Mise à jour 16 Janvier 2019
CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF
« L’EXOBIOLOGIE : OÙ ET COMMENT CHERCHER LA VIE
DANS LE SYSTÈME SOLAIRE ? »
Par le Dr Caroline FREISSINET
Astrobiologiste au LATMOS
À TelecomParisTech 46 rue Barrault Paris 13.
Le Vendredi 11 Janvier 2019 à 19H00
Amphi Thévenin
Photos : JPM pour l'ambiance
(les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées
directement)
Les photos des slides sont de
la présentation de l'auteur. Voir
les crédits des autres photos et des animations.
La conférencière a eu la
gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur
ma liaison ftp et se nomme :
SAF-Exobio-janv2019-Freissinet.pdf qui se trouve dans le dossier
CONF-MENSUELLES-SAF/ saison 2018-2019.
Ceux qui n'ont pas les mots de
passe doivent me
contacter avant.
Cette conférence a été filmée
en vidéo (grâce à UNICNAM et IDF TV, merci à Laurent Dongé) et est accessible
sur Internet
On la trouve à cette adresse
https://www.youtube.com/playlist?list=PL1ZHG2CIuv2ePfZJVcArU3cgytCDhHPKN
«
J’aimerais, grâce à mon parcours de biologiste, amener plus de biologie en
astrochimie et conceptualiser plus de projets pour trouver des traces de vie per
se, et pas seulement des traces de molécules ou biomarqueurs»
C’est ainsi que Caroline
Freissinet se présente sur
sa page présentant son cursus.
Biologie à l’ENS Lyon, puis
Paris XI Orsay Master 2 en biologie de l’évolution.
Stage de 10 mois en Nouvelle
Zélande, puis
thèse de doctorat à
Centrale consacrée à Exomars 2020. Postdoc de 6 ans au GSFC dans le Maryland,
une référence ; avant d’entrer au
LATMOS (Laboratoire Atmosphères, Milieux, Observations Spatiales) à
St Quentin en Yvelines.
Bref sans être trop familier :
une grosse tête !!!
Chercher la vie, c’est d’abord
comprendre la vie sur Terre.
On voit
sur ce dessin les différentes étapes qui ont mené à l’apparition de
la vie.
L’échelle géologique des
différents évènements y est représentée.
Et il semble bien qu’un
évènement ait eu une importance capitale : le
grand bombardement
tardif (LHB pour Late Heavy Bombardment en anglais).
Il s'est passé un événement
cataclysmique vers les 3,9 Milliards d’années (3,9 Ga), qui a effacé toutes
traces des anciennes roches (la Lune date comme la Terre de 4,5 Ga).
Qu'est ce qui a pu causer une
telle débauche de bombardement météoritique au moins dans cette partie du
système solaire interne ?
Il y a eu un pic de
bombardement de matière que l'on voit très bien sur cette courbe. Ce pic se
situe vers les 3,9Ga
C'est un événement global qui a
duré de 50 à 150 millions d'années. Le taux de bombardement cosmique (un impact
d'un corps de 1km tous les 20 ans pour la Terre) devait être près de 20.000 fois
plus important que le taux actuel.
Avant ce bombardement le
système solaire était DIFFÉRENT.
Ceci n'est possible que si un
changement dans la structure orbitale des planètes géantes s'est produit ; un
réservoir de petits corps (restes de la formation du Système solaire) est devenu
alors instable.
C’est le fameux
modèle de Nice mis au point par A Morbidelli et ses collègues de
l’OCA.
L’exobiologie c’est l’étude des
origines, de la distribution et de l’évolution des structures moléculaires et
des processus liés à l’apparition de la vie.
Comment passe-t-on des
molécules simples aux molécules prébiotiques et enfin aux molécules biologiques
complexes.
Comment peut-on rechercher les
traces de vie, les biosignatures ?
Ensuite, comprendre le
phénomène d’habitabilité, quelles sont les conditions nécessaires à la vie ?
Étudier le contexte du lieu,
préservation géologique des traces d’une vie passée.
LE
CAS DE LA PLANÈTE MARS.
Mars est très oxydante, c’est
ce qui a faussé les interprétations des sondes Viking des années 1976.
Curiosity a pris la suite pour
étudier les traces d’eau et l’habitabilité.
C’était un gros rovers (900kg)
avec près de 10% de sa masse en instruments scientifiques (notamment français
SAM et ChemCam). Il s’est posé dans le cratère Gale datant de 3,5 milliards
d’années (Ga) approx, datation isotopique.
Il a parcouru 20 km depuis son
arrivée en Aout 2012.
Évolution comparée de Mars (en
haut) et de la Terre.
L’instrument SAM (Sample
Analysis at Mars) a procédé à de nombreuses analyses de forages martiens
effectués par Curiosity.
Et notamment au site appelé
Cumberland.
On s’aperçoit que pour la
plupart des forages, la poudre est grise, c’est-à-dire
non oxydée, c’est
bon signe, l’oxydation n’a pas atteint la sub surface.
On est sur un terrain
d’argiles, on sait que ce sont les meilleurs pour la préservation des
organiques.
On a détecté les premières
molécules organiques martiennes contenant aussi du Cl et S dans ce site.
On peut voir sur cette image le
genre de spectre
obtenu grâce à SAM.
Mais le signal que l’on obtient
réellement n’est pas aussi beau comme nous le montre Caroline Freissinet avec
cette slide.
Ce sont les données brutes avec
lesquelles il va falloir travailler.
Les dernières mesures indiquent
que Gale Crater était dans le passé un lac d’eau douce et que cette région de
Mars était habitable (vers 3,8 Ga).
Où est Curiosity ? On le voit
sur cette photo NASA.
Où est Curiosity par rapport à
son parcours vers le sommet du Mont Sharp.
On le voit sur le graphique
ci-joint.
En hauteur il a parcouru (à ce
jour fin 2018) approx 370 m, il a encore du chemin à faire !
Il en est à la zone d’hématite
avant d’attaquer les argiles.
Comme on le voit
sur ce panorama.
Mais comme le signale Carole
Freissinet, l’analyse sur le terrain est une partie essentielle de son activité
comme on le voit
sur cette photo lors d’une expédition au Spitzberg pour collecte
d’échantillons « martiens ».
On cherche justement sur Terre
des analogues martiens.
On en trouve dans :
·
Les météorites
de type Murchison et
·
Dans le désert
d’Atacama ou
·
À Hawaï dans
certains terrains particulièrement arides (JSC
Mars 1 regolith) ou
·
Dans le
Spitzberg (Svalbard)
LE
CAS DE LA PLANÈTE JUPITER.
Planète géante possédant plus
de 60 lunes.
Certaines d’entre elles sont
particulièrement intéressantes.
La surface de ce satellite de
Jupiter est jeune (absence de cratères) donc en perpétuelle évolution. -220°C!
Ressemble à des icebergs ou à
une banquise. Crevasses causées par les forces de marée
Émission de
geysers au-dessus d’une grande faille (zone chaude), l’océan se
répand en surface.
Couche de glace de quelques
dizaines de km située à 3 km de profondeur
On a détecté un léger champ
magnétique signifiant probablement un océan interne salé de plusieurs centaines
de km d’épaisseur (plus d’eau que les océans terrestres !)
La bulle bleue représente la
proportion d’eau par rapport à Europe et la Terre !
Source de chaleur interne :
force de marée : cheminées hydrothermales ?
Récemment : découverte de
molécules organiques simples à sa surface
Y aurait-il des niches
« habitables » là où l’eau chaude remonte ? En tous cas, certainement une chimie
très complexe.
Plusieurs missions vers Europe
sont prévues : Europa Clipper (NASA) et Juice (ESA)
La mission Europa Clipper de la
NASA s’intéresserait particulièrement à l’étude de la surface d’Europe et de son
océan.
Le LATMOS devrait y participer.
LE
CAS DE LA PLANÈTE SATURNE.
Saturne est aussi une planète
géante possédant au moins une soixantaine de satellites.
Parmi ceux-ci deux sont
intéressants : Encelade et Titan.
Concernant Encelade :
C’est la sonde Cassini qui a
mis au jour un phénomène extraordinaire à propos de ce satellite de Saturne
(500km) :
Son pôle Sud possède des
rayures (griffures du Tigre!) qui émettent des geysers d’eau salée contenant
aussi des organiques et de la Silice.
Ces zones sont aussi beaucoup
plus chaudes (-80°C) qu’aux alentours (-120°C), pourquoi?
Il y aurait
une énergie interne due aux forces de marée (friction) qui
favoriserait l’eau liquide et expulserait des geysers par un phénomène similaire
à ce que l’on observe sur Terre.
La cause de cette chaleur
interne :
Les forces de marée qui
déforment les satellites trop proches comme un ballon de rugby.
Cela provoque un échauffement
interne : transformation de l’énergie mécanique en chaleur !
Y aurait-il aussi des cheminées
hydrothermales ? On le pense.
Cet océan d’eau salée, riche en
H, semble potentiellement habitable.
La couche de glace aurait
plusieurs km d’épaisseur.
Le cas
Titan.
Titan est un corps rocheux
glacé possédant une atmosphère d’Azote ainsi qu’une
chimie organique complexe.
Titan possède aussi des lacs de
méthane, des cryovolcans ; c’est un monde similaire à la Terre, où le méthane
remplace l’eau et la glace les roches.
Titan contiendrait une couche
d’eau liquide entre deux couches de glace comme
on le voit ici.
Il existe un projet de la NASA
(non encore totalement financé) pour explorer Titan :
Dragonfly (Libellule en
français)
C’est un projet révolutionnaire
mené par le Dr
Elizabeth Turtle du JHUAPL.
Signalons que Caroline
Freissinet fait partie
de l’équipe.
Comme
Titan possède une atmosphère épaisse (1,5 bar, un peu plus que sur Terre) et une
gravité plus faible (1/7), c’est l’idéal pour un corps plus lourd que l’air
genre drone ou hélicoptère.
C’est une sorte
de drone
qui peut voler
de
site en site.
On pense pouvoir explorer ainsi
une zone de plusieurs centaines de km de Titan.
Son énergie électrique ne peut
être fournie à cette distance là du Soleil que par un générateur isotopique.
Planning prévisionnel :
lancement 2025, arrivée Titan 2034, durée nominale mission sur Titan : 2 ans.
Illustration : JHUAPL
Dragonfly sera équipé de
nombreux instruments, comme :
·
DraMS
(Dragonfly mass spectrometer) spectro de masse
·
GCMS (Gas
Chromatography Mass Spectrometry) nature et origines des organiques
·
LDMS (Laser
Desorption Mass Spectrometry) nature et origines des organiques
·
DraGNS
(Dragonfly Gamma-Ray and Neutron Spectrometer) spectro gamma et neutrons
·
DraCO (Drill
for Acquisition of Complex Organics) échantillonnage de la surface (forage)
CONCLUSION :
54 ans d’exploration spatiale
Et ça continue !!
Nombreuses questions auxquelles
notre conférencière a répondu.
On voit ici notre ami Xavier de
la SAF en plein action, le micro lui avait été tendu par Jean Claude.
POUR ALLER PLUS
LOIN :
Nos origines et la vie dans l’Univers :
CR de la conf.
SAF
d’André Brahic du 12 juin 2013
Curiosity update, sols 2027-2092: Return to drilling at Duluth, sciencing the
dust storm
Planetary Science Division Status Report
par James Green NASA
Exploration de Mars par Curiosity
Hunting for Martians on Svalbard
Expédition avec C Freissinet
Evaluation of the Tenax trap in the Sample Analysis at Mars instrument suite on
the Curiosity rover
as a potential hydrocarbon source for chlorinated organics detected in Gale
Crater par Freissinet et al
Evolved gas analyses of sedimentary rocks and eolian sediment in Gale Crater,
Mars: Results of the Curiosity rover's sample analysis at Mars instrument from
Yellowknife Bay to the Namib Dune par Freissinet et al
Organic molecules in the Sheepbed Mudstone, Gale Crater, Mars
par Freissinet et al
Dragonfly: A Rotorcraft Lander Concept for Scientific Exploration at Titan
fiche technique de la sonde.
Prochaine conférence mensuelle de la SAF à TeleComParistech :
Vendredi 8 Février 2019
19H00
CONFÉRENCE de Jean Pierre MAILLARD
Astrophysicien IAP
SUR «
PRINCIPES. & APPLICATIONS. DE LA SPECTROSCOPIE. DE FOURIER
EN ASTRONOMIE : DE SES ORIGINES À NOS JOURS. »
Réservation à partir du 12 Janvier 2019
Entrée
libre mais
réservation
obligatoire. (Vigipirate)
Bon ciel à tous
Jean Pierre
Martin Président
de la commission de cosmologie de la SAF
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