Mise à jour 19 Avril 2022.
CONFÉRENCE MENSUELLE
DE LA SAF
De Christophe BONNAL
Direction des
lanceurs du CNES
Président du
Comité Débris Orbitaux de l’IAA et de l’IAF
LES DÉBRIS SPATIAUX : PROBLÈMES ET SOLUTIONS
Organisée par la
SAF
En présence du
public et en vidéo (direct) sur canal YouTube SAF
Le Mercredi 13 Avril
2022 à 19H00
Photos : JPM pour l'ambiance. (Les photos avec plus de résolution
peuvent m'être
demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur. Voir
les crédits des autres photos si nécessaire
La présentation est disponible sur
ma liaison ftp , rentrer le mot de passe, puis CONFÉRENCES SAF ensuite
SAISON 2021/2022 ; elle s’appelle : SAF Bonnal
130422.pdf . Elle est en pdf car la version ppt est très lourde, mais les
animations vidéo sont pour la plupart récupérées et dans le texte qui suit.
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me
contacter avant.
La vidéo de la réunion est accessible : https://youtu.be/tUchW1auUGg
En plus des spectateurs de l’amphi, nous étions 88 sur
YouTube.
Tous les autres enregistrements sont accessibles sur la
chaine
YouTube SAF.
Christophe Bonnal du CNES (à gauche sur la photo) pose avec votre
serviteur avant le démarrage de cette conférence.
Christophe, que les lecteurs de l’Astronomie, la revue de la SAF,
connaissent bien, je l’avais interviewé pour le numéro de Septembre 2017.
Christophe est un expert mondialement reconnu sur les débris
spatiaux, leur prolifération, leur danger et la façon dont on pourrait s’en
débarrasser en partie, si tous les pays y mettaient du leur.
Il nous propose de faire le point ce soir sur cette
problématique.
Il
nous a aussi ramené des objets tombés de l’espace qu’il met à notre disposition
que l’on voit sur cette table, le gros morceau de couleur noire est une partie
d’une fusée Soyuz tombée en France.
Les autres seront expliqués plus loin dans le texte.
Les débris spatiaux (space junk en anglais) ont commencé à
polluer l’espace en 1957 avec le lancement du premier satellite Sputnik par les
Soviétiques. Il est retombé sur Terre au bout de trois mois, mais certaines
parties du lanceur sont restés en orbite plus longtemps
Définition : Un débris spatial est un objet orbital artificiel
non fonctionnel.
ÉTAT DES
LIEUX.
Nombre
d’objets supérieurs à 10 cm en orbite : 34.000 (en 2022).
5600 sont des satellites actifs, 3300 en orbite basse (LEO < 2000
km) et 560 en géostationnaire (GEO).
Concernant les petits débris, on estime à 900.000 ceux de plus de
1 cm et 130 millions ceux supérieurs à 1 mm !
Tous ces débris couvrant une masse totale en orbite de 9000
tonnes.
Il est intéressant de noter où se trouvent ces
débris/satellites/corps de fusées ?
Ils
sont positionnés dans l’espace en fonction de leur site de lancement par rapport
à la Terre.
Ce graphique est très intéressant, il faut le lire comme suit :
en horizontal l’altitude des objets, en vertical, l’inclinaison par rapport à la
Terre. Les groupes LEO orbite basse, GEO stationnaire et autour de 20.000 km les
GPS.
On reconnait aussi des groupes de points horizontaux dépendant
des sites de lancement, par exemple :
·
5° : la base de Kourou, presque à l’équateur
·
28 : la base de Cape Canaveral aux USA
·
45° : la base de Baïkonour ex-URSS
Il est à noter que la population orbitale augmente d’année en
année.
Actuellement on note une moyenne de plus de 100 vols orbitaux
satellitaires par an.
On voit ici le nombre d’objets en orbite terrestre par type.
La courbe marron correspond au nombre total d’objets.
Les discontinuités proviennent de chocs ou de tirs de destruction
depuis la Terre.
Par exemple, celle de 2007 correspond au choc Iridium 33 Cosmos
2251.
Crédit : NASA ODPO
Parmi tous ces objets, 97,5% appartiennent aux USA, à la Russie
et à la Chine en orbite basse.
GÊNE
VIS-À-VIS DES OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES.
Comme le dit C Bonnal : trop d’objets orbitaux (actifs ou
passifs) tuent l’observation.
Mais le bouquet, cela a été le lancement des grappes de Starlink,
qui traversent le ciel en se suivant.
Suite à diverses plaintes, on a pu diminuer leur luminosité en
changeant l’orientation, ou en les peignant différemment.
Voici un exemple de passage de Starlink sur cette vidéo.
RISQUES À
LA RENTRÉE ATMOSPHÉRIQUE ET AUTRES.
Bien entendu les objets en LEO vont tomber un jour ou l’autre,
car l’atmosphère même ténue, freine ces objets et fait diminuer leurs orbites.
En moyenne des objets de plus de 10 cm, il en tombe plus de 400 par an.
Mais des gros objets, il en tombe en moyenne un tous les 3 ans.
La plupart brûlent dans l’atmosphère, mais les très gros non !
Ici on voit un morceau d’un réservoir de fusée ayant atterri au
Texas.
Crédit : NASA.
Il existe de nombreuses photos de débris spatiaux ayant atteint
la Terre.
Il est très
difficile de prédire le point de chute sur Terre, on a une idée
approximative de la position seulement un jour avant et cela détermine une zone
de 2000 km.
Voici un exemple de rentrée, un cargo de ravitaillement ATV de
l’ISS qui brûle en arrivant dans les couches denses.
Mais il existe aussi d’autres risques : les collisions entre
satellites par exemple ou les collisions d’un débris avec un satellite ou une
station spatiale.
L’énergie dégagée à l’impact peut être très élevée, cela va
dépendre de la vitesse relative entre les deux objets.
La plupart tournent autour de la Terre avec la première vitesse
cosmique : 7,8 km/s (26.000 km/h), si deux objets s’impactent alors qu’ils
tournent en opposition l’un par rapport à l’autre la vitesse de la collision
peut atteindre 15 km/s !!!
C’est ce qui s’est passé lors de la collision du satellite
Iridium 33 avec le satellite russe Cosmos 2851.
On peut voir une animation de ce choc sur cette vidéo.
Des petits débris peuvent aussi impacter le corps de l’ISS ou ses
panneaux solaires. Ils ne sont pas dangereux.
Les modules américains sont constitués de feuilles d’aluminium de
quelques mm, montées extérieurement et à 10 cm de distance de la coque de l’ISS.
L’inter espace rempli avec des matériaux absorbants multicouches comme du Kevlar
pour augmenter l’efficacité.
Certaines parties, les plus importantes, les modules habités,
sont équipées extérieurement de plaques d’alu plus épaisses.
On remarque sur cette photo (crédit NASA) un micro-débris qui a
impacté une des fenêtres de la fameuse Coupole d’observation de la Terre.
Les plus gros débris ont droit à une manœuvre d’évitement de
l’ISS (4 fois par an en moyenne).
Signalons qu’il y a des millions d’alertes collisions tous les
jours !
LE
SYNDROME DE KESSLER.
L’orbite basse possédant un très grand nombre d’objet peut donner
lieu à un phénomène de
collision en chaîne. C’est ce que l’on a appelé le syndrome de Kessler en
hommage à Donald Kessler qui s’est rendu compte que ces réactions en chaîne
pouvaient polluer toute une zone orbitale. Cette zone se situerait entre 700 et
1100 km.
La plupart des lancements évitent de satelliser des objets dans
cette zone.
Nombre d’objets catalogués en fonction de l’altitude.
Vertical : altitude de 0 à 400 km, de 20 en 50.
Horizontal : nombre de 200 à 2000 de 25 en 25.
Vers 850 km (cercle ovale) zone de Kessler de fortes collisions.
LA
RÈGLEMENTATION.
Des réglementations ont été émises dans plusieurs pays et
certaines même à l’échelle internationale, mais il faut bien dire qu’elles ne
sont pas partout respectées.
En principe on doit :
·
Ne pas provoquer volontairement de débris
·
Respecter les zones LEO et GEO le plus possible
·
Désorbiter en fin de mission
·
Etc…
De nombreux standard à respecter existent, mais…
Seule la France possède une loi spécifique, la
loi sur les opérations spatiales LOS.
Création à l’ONU du Comité des utilisations pacifiques de
l'espace extra-atmosphérique (UNCOPUOS).
COMMENT
SE PROTÉGER.
·
Blindage contre les débris.
Par exemple introduire des blindages devant les parties
sensibles, un sandwich multicouche étant meilleur qu’une simple plaque
métallique plus épaisse.
Généralement on combine de l’alu, du vide et du Kevlar. C’est
efficace pour des débris de l’ordre du cm. Mais pour des débris de l’ordre de 10
cm c’est beaucoup plus problématique.
Exemple de l’ISS
(partie US de la station)
·
Éviter les collisions, si
possible.
Grâce à des manœuvres d’évitement par exemple
Réception de messages d’alerte émis par les centres de suivis au
sol.
Il existe de très nombreux réseaux de suivi des objets en orbite.
1.
SSN :
Space Surveillance Network
2.
SST réseau de
surveillance du CNES
3.
Share my Space,
organisme privé..
4.
Et de nombreux autres organismes
·
Actions locales dans
l’espace.
Il faudrait pouvoir retirer une dizaine de gros débris de
l’espace LEO tous les ans pour limiter la prolifération.
On pense à des solutions comme :
·
Bras robotisés
·
Harpons
·
Filet
·
Câble
·
Pousseur gravitationnel
Mais il y a de plus en plus de tout petits satellites style
CubeSat qui ne sont pas manœuvrables et souvent difficiles à localier.
Il y a aussi de plus en plus de constellation de satellites ce
qui ne simplifie pas les choses.
Alors en conclusion, il faut vraiment prendre conscience du
phénomène !!!
À la fin de son exposé C Bonnal nous présente des objets ramenés
de l’espace ainsi qu’un test d’impact :
|
|
Un morceau d’un panneau solaire de Hubble ramené sur
Terre, on voit sur la face arrière l’impact d’un micro-débris |
Résultat d’un impact haute vélocité (6,5 km/s) sur
une plaque d’Alu de 13 mm par la bille de 3 mm de diamètre marquée
d’une flèche. |
Longue discussion avec
le public à la fin de la conférence.
POUR ALLER PLUS LOIN :
NASA orbital
debris program office
Kessler Syndrome and the
space debris problem
Débris
spatial chez Wikipedia, très complet
Loi no 2008-518 du 3 juin 2008 relative aux opérations spatiales
Space environment
characterisation of Kevlar® : good for bullets, debris and radiation too
Bon ciel à tous
Prochaine conférence SAF
devant public :
Le mercredi 11 Mai 2022 à 19H00 au CNAM amphi Grégoire (220 places).
« La mission ExoMars,
recherche de vie sur Mars, évolution dans le contexte actuel »
Par André DEBUS du CNES
Résa > 14 Avril
. Réservation
comme d’habitude ou
à la SAF directement.
Transmission en direct
sur le canal YouTube de la SAF
Sinon à suivre en
direct :
https://youtu.be/dEYzUxHXLIg
Jean Pierre
Martin
Abonnez-vous aux astronews du site en envoyant votre e-mail.