mise à jour le 7 Septembre 2006

 

CONFÉRENCE
"UN TÉLESCOPE OPTIQUE GÉANT POUR L'EUROPE"

Par Guy MONNET

Coordinateur du Projet E-ELT à l'ESO
Organisée par l'IAP

98 bis Av Arago, Paris 14 ème

 

le mardi 5 Septembre 2006 à 19H30

 

 

 

Photos : JPM.pour l'ambiance (les photos avec plus de résolution peuvent m'être demandées directement)

 

 

 

BREF COMPTE RENDU

 

C'était la rentrée à l'IAP et quelle rentrée avec ce sujet passionnant du projet de télescope géant pour l'Europe, cela s'appelle pour les initiés l'E-ELT : European Extremely Large Telescope.

 

 

C'est Guy Monnet de l'ESO à Garching (Munich) coordinateur du projet qui nous en parle, et il sait de quoi il parle; il a été Directeur de l'Observatoire de Lyon puis de Marseille, puis du CFHT à Hawaï (le veinard!) et enfin Directeur du VLT au Chili.

 

Et c'est Daniel Kunth de l'IAP (à gauche sur la photo) qui l'introduit au public.

 

 

 

 

 

Public qui est venu très nombreux en cette journée de reprise des conférences lui étant destinées, comme on le voit sur les photos suivantes.

 

 

 

UN TÉLESCOPE GÉANT , POURQUOI?

 

La scène du crime, comme le dit si bien Guy Monnet, c'est l'Univers de maintenant au début du Big Bang, vers les 13,7 milliards d'années; actuellement avec les télescopes en service, on bute vers le 1er milliard d'années après le BB.

 

L'un des objectifs de la nouvelle génération de télescopes est d'arriver à imager les premières étoiles ou les première galaxies.

 

Les trois but scientifiques majeurs de ces nouveaux télescopes sont :

·        Comprendre l'émergence des structures complexes comme celles représentées sur cette impressionnante vue du relevé 2dF (two degree field) où sont représentées plus de 72.000 galaxies, chaque galaxie est un point du relevé. (à gauche en hiver, à droite en été). On remarque des structures filamenteuses extrêmement prononcées alors que l'Univers tel que décrit par WMAP semble très uniforme. Cela introduit les notions de matière noire et d'énergie noire.

·        Étudier les lois physiques au niveau de l'échelle de Planck (approx 10-35m et 10-43 sec). Avec un E-ELT on pourrait détecter une variation éventuelle des constantes fondamentales.

·        Détection des exoplanètes et notamment des exo Terres. On espère imager directement des planètes plus petites que Jupiter autour d'un Soleil, comme cela a été fait à l'ESO pour 2M1207; et détecter indirectement (méthode des vitesses radiales) des planètes de l'ordre de grandeur de notre Terre. Actuellement 4 planètes ont été détectées directement et plus de 190 indirectement.

 

 

LA COMPÉTITION ENTRE TÉLESCOPES GÉANTS.

 

 

 

Il existe bien entendu des télescopes en projet qui plutôt que d'être en compétition avec l'E-ELT sont en synergie avec lui.

 

 

Comme :

Le système de Radio télescopes ALMA (Atacama Large Millimeter Array); le projet LOFAR aussi de radio télescopes, dirigé par les Pays Bas et assez original, sans parties mobiles; ces télescopes vont plutôt étudier l'Univers froid.

Le suivi des étoiles sera obtenu par GAIA le successeur d'Hipparcos dans l'espace; autre télescope spatial prévu le remplaçant (mais pas dans les mêmes longueurs d'ondes) de Hubble, le JWST (James Webb Space Telescope) qui travaillera dans l'IR.

Plus lointain les projets XEUS (X-Ray Evolving Universe Spectrometer) et DARWIN consacré aux planètes extra solaires, tous deux projets de l'ESA et DARWIN

 

 

 

Donc le E-ELT va trouver sa place dans cette constellation de nouveaux projets.

 

 

 

LA RAISON D'ÊTRE DES TÉLESCOPES.

 

C'est de collecter de la lumière et/ou d'obtenir des images fines.

Regardons l'évolution des lunettes et télescopes depuis cet instant quand Galilée eut le premier l'idée de tourner une lunette vers le ciel en 1610.

 

En abscisse (axe horizontal) les années et en ordonnées le diamètre de l'instrument (échelle log).

Les étoiles représentent les lunettes (en anglais refracting telescopes) et les petits ronds des télescopes (en anglais reflecting telescopes).

On remarque que la modeste lunette de Galilée était de 26mm de diamètre; le gain de flux lumineux par rapport à la pupille de l'œil (6mm de diamètre) suit une loi au carré, bien sûr, donc de approximativement 18, c'est aussi le gain en finesse.

 

Puis les lunettes ont évolué au cours du temps :

 

Galilée

Dollond

Lick

Yerkes

26mm en 1610

En 1760

De 1m en 1900

De 1,2m

 

Au delà de ces dimensions, les lunettes ne pourraient pas être construites (trop lourdes).

 

Une invention perfectionna la lunette, avec un nouveau principe optique : le télescope, un jeu de miroir raccourcit le trajet optique et diminue ainsi le poids.

 

Newton

Herschel

Foucault

Mount Wilson

Premier telescope

Genial constructeur 1220mm

Premier miroir en verre

192 miroir de 2,5m

 

On ne pouvait pas dépasser 2,5m, le télescope s'effondrerait sous son propre poids.

 

Il fallait donc trouver des astuces pour avoir des télescopes de plus en plus grands.

 

OPTIQUE PASSIVE.

 

Pour réduire le poids les constructeurs du Palomar de 5m ont fait appel à des techniques de support qui se déforme localment, mais les limites étaient vite atteintes.

 

L'ESO avait envie de construire un 8m et il fallait de nouvelles techniques :

 

OPTIQUE ACTIVE.

 

Optique active "simple".

 

 

(dessin © ESO Janssen)

 

Il fallait des miroirs minces et courts afin d'avoir une structure moins lourde et moins chère.

 

Cela est obtenu en utilisant ces miroirs minces qu'il faut déformer pour donner la bonne forme, en fonction d'une mesure (wavefront sensor sur le dessin qui nécessite 30 secondes) qui va donner l'ordre au calculateur de jouer sur des actionneurs qui vont déformer le miroir afin d'obtenir une image nette.

Le miroir primaire peut ainsi être déformé 1000 fois par nuit.

 

 

 

Mais une importante amélioration va être apportée à ce système par Jerry Nelson au Mauna Kea à Hawaï.

 

 

 

 

 

 

 

Optique active segmentée.

 

On introduit ainsi la notion de miroir mosaïque

 

 

 

Là aussi des actionneurs vont jouer sur les miroirs segmentés et le déformer.

 

Les miroirs segmentés sont plus faciles à fabriquer et plus léger, conduisant ainsi à une meilleure structure  et à un télescope plus trapu.

 

On en voit le principe à gauche pour le télescope Keck d'Hawaï.

 

 

 

 

 

 

OPTIQUE ADAPTATIVE POUR L'E-ELT.

 

Mais tout cela ne suffit pas pour le nouveau E-ELT; pour avoir une image plus fine, il faut non seulement une optique active mais aussi une optique adaptative.

 

 

C'est un procédé qui permet de corriger en temps réel les déformations d'un front d'once, dues principalement à la turbulence atmosphérique. Ceci est effectué grâce à un jeu de miroirs déformables dont l'action est basée sur l'information d'un analyseur de front d'onde. C'est donc une correction en boucle.

(schéma : IAP)

 

 

Mais le problème est d'avoir un capteur de cette turbulence si possible au niveau des étoiles en visant une étoile brillante dans le parage de la zone à étudier; cela n'étant pas toujours possible on crée des étoiles artificielles pour résoudre la question.

 

Comment?

Il existe autour de la Terre vers les 92 km d'altitude des nuages de Sodium sur lesquels on peut faire se refléter la lumière d'un Laser créant ainsi une étoile artificielle.

 

Il en faut plusieurs pour une meilleure correction et aussi plus la longueur d'onde diminue plus il en faut.

Il faut aussi une étoile naturelle pas trop loin du champ pour vérifier. Bref une technologie qui marche.

 

 

 

 

LE CONCEPT DU E-ELT.

 

 

Ce sera un télescope de 42m, le projet OWL de 100m étant jugé trop ambitieux, il sera donc remplacé par celui-ci.

 

La surface réceptrice sera de 1000m2 et les progrès technologiques très importants.

 

Le verre du miroir doit être repensé et les industriels ont mis au point un verre au Carbure de Silicium qui ne fait que 27kg/m2.

 

Bien entendu ce sera une coopération internationale, la liste non exhaustive se trouve ICI.

 

 

 

 

 

Les défis technologiques sont nombreux et illustrés sur cette figure présentée par Guy Monnet.

 

 

OÙ SERA T IL CONSTRUIT?

Plusieurs endroits sont évoquées :

·        La Palma aux Canaries

·        Au Paranal même.

·        À Toler Grande en Argentine ou tenez vous bien…..

·        Au Dôme C en Antarctique!!!

 

Disons que si l'Antarctique semble idéal pour plusieurs paramètres, il n'est pas praticable d'installer facilement un tel télescope à cet endroit, dommage, aux dernières nouvelles ce serait La Palma qui tiendrait la route.

 

 

QUAND ET COMBIEN?

Le projet est évalué à 650 M€ pour une première lumière en 2017.

 

 

 

 

Une coopération avec les autres organismes astronomiques "concurrents" est bien sûr envisagée et aussi avec la NSF (National Science Foundation américaine qui finance les grands projets scientifiques) afin d'être complémentaire.

 

 

Bonne chance au E-ELT!!!!!

 

 

Et de conclure pour nous faire espérer avec cette image (origine inconnue) :

 

Y en a t il parmi notre public????

 

 

 

 

POUR ALLER PLUS LOIN.

 

Sur les principes des lunettes et télescopes :

 

Télescopes et lunettes par nos amis de Techno Science.

 

Les instruments d'optique astro, une bonne explication.

 

Un autre, sur les instruments d'observation astronomique par M Derouet : 43 pages pdf en français

 

Une présentation en pdf sur les miroirs et l'optique des télescopes, très bien fait. (anglais)

 

Sur l'optique active et adaptative :

 

L'ESO explique ces différents principes.

 

L'optique active en détail par l'ESO. (anglais).

 

L'optique adaptative par Wikipedia (anglais).

 

 

 

Plus généralement sur les télescopes en service :

 

Visite au VLT par notre ami G Saccomani de la SAF.

 

Le VLT par Wkipedia (en français).

 

Le projet E-ELT avec OWL, GMT et TMT sur ce site.

 

Le GMT en présentation Power Point de 3,3MB (anglais) très clair.

 

 

 

 

C'est tout pour aujourd'hui!

 

Bon ciel à tous

 

Jean Pierre Martin

http://www.planetastronomy.com/