies fondamentales S(0) et S(1) de H2 , élargies par l’abondance
du gaz et les collisions avec l’hélium , mesure de la concentration en hélium.
Observation de CH4, NH3, PH3 (phosphine), C2H2, C2H6.
De plus on détecte de la vapeur
d’eau dans la queue de la comète de Halley en 1986 à l’aide d’un FTS monté dans
le Kuiper Airborne Observatory.
En 1989, le
satellite COBE mesure le
spectre du
fond diffus cosmologique avec l’instrument FIRAS basé sur un FTS.
En 1990, c’est la première
détection hors laboratoire de l’ion
dans
les zones aurorales de Jupiter.
En 1996, Observation du Soleil
depuis l’espace avec un FTS à bord de la navette spatiale.
DÉCLIN DU FTS EN ASTRONOMIE ET AVÈNEMENT DU FTS IMAGEUR.
L’avantage multiplex du FTS
dans le domaine infrarouge venait de ce que l’on était dans des conditions :
bruit détecteur >> bruit de photons de la source.
L’amélioration des détecteurs
possédant moins de bruit détecteur fait perdre au FTS multiplex son avantage.
En 1990, les mosaïques de
détecteurs IR sont aussi couplées aux spectromètres à réseau.
Le FTS se combine à l’imagerie
pour devenir le FTS imageur pour faire de la spectroscopie intégrale de champ.
La première mise en œuvre a
lieu au CFHT en 1993.
CONCLUSION : LES NICHES QUI DEMEURENT EN ASTRONOMIE.
·
Le FTS imageur
pour la spectroscopie intégrale sur un grand champ dans tous les domaines
spectraux, comme :
o
L’instrument
SITELLE dans le visible au CFHT
·
Le FTS pour
l’IR lointain là où les réseaux ne peuvent pas fonctionner comme :
o
SPIRE
sur le télescope spatial Herschel
o
SCUBA sur le télescope JCMT à Hawaï
o
PRISTINE projet pour télescope
spatial pour le CMB, refusé pour le moment par l’ESA.
Spectre de la nébuleuse d’Orion
par SPIRE le spectro à transformée de Fourier de Herschel.
Spectre obtenu en un point de
la Nébuleuse d'Orion.
Tous les spectres FTS présentes
deux grandes caractéristiques : une émission continue forte, due à des gros
grains de poussières froides qui ont absorbé le rayonnement ultraviolet émis par
les étoiles et le réémette dans le domaine infrarouge et une série de raies, en
émission et/ou en absorption qui sont dues au gaz.
Dans l’encadré image par le
télescope IR Spitzer.
POUR ALLER PLUS
LOIN :
Vidéo d’une conférence similaire donnée à
l’IAP.
Le FTS de Herschel-SPIRE et ses
potentialités scientifiques présentation
High
resolution near-infrared spectro-imaging of NGC 7027 De JP Maillard et al
La spectroscopie à transformée de
Fourier Le FTS de Herschel-SPIRE et ses potentialités scientifiques Kjetil
Dohlen.
Le spectromètre à transformée de Fourier (FTS) à bord de Herschel
Prochaine conférence mensuelle de la SAF à TeleComParistech :
Vendredi 8 Mars 2019
19H00
CONFÉRENCE de Jean Pierre MARTIN
Physicien membre de la SAF
SUR «
IL Y A 50 ANS : LA CONQUÊTE LUNAIRE.
COMMENT TOUT CELA A COMMENCÉ ? »
Réservation à partir du 9 Février 2019
Entrée
libre mais
réservation
obligatoire. (Vigipirate)
Bon ciel à tous
Jean Pierre
Martin Président
de la commission de cosmologie de la SAF
Abonnez-vous gratuitement aux astronews
du site en envoyant votre nom et
e-mail.