Mise à jour 21 Novembre 2024.
CONFÉRENCE MENSUELLE
De Valéry LAINEY astronome IMCCE
« PHÉNOMÈNES DE MARÉES DANS LE SYSTÈME
DE SATURNE »
Organisée par la SAF
En présence du public et en vidéo (direct) sur canal YouTube SAF
Le Mercredi 13 Novembre 2024 à 19H00
Photos : TM et JPM, pour l'ambiance. (Les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur. Voir les crédits des
autres photos si nécessaire
La présentation est disponible sur
ma liaison ftp ,
Rentrer le mot de passe, puis aller à CONFÉRENCES SAF ensuite SAISON 2024/2025 ;
Elle s’appelle : Lainey-SAF-2024.pptx
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent aussi me
contacter avant..
La vidéo de la réunion est accessible à cet URL :
https://youtu.be/iUjIZFbWZeo?list=PL78ug7UrzPF1w8Tv32bQsZtE1Q5Tz7nBP
Tous les autres enregistrements des conférences mensuelles sont accessibles sur
la playlist des conférences mensuelles
d’Astronomie de notre chaine YouTube SAF.
Nous étions approx 90 dans la salle et 82 à distance. YouTube était excellent en
son cette fois-ci, merci Laurent.
Valéry Lainey est astronome à l’IMCCE, l’institut de Mécanique Céleste et de
Calcul des Éphémérides qui dépend de l’Observatoire de paris.
Sa spécialité : la dynamique des satellites du système solaire notamment.
Il nous parle ce soir des effets de marée dans le système solaire et notamment
dans le système de Saturne.
Voici son intro :
« Phénomène bien connu sur la Terre, les marées sont présentes dans l’ensemble
du système solaire. Particulièrement actives dans les systèmes de satellites
naturels, elles sont responsables de nombreux phénomènes géophysiques comme
l’intense volcanisme sur Io et la présence d’un océan global sous la couche
glacée d’Europe, deux satellites de Jupiter.
De plus, les effets de marées gouvernent bien souvent l’évolution orbitale à
long terme de ces objets célestes. Autant dire qu’une bonne compréhension de ces
effets s’avère indispensable pour envisager l’évolution passée et à venir de
nombreux satellites naturels, souvent considérés comme des systèmes solaires en
miniature.
Durant cette conférence, Valéry Lainey présente le principe général des effets
de marées, en s'attardant plus particulièrement sur le système de Saturne, pour
lequel les recherches récentes ont amené à devoir réviser la compréhension de la
formation et l’évolution de celui-ci. »
Plan de la présentation :
1- Les effets de marées - principe physique et exemples dans le système solaire
2- Effets de marées et dynamique
3- Le système de Saturne
4- La découverte d’un océan global sous la surface du satellite Mimas
EFFETS DE MARÉE PRINCIPES.
On a représenté à droite une planète (par ex Jupiter) et à gauche une de ses
lunes (par ex Io).
La force de gravitation s’exerce entre ces deux corps et elle est
proportionnelle à 1/d2
Les points les plus proches de la lune sont (un peu) plus attirés que les points
les plus éloignés, il existe donc
un différentiel d’attraction
gravitationnelle. (bourrelets de marée)
Il va donc se produire une déformation (qui va dépendre de la grandeur de la
distance entre les deux corps) de cette lune.
Mais cette déformation va produire des frictions internes et en conséquence de
la chaleur. Pensez à la balle en caoutchouc que vous malaxée entre vos mains :
elle chauffe, transforme ainsi de l’énergie mécanique en chaleur !
Crédit : NASA/JPL
Ces phénomènes d’effets de marée sont très actifs principalement pour les
satellites galiléens de Jupiter.
C’est cette chaleur qui va pouvoir produire par exemple du volcanisme (Io) ou
faire fondre de la glace (océans internes d’Europe de Ganymède et peut-être de
Callisto) etc…
On retrouve ces phénomènes aussi autour de Saturne (Encelade par exemple).
Disgression du rédacteur de l’article : notre Lune subit et fait subir à la
Terre des effets de marée.
La Lune et la Terre tournent autour d’un point commun
Cela crée un effet « ballon de rugby » sur la Terre : le bourrelet équatorial
La Terre est inclinée de 23°27’ sur son plan orbital (cela donne naissance aux
saisons) mais cet axe décrit un cône dans l’espace de période 26.000 ans, c’est
la précession des équinoxes
Ce phénomène est justement causé par ce bourrelet équatorial qui exerce un
« couple de rappel » sur l’axe de rotation de la terre (toupie).
Il y a deux marées par jour, car la résultante des forces Gravitationnelles et
centrifuges est toujours dirigée vers l’extérieur.
Par effet de marées, les océans font des va-et-vient permanents, il y a friction
dans la rotation de la Terre ; la lune s’éloigne
Et la terre ralentit
La Terre ralentit de 2/1000 sec par siècle la Lune s’éloigne de 4 m par siècle
EFFETS DE MARÉES ET DYNAMIQUE
Maintenant rentrons un peu plus dans les détails.
Les bourrelets de marée ne sont pas dirigés vers la planète forcément, ils sont
en avance ou en retard, dus à la friction interne.
Deux cas sont possibles :
a)
La lune tourne sur elle-même plus vite qu’autour de la planète (image
supérieure), dans ce cas, il y a un temps de retard des bourrelets de marée,
ceux-ci vont être décalés légèrement en avance, il se produit
un couple de rappel
sur la planète afin d’aligner le
bourrelet dans la direction du satellite.
En conséquence la planète va freiner la rotation du satellite.
b)
La lune tourne moins vite sur elle-même qu’autour de la planète (image
inférieure), les bourrelets de marée vont être décalés dans l’autre sens et
induire une accélération de la lune.
Le couple de rappel agit ici dans l’autre sens.
Comme on le remarque, au bout d’un certain temps, une situation d’équilibre se
produit où la lune tourne sur elle-même à la même vitesse que la planète. Elle
est synchrone
(verrouillage gravitationnel ou en résonance) et présente toujours la même face
vers sa planète.
C’est ce que l’on observe pour notre Lune et pour la plupart des lunes du
système solaire.
Par exemple Jupiter et les 4 grosses lunes galiléennes et ses lunes intérieures,
ou Saturne et la plupart de ses lunes.
De même pour Uranus et le cas de Pluton/Charon où ces deux objets présentent la
même face l’un à l’autre.
Il faut à peu près quelques dizaines de millions d’années pour qu’une lune
devienne synchrone.
Après avoir vu et compris le synchronisme entre planète et satellite, quelles
sont les autres influences possibles sur les orbites ?
Étudions ces possibilités basées sur deux cas particuliers :
1)
La Lune : la Terre tourne sur elle-même beaucoup plus vite que la Lune ne tourne
autour de la Terre, ce qui a fait qu’elle présente la même face comme dit plus
haut. Mais ce n’est pas tout, la Lune donc va ralentir la rotation terrestre
(voir plus haut) et par application du principe de la
conservation du moment cinétique (une des
lois fondamentales de la physique) de l’ensemble Terre-Lune, la Lune s’éloigne
de la Terre. (si choquant pour vous : pensez à la patineuse sur la glace !)
2)
Phobos : ce mini satellite de Mars tourne plus vite autour de la planète (8h)
que la planète ne tourne sur elle-même (24h). la rotation de Mars tend à
s’accélérer et Phobos se rapproche de Mars. Il va s’écraser sur la planète rouge
en moins de 50 millions d’années. Phobos est en dessous de la
limite de Roche.
Autres exemples : les planètes géantes gazeuses. Elles sont aussi, sensibles aux effets de marée, mais quelle serait alors la friction interne ?
Avec un gaz est-ce plus faible ? En fait, on a pu mesurer cette friction dans
Saturne et surprise, elle est énorme !
LE SYSTÈME DE SATURNE.
Deuxième planète la plus massive du système solaire, noyau de roches,
essentiellement gazeuse (Hydrogène).
Anneaux somptueux et très visibles. Composés à 98% de glace d’eau, particules
centimétriques épaisseur anneau de l’ordre de 10 m.
Saturne possède plus de 140 lunes très diverses et classées par familles :
·
Lunes intérieures de forme plutôt patatoïde
·
Lunes principales, les plus grosses
·
Lunes extérieures probablement toutes capturées.
Illustration : Crédit : NASA/JPL/Caltech.
Toutes les photos et informations sur Saturne et la sonde Cassini sont dans
cette archive du site.
Plus intéressant : Encelade 250 km de rayon, possède
une surface dont une partie est cratérisée
et l’autre plus lisse (vers l’hémisphère Sud), due à un resurfaçage, lui-même du
à
l’échappement de geysers de glace. Signe de
la présence d’un océan d’eau liquide sous la couche de glace, due aux effets de
marée.
Titan, le plus gros satellite de Saturne présente la particularité d’avoir un
cycle de méthane (au lieu d’un cycle de l’eau comme sur Terre), une atmosphère
d’Azote de 1,5 bars et un relief de roches de glace d’eau.
LA DÉCOUVERTE D’UN OCÉAN GLOBAL SOUS LA SURFACE DU SATELLITE MIMAS
On peut donc logiquement se poser la question suivante :
comment peut-on
détecter à distance la présence d’une grande quantité d’eau cachée sous la
surface d’un satellite ?
Il y a plusieurs techniques.
·
Grâce aux champs magnétiques. : ces océans sont généralement composés d’eau
salée, conductrice de l’électricité. Elle peut générer des champs électriques et
magnétiques secondaires qui perturbent les propriétés du champ du satellite. Un
bon exemple est Europe dont l’océan a été découvert par Galileo. Idem pour
Ganymède.
·
Par examen visuel comme pour Encelade avec ses geysers grâce à Cassini.
·
Par radio science, on suit le mouvement de la sonde (ici Cassini) lorsqu’elle
passe près du satellite (ici Titan) et on peut mettre en évidence des bourrelets
de marée. Bourrelets qui étaient très importants signifiant la présence d’un
océan d’eau globale.
Dans le cas de Mimas aucune de ces méthodes n’a été utilisée. On a utilisé une
méthode liée à la mécanique céleste.
Retour sur les anneaux ;
Les particules qui se trouvent sur le bord interne de la division de Cassini
(entre
anneaux A et B) sont en résonnance 2:1 avec
Mimas, c’est-à-dire qu’elles tournent deux fois plus vite autour de Saturne que
Mimas ne tourne autour de Saturne, cela a pour conséquence que les particules de
l’anneau B ne peuvent pas migrer vers la division Cassini, Mimas empêche ces
particules de venir sur des orbites stables.
Revenons maintenant à Mimas et je reprends en partie
l’article de l’IMCCE décrivant cette découverte.
S’il
y a bien un objet dans le Système solaire au sein duquel on ne s’attendait pas à
trouver de l’eau à l’état liquide, c’est sans nul doute Mimas.
À la différence de sa grande sœur Encelade, la surface de Mimas est
extrêmement cratérisée et
inactive, ne témoignant d’aucun signe d’activité sous sa surface.
C’est en étudiant le mouvement de l’orbite de Mimas, grâce aux données de la
sonde Cassini de la NASA, que les chercheurs sont parvenus à confirmer la
présence d’un océan sous l’ensemble de la surface glacée du satellite.
(NDLR : comparaison œuf cru œuf cuit, en comparant leurs rotations on peut
déterminer lequel est lequel)
Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont étudié l’effet de la rotation de
Mimas sur son orbite. Comme la plupart des lunes du Système solaire proches de
leur planète, Mimas présente toujours la même face à Saturne.
Crédit photo : NASA/JPL/Caltech.
En plus de cette rotation moyenne, Mimas voit sa rotation affectée par de
petites oscillations, appelées librations. C’est précisément la
rétroaction de ces
librations sur le mouvement orbital que les chercheurs ont étudiée.
En comparant la solution issue des modèles numériques qui décrivent l’orbite de
Mimas aux observations fournies par la sonde Cassini, ils ont découvert que les
caractéristiques fines de l’orbite de Mimas ne peuvent s’expliquer que par la
présence
d’un océan global caché sous toute la
surface du satellite. De plus, en y associant les mesures directes des
librations, ils ont pu déduire que l’épaisseur de la coquille de
glace de Mimas est comprise
entre 20 et 30 km, soit une épaisseur comparable à la coquille de glace
d’Encelade.
Afin de déterminer l’origine et l’âge de cet océan, les chercheurs ont modélisé
les effets de marées provoqués par la planète Saturne sur Mimas. Les calculs ont
montré que la naissance de cet océan, datant seulement de 5 à 15 millions
d’années, a très certainement été causée par le triplement de l’excentricité
orbitale initiale de Mimas, sous l’influence gravitationnelle de plusieurs
autres lunes de Saturne. L’amorce de l’activité interne est donc tellement
récente qu’elle explique la raison pour laquelle aucun signe d’activité n’a
encore jamais été constaté en surface.
Le travail de recherche était en fait plus complexe que ce petit résumé, il est
très bien détaillé dans la conférence de V Lainey.
Cette découverte est parue
dans Nature.
CONCLUSION.
·
Les effets de marées sont présents partout dans l’Univers, même sur les
exoplanètes.
·
Ils sont responsables d’un chauffage parfois extrêmement intense, permettant
d’offrir des conditions d’habitabilité (eau liquide), même loin d’une étoile,
donc pas nécessaire d’être dans la zone « habitable » d’une étoile.
·
Découverte en 2024 d’un océan global sur une 5ème lune, Mimas, la lune la plus
petite et la plus improbable.
POUR ALLER PLUS LOIN :
Le moment cinétique à travers l'Univers
Effets des marées sur la dynamique des satellites de
Jupiter et de Saturne
https://www.researchgate.net/profile/Valery-Lainey
Les phénomènes de marées dans le système solaire
Présence d’un "jeune" océan sous la couche de glace de
Mimas
Mimas : étoile de la mort ou genesis ?
Lunes glacées et mondes océans autour de Jupiter et
Saturne
Présence d’un « jeune » océan sous la couche de glace de Mimas de
l’IMCCE
Bon ciel à tous
Prochaine conférence SAF. : le mercredi 11 Décembre 2024
(CNAM) 19 H
avec
Roland LEHOUCQ Astrophysicien
CEA
sur « ANTI-MATIÈRE,
ENTRE FICTION ET RÉALITÉ !»
Réservation comme d’habitude à
partir du 14 Nov 9h00 ou à la SAF directement.
Transmission en direct sur le canal YouTube de la SAF :
https://www.youtube.com/channel/UCD6H5ugytjb0FM9CGLUn0Xw/feautured
Bon ciel à tous !
Jean Pierre
Martin
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