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Mise à jour 22 Avril 2023.

CONFÉRENCE MENSUELLE DE LA SAF

De Jean Pierre MARTIN Physicien Pdt comm Cosmologie SAF

LE JWST, RÉALISATION ET PREMIÈRES IMAGES.

Organisée par la SA de Montgeron

Le Samedi 8 Avril 2023 à 17H00

 

Photos : JPM pour l'ambiance. (Les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)

Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur. Voir les crédits des autres photos si nécessaire

La présentation est disponible sur ma liaison ftp , mais comme elle est très copieuse je n’ai mis en ligne que la version pdf (donc sans les animations, que j’ai inclus pour la plupart dans le CR). Rentrer le mot de passe, puis CONFÉRENCES JPM ensuite SAISON 2022/2023 ; elle s’appelle JWST-2023.pdf

Elle est en pdf car en pptx avec les vidéos elle est trop lourde (800MB).

Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent me contacter avant..

 

La présentation étant très claire et très détaillée, mon CR sera succinct, je m’inspire aussi de CR antérieurs.

 

Photos : DB

 

Une image contenant texte, intérieur, mur, personne

Description générée automatiquementPhoto : Danielle Baudvin

 

Le conférencier avec Jacques Fric (à droite) le Président de la Société Astronomique de Montgeron

 

Le but de cet exposé est d’expliquer la genèse de ce nouveau télescope spatial qui est annoncé comme le « successeur » de Hubble.

 

Je commence mon exposé par des rappels sur la lumière et sur le prédécesseur du JWST, c’est-à-dire Hubble.

 

 

Le James Webb Space Telescope ou JWST ou Webb, tire son nom du célèbre administrateur de la NASA de l’époque Apollo (de 1961 à 1968).

 

 

 

 

Les coûts de ce super télescope n’a fait que déraper depuis l’origine, son coût est passé maintenant à 10 milliards de $.

De même sa date de lancement n’a fait qu’être repoussée, maintenant on vise plutôt Dec 2021 ! Il doit être lancé par une Ariane 5 de Kourou, et placé au point L2 (Lagrange, à 1,5 millions de km de la Terre) du système Terre-Soleil.

 

 

Une image contenant intérieur, sol, personne, plafond

Description générée automatiquement

Photo : Danielle Baudvin.

 

Un rappel :

   Chaque domaine du spectre électromagnétique est important en astronomie :

   Les ondes radio renseignent sur les gaz interstellaires et les champs magnétiques

   Les micro-ondes procurent des informations sur l’origine de notre Univers avec le bruit de fond cosmologique (CMB)

   L’infra-rouge nous renseigne sur les molécules dans l’espace et sur les objets « froids » comme les gaz et poussières autour des jeunes étoiles.

   Le visible nous permet de voir

   L’ultra-violet nous indiquent la présence de gaz chauds

   Les rayons X et gamma nous renseignent sur les événements les plus violents de l’Univers : pulsars, étoiles à neutrons, trous noirs …

   La combinaison de toutes ces différentes informations nous permet d’atteindre une meilleure connaissance de tous ces corps qui nous entourent.

 

Le JWST ou le Webb, est principalement dans le domaine IR, domaine qui est bloqué par l’atmosphère terrestre, il est donc normal qu’il soit posté dans l’espace.

 

Plus grand (un court de Tennis), plus performant que Hubble (un autobus) dont il est théoriquement le successeur, il devrait grâce à sa vue dans le domaine infra rouge de 0,6 à 26 microns (rappel : visible de 0,4 à 0,8 et Hubble : 0,2 à 2,4 un peu dans les UV et un peu dans l’IR) nous permettre d’appréhender les premières formations de galaxies, 300 millions d’années après le Big Bang. C’est l’Univers profond qui sera à sa portée.

 

POURQUOI IR ?

 

L’infra-rouge est un domaine correspondant aux objets froids de l’Univers, c’est-à-dire qu’il peut pénétrer les poussières entourant les galaxies dans les disques proto planétaires afin d’étudier ceux-ci.

Les sujets d’observation principaux du Webb sont :

·         Les premiers instants de l’Univers et la période de réionisation.

·         La naissance des premières étoiles

·         Les galaxies

·         Les systèmes planétaires et l’origine de la vie.

Il devrait aussi être capable de « voir » des exoplanètes de type rocheux ainsi que d’analyser leurs atmosphères. Et notamment les plus proches de nous comme le système Trappist découvert il y a peu et qui semble fort intéressant.

 

Les étoiles naissent de l’effondrement gravitationnel de la matière stellaire. Elles sont entourées d’un « cocon » de poussières au début de leur formation : le disque protoplanétaire, il absorbe presque tout le rayonnement visible de la jeune étoile

Mais cette poussière est TRANSPARENTE en proche IR

L’IR est donc un outil indispensable pour étudier la jeunesse des étoiles.

De même l’IR est utile pour pénétrer les nuages interstellaires comme le cœur de notre galaxie

L’IR détecte aussi les étoiles froides comme les naines brunes

L’IR permet aussi de détecter la signature chimique des planètes : H2O; CO2, O3 etc..

Les objets très lointains (très vieux) à cause du redshift émettent dans l’IR aussi, c’est un marqueur de l’Univers primordial.

 

 

POURQUOI L2 :

 

 

Une image contenant graphique

Description générée automatiquementJWST sera lancé par une Ariane 5 ECA de Kourou, et placé au point de Lagrange L2 du système Terre-Soleil (à 1,5 millions de km de la Terre).

 

L2 est à l’abri des interférences (rayonnement, chaleur..) terrestres, lunaires et solaires, de plus l’environnement est froid et stable, ce que l’on recherche

Les points comme L2 (c’est aussi le cas de L1 et L3) notamment sont instables, c’est-à-dire qu’il faut de temps en temps corriger la position, en fait les satellites effectuent une orbite en Lissajous autour de ces points tous les 6 mois

Ces orbites (perpendiculaires à l’écliptique) permettent ainsi de voir le Soleil afin d’alimenter les panneaux solaires

Mais ces points « métastables » permettent quand même d’économiser une grande quantité de carburant.

 

Pourquoi si loin ? (rendant pour le moment toute réparation impossible). Pour des questions thermiques ; plus près il nécessiterait un système cryogénique de refroidissement plus poussé que celui prévu, qui est un refroidissement principalement passif. De plus il sera ainsi loin de toute pollution lumineuse notamment IR.

 

Durée de vie prévue : 5 à 10 ans, due à la consommation d’ergol toutes les 3 semaines, pour maintenir l’orbite.

 

C’est le plus grand satellite envoyé dans l’espace à ce jour.

 

 

 

 

 

Les différentes époques cosmologiques. Crédit NASA

 

 

 

Une image contenant homme, personne

Description générée automatiquementC’est John Mather, du GSFC, le prix Nobel de physique qui est le responsable scientifique de ce télescope.

 

C’est un spécialiste de la cosmologie et il a reçu avec son collègue George Smoot, le prix Nobel de Physique en 2006 pour sa contribution à l’étude du bruit de fond cosmologique (CMB) grâce aux mesures du satellite COBE.

 

Première lumière attendue du Webb, deux mois après sa mise à poste.

 

Photo : JPM

 

 

 

 

LE TÉLESCOPE.

 

Ball Aerospace, célèbre firme connue pour ses succès de missions spatiales (Deep Impact etc..) est le principal sous-traitant du télescope spatial JWST (James Web Space Telescope), dont le maître d'œuvre est Northrop Grumman.

 

Il opèrera dans l'Infra Rouge. Pourquoi ? Hubble a déjà défriché le chemin dans le domaine visible et le Webb s’intéresse principalement au domaine lointain, donc touché par le décalage vers le rouge et l’infrarouge. Les étoiles et planètes en formation sont situées au centre de nuages opaques de poussières et de gaz et seul le rayonnement IR permet de les pénétrer.

Il devrait aussi s’intéresser aux exoplanètes et aux signes de vie possible sur celles-ci. Il devrait permettre de « voir » certaines exoplanètes.

 

 

Comparaison des fenêtres de détection des trois principaux télescopes spatiaux américains

 

 

Voici une vue du télescope spatial James Webb, on reconnaît dans la partie supérieure le miroir primaire constitué de 18 miroirs hexagonaux en Béryllium recouvert d’or (3 groupes de 6 miroirs) et le miroir secondaire.

 

Une image contenant diagramme

Description générée automatiquementL'ensemble constituant le télescope (OTE = Optical Telescope Element) qui fonctionne dans l’IR.

 

Le côté Soleil et Terre se trouve bien entendu du côté opposé aux miroirs, donc vers la partie inférieure de l'image.

 

Ces écrans servent donc bien à protéger le télescope et ses précieux instruments de la chaleur solaire ;

 

 

Illustration : NASA/JWST

 

 

 

 

Le miroir primaire et les protections solaires sont de très loin supérieurs à ce que la coiffe d'une fusée peut contenir aussi un système astucieux de pliage a été mis au point afin qu'un déploiement sans problème dans l'espace se produise.

 

 

LES MIROIRS.

 

Une image contenant rayon de miel

Description générée automatiquement 

Comparaison des miroirs de Hubble et du JWST

Le miroir primaire fait 6,5m de diamètre et est constitué de différents segments hexagonaux identiques en Béryllium de 1,3m de diamètre, chacun pesant environ 20kg.

 

Le Béryllium se déforme très peu et en plus c’est un métal très léger (densité 1,8).

 

 

Par contre il est difficile à usiner et toxique.

 

 

 

 

Chaque segment de ce miroir a été recouvert d’un dépôt ultra fin (120nm !) d’or par évaporation, afin d’assurer la bonne réflexion de la lumière IR reçue. Ce dépôt est recouvert lui-même d’une fine couche de SiO2 (du verre) pour protection. Masse du miroir seul : 625kg.

Ils sont construits par Ball Aerospace & Technologies Corp., Boulder, Colorado

 

 

 

Une image contenant graphique

Description générée automatiquement

Les miroirs élémentaires doivent être jointifs le plus possible, et ce ne peut être accompli qu’à l’aide d’un système développé à cet usage et appelé Primary Mirror Alignment and Integration Fixture effectuant ses positionnements par pointée Laser.

Chaque segment possède sur sa face arrière six actuateurs permettant de modifier légèrement sa surface et sa courbure pour compenser certains effets indésirables et permettre une mise au point parfaite.

 

Les miroirs sont montés sur une structure très solide en composite de carbone.

 

Crédit ASU/NASA

 

Signalons que les miroirs sont mobiles dans une faible latitude afin de compenser certaines erreurs de mise au point.

 

 

 

 

 

 

Une image contenant mur

Description générée automatiquement

On voit ici, le miroir complètement monté dans la salle blanche du GSFC à Greenbelt (Maryland).

 

Crédits: NASA/Chris Gunn

 

Le système comprend aussi deux autres petits miroirs afin d’amener l’image dans le plan focal.

 

Vidéo de l’alignement des miroirs.

 

On dit que ce télescope serait si précis qu’il permettrait de voir une abeille sur la Lune et d’en mesurer sa chaleur (c’est principalement un télescope IR).

 

 

 

 

 

LE BOUCLIER THERMIQUE OU PARE SOLEIL.

 

Comme le télescope s’intéresse particulièrement aux objets IR, il va falloir que la température des capteurs et de l’électronique ne produise pas de chaleur détectable. Il faut donc refroidir cet ensemble capteurs-électroniques. C’est le rôle du bouclier thermique.

 

IL faut maintenir une température pour la plupart des capteurs de l’ordre de 50K.

Ce refroidissement est assuré par différentes couches de polymères (pliables bien sûr aussi) de 22m de long et 12m de large.

Ce parasol de 300m2 est large comme un court de tennis. Il assure un refroidissement passif de la partie mesure de 50K. Certains instruments nécessitent un refroidissement cryogénique supplémentaire pour bien fonctionner.

 

Chaque couche de polymère (Kapton –de Dupont de Nemours- revêtu d’Alu pour la conductibilité électrique, afin d’éliminer toute électricité statique !) est plus froide que la couche inférieure, le vide entre les couches étant un excellent isolant thermique. Le Kapton peut tenir à des écarts de température énormes : -269°C à +400°C !).

 

 

Ces 5 couches sont beaucoup plus efficaces qu’une seule couche plus épaisse. De plus elles sont toutes (légèrement) différentes en taille et épaisseur.

 

Une image contenant texte, intérieur, équipement

Description générée automatiquement

Ces couches sont résistantes, mais ne sont pas à l’abri d’un percement à cause d’une micrométéorite, c’est pour cela qu’un processus spécial de fusion entre différentes parties des polymères évite un déchirement à partir de ces points de rupture.

C’est la société NeXolve qui assemble les couches de polyester.

 

Photo : test des différentes couches chez Northrop Grumann, on remarque les différentes soudures luttant ainsi contre l’augmentation de la taille d’une déchirure.

Crédit NG

 

 

 

 

Le bouclier est toujours situé face au Soleil de manière à ce que le télescope soit toujours « à l’ombre ».

 

Le déploiement du parasol a été particulièrement bien étudié et vérifié afin qu’il s’effectue correctement, sinon la mission est compromise.

 

Vidéo du test sur Terre.

https://youtu.be/PVAe9Ovca5Q    

vidéo :

 

 

 

LES INSTRUMENTS.

 


Le JWST possède principalement 4 instruments :

•        La caméra dans le proche infrarouge (NIRCam), fournie par la NASA par l’intermédiaire de l’Université de l’Arizona

•        Le spectrographe dans le proche infrarouge (NIRSpec), qui fonctionne dans des longueurs d’onde similaires, fabriqué par Astrium GmbH et fourni par l’ESA et dont les détecteurs et l’ensemble de micro-volets sont, eux, fournis par la NASA.

•        L’instrument dans l’infrarouge moyen (MIRI) – est fourni par un consortium d’organismes européens (dont le CEA) financés sur des fonds publics et par la NASA, la coordination étant assurée par l’ESA.

•        Le détecteur de guidage de précision/caméra à filtre accordable (FGS/NIRISS), est fourni par les Canadiens de l’ASC

 

 

En ce qui concerne les instruments, voici un tableau résument leur domaine d’utilisation en longueur d’onde.

 

 

Les 4 instruments (Near-InfraRed Imager and Slitless Spectrograph [NIRISS], Near InfraRed Camera [NIRCam], Near InfraRed Spectrograph[NIRSpec], et Mid-Infrared Instrument [MIRI]) offrent une complémentarité d’utilisation.

 

 

La camera NIRCam (Near Infra Red Camera):

 

NIRCam est la caméra principale grand champ de JWST dans le domaine du proche IR, de 0,6 à 5 microns.

C’est aussi un élément essentiel pour permettre l’alignement du miroir primaire grâce à son analyseur de front d’onde. Elle a été conçue par l’Université d’Arizona et la société Lockheed Martin.

Cette caméra comprend deux modules redondants de 2,2x2,2 arcmin séparés de 44 arcsec.

Chaque module se répartit les longueurs d’onde entre 0,6 et 2,3 pour l’un (SW=short wavelengths) et 2,4 à 5 microns pour l’autre (LW=long wavelengths).

Chaque détecteur du SW arrive sur 4 CCD de 2040 par 2040 pixels. Pour celle du LW la lumière est dirigée vers un seul CCD.

Divers filtres permettent de sélectionner les gammes de longueurs d’onde voulues.

Un mode coronographe est aussi disponible.

 

La NIRCam est particulièrement bien adaptée à l’étude de la formation des premières galaxies et amas ; la formation des premières étoiles, et à l’étude des exoplanètes et KBO.

 

 

Le NIRSSpec (Near Infra Red Spectrograph) :

 

Un des instruments les plus importants est celui fourni par l’ESA, le NIRSpec conçu pour détecter le rayonnement émis par les premières étoiles et galaxies qui se sont formées au début de l’existence de l’Univers, quelque 300 millions d’années après le Big Bang.

Le spectrographe décompose le rayonnement infrarouge de ces objets lointains en fonction de ses différentes couleurs, générant ainsi un spectre qui fournira aux scientifiques des données capitales sur la composition chimique, les propriétés dynamiques, et l’âge de ces objets, ainsi que sur la distance qui les sépare de la Terre. Le NIRSpec sera capable d’observer simultanément pas moins de 100 de ces objets. Il fonctionne dans la gamme de 0,6 à 5 microns. La sélection des objets s’effectue à l’aide de micro-volets.

La technologie des micro-volets (microshutters en anglais) qui sont de très fines ouvertures de l'épaisseur d'un cheveu qui devraient permettre au télescope de voir des objets à des distances encore jamais atteintes. Le rôle de ces micro volets est de masquer la lumière parasite d'objets non désirés situés au premier plan.

 

Ces microshutters en silicium sont un développement du Goddard Space Flight Center (GSFC), Greenbelt, Md, USA. Chaque volet est entouré d'une boucle magnétique qui servira à l'ouvrir ou le fermer.

Il y a 62.000 micro-volets chacun mesurant 100 par 200 microns.

Ces volets sont arrangés en quatre réseaux identiques de 171 lignes par 365 colonnes, ils laissent passer la lumière vers le détecteur IR de 8 millions de pixels. Ils devront fonctionner à 40K.

 

Procédure pour prendre une photo avec ce système : on va d'abord à partir de télescope terrestre prendre une photo du coin du ciel à étudier, ensuite on va créer un masque avec ces micro-volets qui ne laissera passer que la lumière des objets intéressants qui ira ensuite vers le détecteur. Cette philosophie est valable car ce télescope a un grand champ de vision et que donc ses observations peuvent contenir des millions de sources lumineuses. Ces micro-volets vont donc aider à bloquer la lumière des objets perturbateurs.

Harvey Moseley est le PI des micro-volets au GSFC, d'après lui cette technologie devrait nous permettre d'aller plus loin (dans le temps) dans la détection d'objets, car les objets les plus brillants (les plus proches) seront masqués, procurant ainsi un gain en sensibilité de la détection.

 

 

 

Le spectro imageur MIRI (Mid Infra Red Instrument):

 

Comme son nom l’indique, il s’intéresse plus particulièrement au domaine de l’IR moyen (5 à 28 microns), il est dédié à :

·         À l’étude de la formation des premières galaxies ainsi que de leur évolution

·         À l’étude de la formation des premières étoiles

·         À l’étude des systèmes exoplanétaires avec un mode coronographe permettant d’imager des exoplanètes, ce même système permettant aussi la détection de disques circumstellaires.

 

C’est une coopération Europe/USA dont la part européenne est dirigée par l’ESA. Le CEA (Irfu) participe activement au développement de l’imageur MIRIM de cet ensemble.  Il a 3 modes d’observation : imagerie, coronographie (différents masques) et spectro basse résolution.

 

La coronographie (mise au point par le célèbre Bernard Lyot) est une technique permettant d’atténuer fortement la lumière d’un objet brillant pour permettre l’observation de son environnement (le Soleil pour sa couronne, une étoile pour ses exoplanètes etc..).

Le LESIA a mis au point une nouvelle génération de coronographes, appelés coronographes de phase à 4 quadrants ou QPM (Four-Quadrant Phase Masks) très performants.

 

Les détecteurs du MIRI nécessitent un refroidissement aux alentours de 6K ; un refroidissement cryogénique doit s’ajouter au refroidissement passif. Ce refroidissement cryogénique a plusieurs étages utilise de l’Hélium en circuit fermé.

 

 

 

 

LE LANCEMENT.

 

Le JWST voyage en bateau vers son site de lancement, en effet, un voyage en avion aurait été problématique à l’arrivée.

Le reste du parcours de l’aéroport de Cayenne à Kourou aurait été plus difficile à surmonter pour ses fragiles instruments et aussi le passage de nombreux ponts aurait été problématique, c’est la raison pour laquelle on a choisi le transport par bateau.

Finalement le télescope est arrivé au port de Pariacabo le 12 Octobre 2021.

Son container de 30 m de long (70 tonnes) est placé à bord du MN Colobri qui a voyagé depuis la Californie et le canal de Panama jusqu’à la Guyane. Le MN Colibri est la réplique du MN Toucan qui sert aussi au transport des pièces d’Ariane vers la Guyane en traversant l’Atlantique.

Ces deux bateaux sont conçus pour pouvoir remonter le fleuve Kourou jusqu’au port indiqué.

L’avantage de ce port, c’est qu’il est situé à Kourou, près du site de lancement, il n’y a plus qu’à décharger l’ensemble et à l’amener sur site.

 

Ce 25 Décembre 2021 nous avons eu droit à un cadeau de choix du Père Noël : un superbe lancement nominal comme on dit là-bas, du télescope spatial James Webb tant attendu par une Ariane 5

Lancement réussi : Bravo Ariane.

L’ESA et la NASA communiquent que le lancement a été si précis qu’il va permettre d’économiser du carburant pour les corrections de trajectoire. Il devrait lui rester suffisamment de carburant pour prolonger la durée de vie du télescope et dépasser les 10 ans garantis.

 

Photo prise par le dernier étage d’Ariane du JWST libéré. Crédit ESA

 

 

 

 

LE DÉPLOIEMENT DANS L’ESPACE.

 

 

Le miroir primaire et les protections solaires sont de très loin supérieurs à ce que la coiffe d'une fusée peut contenir, aussi un système astucieux de pliage a été mis au point afin qu'un déploiement sans problème dans l'espace se produise.

Le déploiement obéit à une procédure bien précise, qui est celle-ci, en simplifiée :

              Déploiement des panneaux solaires et antennes

              Déploiement des protections solaires

              Surélévation de la tour portant les miroirs et instruments

              Démarrage du refroidissement cryogénique

              Déploiement du miroir secondaire

              Déploiement du miroir principal

              Arrivée en L2

 

Illustration : NASA/JWST

 

Film sur le déploiement de Northrop Grumman : 5 minutes à voir

https://youtu.be/dlJtO7EbK-U

 

 

 

vidéo :

 

 

Webb déployé, bravo la NASA.

Nous avons suivi au jour le jour les différentes étapes du déploiement, et TOUT EST PARFAIT

LE JWST EST TOTALEMENT DÉPLOYÉ ;

Le déploiement complet prend approximativement un mois, il démarre quelques heures après le lancement et procède étape par étape. Voir vidéo

En ce moment, il aligne les miroirs un par un à l’aide de micromoteurs

Cela va prendre quelques mois, la vitesse étant de quelques mm par jour

Les miroirs avaient été décalés légèrement pour le décollage (vibrations)

Une question que tout le monde se pose : pourquoi aucune caméra n’a photographié l’évolution du déploiement ?

Il n’y en avait pas !!!!!

Les Américains n’ont pas voulu prendre le risque d’une complexité supplémentaire !

 

Autre animation du déploiement (court) : https://youtu.be/RzGLKQ7_KZQ

 

Le télescope spatial James Webb, le Webb est maintenant parfaitement à poste en L2 ; la NASA a commencé depuis Février 2022 l’alignement des 18 segments du miroir principal afin d’obtenir la mise au point optimal et que ces 18 miroirs se comportent comme un seul de 6,5 m de diamètre.

Pourquoi aligner ces miroirs, il aurait suffi de les envoyer dans l’espace déjà alignés ! Eh bien non ! Pour des raisons de sécurité, on ne voulait pas que ces miroirs élémentaires se touchent (ils doivent être finalement jointifs), de peur que les vibrations au moment du lancement et des changements de trajectoires, ne les endommagent.

Donc une fois à poste et stabilisé, on peut procéder à cette délicate (et très lente opération).

En effet chaque miroir est équipé de petits micromoteurs (actuateurs) permettant de très légers déplacements, de l’ordre de quelques mm.

La vitesse de déplacement de chaque miroir élémentaire peut atteindre
1 mm par jour.

Cette opération va durer trois mois. Car pour ne pas trop réchauffer le télescope à cause du mouvement des moteurs, on les fait fonctionner l’un après l’autre et sur une très courte durée de temps. Le miroir doit atteindre une température de 50K, pas plus.

Cette procédure d’alignement est une procédure en sept étapes, nous venons d’achever la phase cinq.

 

 

JWST : MIROIRS ALIGNÉS.

 

La NASA vient de l’annoncer officiellement, les miroirs du Webb sont parfaitement alignés. Cet alignement a duré près d’un mois et comptait de nombreuses étapes qui ont toutes été passées avec succès.

Le JWST possède principalement 4 instruments :

La caméra dans le proche infrarouge (NIRCam), fournie par la NASA par l’intermédiaire de l’Université de l’Arizona

Le spectrographe dans le proche infrarouge (NIRSpec), qui fonctionne dans des longueurs d’onde similaires, fabriqué par Astrium GmbH et fourni par l’ESA et dont les détecteurs et l’ensemble de micro-volets sont, eux, fournis par la NASA.

L’instrument dans l’infrarouge moyen (MIRI) – est fourni par un consortium d’organismes européens (dont le CEA) financés sur des fonds publics et par la NASA, la coordination étant assurée par l’ESA. Il nécessite 7K pour fonctionner.

Le détecteur de guidage de précision/caméra à filtre accordable (FGS/NIRISS), est fourni par les Canadiens de l’ASC

 

 

 

LES PREMIÈRES IMAGES.

 


Une image contenant plein air, nuit, léger

Description générée automatiquementC’est le premier champ profond (deep field) du Webb, et quelle profusion de détails, cela promet pour les autres photos !

Attention photo HR de 25MB !

 

Une vue en IR proche (avec NIRCam) de l’amas de galaxies SMACS 0723, amas très massif, si bien qu’il déforme gravitationnellement la lumière des objets derrière lui. (Lentille gravitationnelle).

 Cette photo a aussi été publiée en parallèle avec la même zone du ciel mais prise an IR Moyen (avec l’instrument MIRI) que vous pouvez voir sur ce composite. À gauche MIRI, à droite NIRCam.

 

Les objets rouges, sont en fait entourés de poussières et sont probablement des galaxies lointaines.

 

Crédit : NASA, ESA, CSA, et STScI

 

 

 

 

Image produite avec un temps d’exposition total de 12,5 heures répartis sur plusieurs jours.

 

Dans l’image en IR Moyen (à gauche sur l’image composite précédente), les points jaunes et verts sont des étoiles.

 

Particulièrement bien visibles sur l’image en Proche IR, sont les arcs (voir flèches) dus à l’effet lentille gravitationnelle (en orange, en IR moyen ils apparaissent en bleu) produit par cet amas de galaxies daté de 4,6 milliards d’années. Cet effet lentille fait ressortir ce qu’il y a derrière et qui est daté de 13,1 milliards d’années, soit 700 millions d’années après le Big Bang.

C’est une des vues les plus lointaines de notre Univers !

 

De nombreuses autres photos apparaissent comme :

 

Spectres de galaxies très lointaines.

 

On atteint aussi la composition de certaines galaxies.

 

Webb capture aussi le grand final d’une étoile :

Une naine blanche est ce qui reste de la fin d’une étoile moyenne (comme notre Soleil) à la fin de sa vie) une fois qu’elle a explosé et diffusé de la matière tout autour d’elle, comme on le voit sur ces images prises par le JWST. Le reste de l’étoile se trouve au centre (le point blanc).

 

Comparaison côte à côte de la nébuleuse de l’anneau austral en proche IR à gauche et en IR moyen à droite.

Crédit : NASA, ESA, CSA, et STScI

C’est la caméra en proche IR, la NIRCam qui a produit la photo de gauche, alors que la photo de droite en IR moyen provient de la caméra de l’instrument MIRI. On remarque qu’en IR moyen, la partie centrale apparait plus rouge, car MIRI plus sensible à la poussière en IR. On peut voir les différentes couches de matière éjectée qui forment cette nébuleuse planétaire.

 

 

Des sites commencent à proposer la comparaison Hubble/Webb comme :

https://thenextweb.com/news/james-webb-vs-hubble-compare-images-side-by-side

https://esawebb.org/images/comparisons/weic2216/

https://www.radiofrance.fr/franceinter/james-webb-contre-hubble-on-a-compare-les-images-des-deux-telescopes-4929789

https://www.nbcnews.com/data-graphics/compare-photos-nasas-james-webb-space-telescope-hubble-space-telescope-rcna37875

 

 

Le Webb et les exoplanètes.

Le JWST n’a pas fini de nous étonner, à peine en service, il vient de découvrir la première signature du CO2 dans l’atmosphère d’une exoplanète, WASP-39 b, et ceci grace à son spectrographe NIRSpec, en grande partie fourni par l’ESA.

 

Et même la composition d’une atmosphère d’exoplanète.

 

Il est vrai que cette planète est relativement proche, 700 al, du type Jupiter chaud, donc géante gazeuse, de masse le quart de notre Jupiter et de diamètre 30% supérieur. Bien entendu, elle orbite son étoile (du genre Soleil) en quatre jours, donc très proche de celle-ci, sa température devant être de l’ordre de 900°C.

 

Reprenons : WASP 39b (WASP = Wide Angle Search for Planets est un télescope terrestre dédié aux transits exoplanétaires), WASP 39b est une planète de type Jupiter chaud (plutôt Saturne chaud) située très près de son étoile (période orbitale : 4 jours !). Proche 700 al et brulante ! L’étoile WASP 36 est du type G similaire à notre Soleil.

 

En poursuivant son étude sur cette exoplanète, le Webb a effectué l’analyse à ce jour la plus détaillée de son atmosphère.

Ces instruments ont mis au jour : du dioxyde de Soufre (SO2), de l’eau, du monoxyde de Carbone (CO), du dioxyde de Carbone (CO2), du Sodium (Na), et du Potassium (K).

Il est à noter que c’est la première fois que l’on détecte du SO2, la présence d’un tel corps est due uniquement à des réactions photochimiques.

 

Voici le résultat de ces différentes mesures :

 

Les super coronographes du Webb.

 

Une des principales missions du nouveau télescope spatial JWST est la découverte et l’étude d’exoplanètes.

On connait la complexité de telles mesures, l’exoplanète étant généralement des milliers de fois moins brillante que son étoile, et apparaît aussi très proche d’elle angulairement.

À cet effet le Webb est équipé de différents modes d’observations.

Ce sont les instruments NIRCam (Near Infra Red Camera) et MIRI (Mid Infra Red Instrument).

 

Associés à ces instruments sont divers coronographes (instruments bloquant la lumière de l’étoile, un peu comme une éclipse artificielle, inventés par Bernard Lyot de l’Observatoire de Paris). 5 masques pour la NIRCam et 4 pour MIRI.

Mais souvent ces coronographes ne sont pas suffisants pour bloquer complètement la lumière de l’étoile.

On utilise alors des stops de Lyot (Lyot stops en anglais) qui éliminent le reste de la lumière. Cela permet aussi de se débarrasser des 6 pics de diffraction généralement associés à ces photos.

 

Les coronographes peuvent ainsi observer des objets proches jusqu’à 0,13 arcsec de leur étoile et jusqu’à 30 arcsec.

 

Ces coronographes ont permis de prendre pour la première fois une image directe d’une exoplanète avec différents filtres et coronographes.

 

Mais l’un des centres d’intérêt du JWST est le système d’exoplanètes Trappist.

 

L’avantage de ce système est que ses planètes sont à priori toutes de type rocheux, donc similaire à la nôtre.

Trappist 1b est la plus proche de son étoile, et donc présente toujours la même face, due aux interactions gravitationnelles (effet de marée). Elle n’est certainement pas propice à abriter des formes de vie.

C’est une équipe NASA (UC Santa Cruz) et française (CEA) qui a effectué la première mesure de température d’une exoplanète.

Mesures effectuées dans l’IR moyen grace à l’instrument MIRI et son imageur Mirim développé par le CEA-IRFU..

La température mesurée était de l’ordre de 500 K (soit approx 230 °C), ceci impliquant une très probable absence d’atmosphère. En effet la présence d’une atmosphère rendrait la température plus froide.

Mesures effectuées lors de l’éclipse secondaire de la planète.

Ces premières mesures sont une répétition pour de futures mesures des planètes Trappist (1e, 1f et 1g) situées dans la zone habitable.

 

 

RETOUR AUX GALAXIES.

 

 

Il semble bien que le JWST ait mis au jour un grand nombre de galaxies très anciennes (300 Ma après le BB seulement !) et très massives ce qui pose un problème avec les théories actuelles de formation de galaxies.

 

 

POUR TERMINER : LES PILIERS REVISITÉS.

 

On connait tous la célèbre photo de Hubble prise dans la région de l’Aigle (à  6500 al) et appelée « les piliers de la création », nous l’avions évoqué à l’époque. Ils avaient été représentés en 2015 et améliorés.

 

Mais maintenant c’est le JWST avec toute sa puissance infra rouge qui s’est tourné vers cette région du ciel, et alors, quelle merveille ! Ces piliers remplis de gaz deviennent transparents pour la longueur d’onde IR, et nous avons droit à cette superbe image que nous avons mis en parallèle avec l’image prise par Hubble vingt ans plus tôt.

 

Comparaison Hubble (à gauche) et JWST (à droite)

Crédit NASA, ESA, CSA, STScI, J. DePasquale, A. Koekemoer, A. Pagan (STScI), ESA/ Hubble Heritage Team

 

La NASA propose aussi une vue qui permet de faire glisser une fenêtre pour passer de Hubble au Webb. Dommage on ne peut pas la copier.

 

Cette photo JWST a été prise à la NIRCam. L’IR proche permet de passer au travers des nuages de poussières et donne une tout autre impression de ce coin du ciel.

 

La même région a aussi été prise par la caméra en IR moyen MIRI et nous donne un aspect fantasmagorique de l’ensemble.

En effet en IR moyen la poussière interstellaire n’est pas complétement transparente, d’où l’aspect extrêmement sombre des piliers, et les étoiles ne sont pas assez brillantes pour apparaitre sur la photo, alors qu’on les voit parfaitement sue cette de la NIRCam.

En IR moyen on ne peut voir que les étoiles qui ont toujours leur halo de poussières, comme celles qui brillent en rouge.

 

 

 

 

Le Webb continue sa moisson de découvertes, nous en reparlerons….

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN :

 

Il y a de trop nombreux sites sur le JWST, il a fallu choisir :

 

Le site du JWST à la NASA, très détaillé.

 

The Amazing Anatomy of James Webb Space Telescope Mirrors par le GSFC

 

NASA Webb Telescope Mirrors Installed with Robotic Arm Precision par la NASA

 

James Webb Space Telescope User Documentation

 

James Webb Space Telescope Sunshield Test Unfolds Seamlessly

 

MIRI Overview

 

MIRI : une caméra infrarouge à bord du JWST par le CEA (IRFU)

 

NIRSPEC – the near-infrared spectrograph on JWST par l’ESA

 

MIRI sur le télescope spatial JWST par le LESIA

 

Webb Takes a Stunning, Star-Filled Portrait of the Pillars of Creation

 

 

Voir le dossier JWST sur votre site préféré.

 

 

 

 

Bon ciel à tous

 

 

 

Jean Pierre Martin 

www.planetastronomy.com

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